
À partir de la rentrée 2009, un nouveau lieu consacré à l’art contemporain verra le jour au cœur de Senlis : il s’agit de la Fondation Francès qui sera inaugurée en septembre. L’originalité du projet de la Fondation est d’être à la fois un lieu d’exposition et une galerie.
Créée à l’initiative d’Hervé et Estelle Francès, amateurs d’art et collectionneurs, la Fondation occupe un bâtiment et un jardin au pied de la cathédrale du XIIe siècle. Elle va proposer chaque année une série d’expositions dédiées au meilleur de la création contemporaine avec un même principe directeur : faire dialoguer les œuvres d’un artiste invité avec des pièces issues de sa collection regroupant les travaux de près de 150 créateurs.
Pour sa première exposition la Fondation Francès, en partenariat avec la Galerie Rabouan-Moussion (Paris), invite le russe Dimitri Tsykalov avec l’exposition « Mort ou vif » et réunit autour de lui les œuvres d’artistes de la collection comme Andres Serrano ou Jeffrey Silverthorne.
Philosophie de la Fondation
par Estelle et Hervé Francès
« L’art est juste lorsqu’il est juste au-dessus de ce que nous tolérons, de ce que nous acceptons, de ce que nous imaginons. L’art est juste lorsqu’il nous invite à réfléchir, à frémir, à infléchir nos points de vue à partager nos émotions, les démultiplier. Pour créer de nouvelles rencontres, de nouvelles discussions, de nouvelles émotions. Lorsqu’il nous pousse aussi parfois à déglutir ou à vomir. L’art est juste lorsqu’il abaisse nos seuils d’intolérance, lorsqu’il réveille nos consciences, lorsqu’il repousse nos lignes de défense. Nous ne craindrons pas d’exposer des oeuvres qui ne répondent pas aux canons de l’esthétique. Le choix de la Fondation se portera toujours sur des oeuvres que l’on n’oubliera pas. Même si elles dérangent, choquent, provoquent le débat.
La Fondation Francès a choisi de collectionner l’art contemporain parce que le rôle d’un collectionneur est de soutenir la création vivante. Par l’achat d’une oeuvre, le collectionneur encourage financièrement mais aussi affectivement un artiste qui, grâce à ce soutien, continuera de créer. Collectionner l’art contemporain c’est témoigner de son époque, livrer son regard personnel sur sa vie intime et la Vie collective. Collectionner l’art contemporain, ce n’est pas seulement une réflexion du temps présent, c’est aussi une réflexion proposée aux générations futures, le souvenir et le témoignage des engagements et des errements de notre époque.
Nous voulons croiser les regards, faire tomber les barrières. Nous voulons des échanges, des mélanges. À certains moments, la Fondation prendra l’initiative de rencontres plus intimes et utiles à toutes les parties prenantes : artistes, visiteurs, collectionneurs, institutions, galeries, journalistes, entreprises… Vous l’aurez compris, nous agirons pour que notre Fondation devienne un carrefour précieux pour tous ceux qui veulent et peuvent contribuer à la promotion de l’art contemporain.
Pourquoi quatre fois par an ? Parce que nous tenons à garder une dimension événementielle à chaque ouverture. Parce que nous devons conserver du temps pour développer la collection de la Fondation, acquérir de nouvelles oeuvres, rencontrer de nouveaux artistes et de nouvelles galeries. Parce que la mission de la Fondation ne se limite pas seulement à l’ouverture de son espace à Senlis mais aussi aux prêts réguliers d’oeuvres pour des expositions et des musées à travers le monde, à l’organisation des accrochages des oeuvres sur le site parisien de l’agence Okó et également à terme à l’accueil d’artistes en résidence à Senlis.
Pourquoi un artiste majeur et une galerie d’envergure internationale ? Parce que la qualité n’est pas le privilège des musées et des grands collectionneurs et que l’envie de partager des moments uniques avec le plus grand nombre ne doit pas être une belle intention mais une réalité tangible… avec notamment le principe de l’entrée gratuite à la Fondation.
Parce que la gratuité d’accès à la Fondation n’exclut pas l’exigence de présenter le meilleur de l’art contemporain. Parce que les collectionneurs qui viendront à la Fondation devront être surpris et pouvoir acquérir des oeuvres dignes de leurs collections. Parce que tout le monde n’a pas forcement l’opportunité d’aller à Londres, New York, Moscou ou Madrid pour découvrir les talents de la scène internationale. »
L
’esprit de la collection
La Fondation est riche de plus de 300 oeuvres que ses fondateurs ont souhaité partager avec le plus grand nombre (la Fondation est accessible gratuitement au public). Ouverts à toutes les expressions contemporaines, ils collectionnent avec passion et le souhait de soutenir la création vivante. Depuis le début, ils ont choisi un thème unique pour la constitution de leur collection : l’Homme, que l’on parle de l’Homme et ses excès, de ses souffrances, de ses violences, de ses croyances, de ses désirs, de ses peurs ou de ses fantasmes… L’Homme sous toutes ses coutures, à poil, sans fard ni faux-semblant.
La collection réunit 145 artistes issus de 30 pays s’exprimant aussi bien à travers des peintures, des photographies, des sculptures, des installations, des vidéos, des objets détournés… Si on trouve dans la collection de grands noms qui sont sur le devant de la scène comme David Lachapelle, Nan Goldin, Erwin Olaf, Mounir Fatmi ou Adel Abdessemed, Estelle et Hervé Francès restent attentifs à la découverte de nouveaux talents. Ils enrichissent leur collection au gré des découvertes qu’ils font au sein des galeries, lors de vente aux enchères ou par la relation directe qu’ils entretiennent en direct avec les artistes.
Une fondation d’avenir dans un lieu de mémoire
La Fondation est située au coeur de la vieille ville ceinte de remparts Gallo-Romains et du Moyen Âge. La maison de la Fondation est vaste (un peu plus de 300 m2) et lumineuse.
Elle est prolongée sur toute sa longueur par un jardin orienté vers la Cathédrale de Senlis, érigée au XIIe siècle. Hervé et Estelle Francès vivent dans la maison qui jouxte la Fondation, l’ensemble ayant hébergé notamment des chanoines et des prêtres. Les premiers écrits retrouvés sur le site de la Fondation remontent au XVe siècle. Le chanoine Afforty y vécut trois ans de 1747 à 1750(1).
Pour un lieu qui porte une certaine Foi en la création, en l’humanisme et en la tolérance, c’est un cadre finalement très approprié. Les travaux de rénovation ont duré un peu plus de deux ans pour répondre aux contraintes de sécurité et d’accueil des personnes handicapées mais aussi aux strictes exigences de l’Architecte des Bâtiments de France qui veille au respect du patrimoine de la Cité. Ils ont été entièrement financés par Estelle et Hervé Francès. Un logement a été également prévu pour l’accueil en résidence d’un artiste. Travail qui sera ensuite prolongé par une exposition du travail de l’artiste hébergé. L’espace peut être également privatisé pour des entreprises ou des institutions.