Musée des Beaux-Arts de Calais 25 rue Richelieu 62100 Calais France
Suite à l’exposition du musée de l’Abbaye Sainte-Croix des Sables d’Olonne du 11 juillet au 4 octobre 2009 consacrée à l’œuvre de l’artiste Philippe Bazin, le musée des beaux-arts de Calais organise la suite de La Radicalisation du monde. Prolongeant la présentation vendéenne, le musée complète sa sélection en privilégiant les photographies et vidéos récentes réalisées par Philippe Bazin à Porto, en Pologne, en Albanie mais également à Douvres, à Calais et à Bilbao.
Philippe Bazin n’est pas un inconnu à Calais. Le musée des beaux-arts et la galerie de l’Ancienne Poste l’avaient déjà convié. De ces collaborations étaient nés la série des Adolescents en 1993-1995 et celle des Bourgeois de Calais en 1995 ainsi que des vues du musée en chantier en 1999-2000. Ces portraits en noir et blanc faisaient le constat d’un certain état en cours de transformation : le passage à l’âge adulte, la dégradation du monument le plus célèbre de Calais et un espace culturel en travaux. En co-éditant l’ouvrage La Radicalisation du monde et en invitant Philippe Bazin en 2010, le musée accompagne l’artiste dans ses nouveaux terrains d’investigation et ses nouvelles orientations artistiques, la couleur et la vidéo. Depuis 2001 Philippe Bazin se fraie un chemin artistique entre peinture d’histoire au sens moderne et contemporain du terme et documentaire photographique.
A l’heure où triomphent l’éphémère et l’événement, les questions liées à la pérennité se tarissent au profit de l’accessibilité, du renouvellement et de la circulation. Ce sont à la fois l’instantané et les flux, à l’échelle du temps et de l’espace, qui conditionnent et créent l’histoire. Seule l’architecture et en particulier celle des musées semble donner à la notion de la durée et de mémoire une existence réelle. Au gré de ses déplacements, Philippe Bazin photographie le réel anodin, quotidien, modeste et plus grave : les bateaux, les containers, les camions, les échafaudages, les chantiers, les métiers à tisser, mais également les camps de rétention. Ces objets aussi stables qu’imposants et ces lieux abandonnés ou en pleine activité n’en sont pas moins dénués de pittoresque et de lourds symboles. Les visages photographiés auparavant se sont presque absentés, laissant les lieux et les choses témoigner d’un territoire en pleine mutation.
Philippe Bazin, le port de Matosinhos, Porto, 2001, crédit photo Philippe Bazin Cette œuvre est une lucide et poignante métaphore de nos vies contemporaines réduites au mouvement perpétuel du cycle production/acheminement/consommation/déchet. Et malgré l’aspect apparemment désenchanté de ce thème, les photographies et vidéos jouent sur différents registres : l’absurde et le non-sens, l’humour et le comique de situation, les formes sculpturales d’un tas et la belle matière picturale d’une coque de bateau. Près de 150 photographies et vidéos seront ainsi réunies dans les salles du musée et notamment la série complète des Adolescents de Calais qui sera l’occasion d’un grand rendez-vous.
Le musée des beaux-arts de Calais ne pouvait que répondre favorablement à la proposition de Philippe Bazin d’exposer ses photographies et vidéos récentes. En effet, elles semblent s’adresser directement aux habitants de Calais et de la région, confrontés à la migration, à la restructuration de l’industrie textile mais aussi à la naissance de nouveaux musées ainsi qu’au trafic maritime. Le regard de Philippe Bazin, à la fois neutre en évitant tout pathos et toute complaisance mais engagé et artistique, rend la situation du territoire plus universelle et moins temporaire, et donne de la consistance et du temps à ce qui n’est souvent traité que dans l’urgence.
Commissaires d’exposition : Barbara Forest, conservatrice du musée des beaux-arts et Philippe Bazin, photographe.