Cette femme de pluie, bleue, assise, en attente du désir côtoie ces femmes de tête étrangement lisses, futuristes en attente d'un ailleurs. Ce corps souffrant en mouvement sur lui-même voisine avec ce visage de femme incrédule ravagé par le désespoir. Ce penseur de pierre d'un absolu passé dialogue avec cet humanoïde d'un futur (proche?). Les lignes abstraites du dessin d'encre recomposent-elles la femme grise élégante et souple? La femme démantibulée les observe d'un regard vert. Telles sont les corps multiples, remplis d'âme, imaginés en peinture, en image photographique, en noir et blanc ou en couleur par Blondeau, Dumas, Lauer et Quittard. Ce sont leurs dialogues à 4 voix que l'Atelier 40 vous invite à découvrir.
GEORGES DUMAS
Le travail de Georges Dumas s'articule autour d'une nouvelle conception de l'art photographique. Son imagerie intègre la modernité technologique via le retravail sur ordinateur. Par ce jeu, il sublime un corps, ou métamorphose un lieu, un objet. Il joue avec nous; nous questionne sur le sens et le contenu de l'image. Mais cette imagerie sait aussi s'approprier la force visuelle de la peinture qui s'imbrique avec le travail photographique afin de recréer des images uniques. Dès lors, la matière picturale dialogue souvent avec photoshop et le papier glacé....
Dans notre époque de surabondance, Georges Dumas nous interroge sur ce qu'est une image, son sens ou son non-sens, son authenticité, sa puissance formelle, sa construction et sa déconstruction. A la recherche de la forme, de l'atemporalité et de la rigueur, cette photographie rare réveille notre sensibilité et notre mental.
JEAN-MARC QUITTARD
Jean-Marc Quittard retranscrit depuis plus de quinze ans le corps et ses méandres. Pour lui, le travail sur le corps est perçu comme une nouvelle théâtralité. Il réintroduit dans la peinture les notions de temps, d’éphémère et de vivant. Son travail s’appuie sur trois principaux modes d’expression : peinture, dessin et vidéo qui fonctionnent par cycles et viennent s’enrichir l’un l’autre. Alors que le dessin se présente comme un instantané, la peinture est une recomposition narrative du corps. Pas de réalisme, pas d’abstraction : Jean-Marc Quittard transcende l’émotion visuelle. La vidéo intervient comme un documentaire fiction du travail de l’artiste et de son interaction avec les corps. Elle s’insère dans le travail pictural même, interagit avec la toile pour donner naissance à la « vidéopainting », synthèse inédite entre peinture et vidéo.
NATALIE J. LAUER
La peinture de Natalie Lauer joue des contrastes: la figuration et l’abstraction, le brut et le subtil, le noir et le blanc. De la banalité du quotidien naît, par le travail de l’artiste, une expression forte et moderne. Où qu’elle soit, Natalie prend des photographies de gens au quotidien. Aucune pause. Son intention n’est pas de rechercher la beauté d’un portrait mais une expression simple et vraie. Elle retravaille alors ce matériau en peinture.
Une fois la figuration posée, l’abstraction la décrypte, l’interprète et la porte vers l’universel.
PASCAL BLONDEAU
Vivant entre Paris et New York, Pascal Blondeau est un artiste aux multiples facettes : scénographe, photographe et plasticien. Diplômé de l’Ecole des Beaux-Arts mais aussi du « Studio de Comédie Musicale Alice Donna », il produit et met en scène dans les années 90 plusieurs spectacles sur les plus prestigieuses scènes parisiennes. Depuis, il est revenu à sa passion première, la photographie. Le travail photographique de Pascal Blondeau porte sur plusieurs thèmes: le rapport au corps et à la beauté, la frontière entre l’humanité et l’inhumanité, et les pièges d’une « beauté » toujours plus parfaite. Lorsqu’on observe ses « mannequins de chair», on est frappé par le contraste violence/extrême douceur, réel /irréel, humain /inhumain.
Du musée d’art contemporain de Bangkok ou de Skopié, aux galeries de Thessalonique ou de Paris, les séries photographies de Pascal Blondeau témoignent de l’aspect artificiel de notre monde « ultra-moderne », de notre rapport au corps et de notre identité. Si certaines de ses photos mettent le public mal à l’aise, c’est parce qu’elles sont avant tout un miroir face auquel s’interroger.