Les éveillés
Dernier en date, le thème des "Éveillés" présente une forme d'aboutissement dans l'oeuvre de Michel KIRCH.
Sur le plan formel tout d'abord… Tout ce qui a été esquissé, exploré précédemment y est ici affirmé, confirmé dans une géométrie plus rigoureuse que jamais : choix du format carré agissant comme un protocole au sein d'un fond noir, et le plus souvent, un personnage unique se déployant dans un paysage dont il constitue la ponctuation, et dont le rapport débouche sur le sens.
Le personnage, à lui tout seul, porte le poids de la condition humaine. Ses gestes, ses silences, ses élans sont des attitudes universelles quant à la façon dont chacun peut ou doit gérer son rapport au monde. Il est à la fois minuscule et gigantesque, perdu et pleinement présent. On peut y trouver, inscrites dans sa silhouette, les raisons légitimes ou non de sa présence en un lieu donné. Sa présence qui pourrait être incongrue si la dynamique qui l'anime ne transcendait pas le paysage reçu, l'idée reçue. Il est un catalyseur, il est une conscience, l'Éveil le guette…
Le paysage est l'épreuve de l'éveillé. Les éléments y sont puissants, parfois gigantesques, souvent inquiétants. L'épreuve que le personnage traverse ressemble à son paysage intérieur : des bas-fonds saturés d'obscurité, des routes à suivre au hasard labyrinthique, des reliefs à gravir. Mais le paysage a besoin de l'éveillé comme l'éveillé ne peut pas le devenir sans lui. Ils sont complémentaires d'une énergie dont la genèse siège dans l'équilibre de leur rencontre.
Michel KIRCH affirme, avec "Les Éveillés", l'intention manifeste d'inscrire le spirituel dans la structure même de son travail.
Essence
« Essence » est le monde sous-jacent. Une tentative de percevoir les formes, formulations de l’inconscient... Une sorte de rêve éveillé dont les contours, d’abord incertains, s’extraient du noir, de l’obscur fondamental, pour s’habiller de sens. Une sorte de reportage, donc, des projections infinies, baroques, surprenantes, de nos désirs, angoisses, affects de tous genres se bousculant dans nos tréfonds.
« Essence » a vu le jour par l’exercice d’un « laisser aller » indispensable à l’émergence d’une écriture presque secrète. Une écriture « automatique » constituée de formes, de visions, s’articulant parfois pour élaborer un récit aussi fugace que puissant.
Le noir revêt ici une grande importance. Toute fécondité en résulte. Toute exigence de clarté en procède. Il est avant et après la vie. Il est une matrice nourrissant nos molécules, nos rêves, nos destins. Ce qui en émerge est une interface.
Un lieu d’échanges formaté, fini, entre deux zones obscures. L’échange est la fonction de cette interface. L’échange a pour autre nom la vie, carrefour des entrées et des sorties. Les traces de ces échanges s’inscrivent dans la matière, dans la reproduction, dans la déjection, dans l’imagination... Mais ce qui fait sens, ce qui nous distingue de notre appareil animal, est la trace d’une pensée, le circuit d’une énergie oeuvrant même au delà de la disparition.
Ce sont ces étincelles que je cherche dans des visages, des lieux ou des situations.
L’essence de l’être, cet état presque imperceptible au regard du chahut mondial, et qui pourtant justifie la vie au mieux...
« Essence » se veut une peinture réaliste de ce qui nous construit mais nous dépasse...
Climats
Le réchauffement climatique est en marche et l'action humaine pour l'enrayer semble illusoire... Soit il est trop tard, soit les intérêts à court terme sont trop puissants, soit le phénomène dépasserait le pouvoir de l'homme. Des responsables religieux tentent de récupérer la possibilité apocalyptique tandis que les scénarios les plus divers fleurissent à tout vent : parfois réjouissants, comme l'olivier migrant en région parisienne, parfois troublants comme le Champagne désormais exploité en Cornouailles, souvent angoissants comme l'arrêt du Golf Stream. J'ai voulu exprimer ces fantasmes visuellement. Comme pour conjurer l'angoisse à venir. Ainsi que l'annonçait Nietzsche : « Le cadeau de la mort, c'est qu'on n'a plus à mourir... »... Et comme la Beauté semble indissociable de l'Univers, des harmonies s'organisent, des paysages apparaissent. Voilà, c'est arrivé, et les survivants contemplent la nouvelle Création avec l'espoir d'une aube féconde...
Ce qui pourrait s'intituler « Esthétique d'une catastrophe à venir » est en réalité une vieille histoire. De tous temps les cataclysmes ont façonné l'histoire et la géographie. Mutations lentes ou rapides, désastres provoquant l'extinction
d'espèces et l'apparition d'autres. C'es pourquoi j'ai souvent introduit dans ce travail les vestiges d'autres destructions, érosions, disparitions, comme les témoins d'une histoire infinie. Ils sont aujourd'hui les balises d'une catastrophe dont ils ne sont pas les vestiges directs. En ce sens une seconde vie leur est proposée. Quant aux hommes...