« Le réel n’est rien d’autre que ce que je vous montre » (Peter Klasen)
Peintre urbain du métal et du béton, à la technique froide et objective, Peter Klasen est aussi un photographe au regard féroce qui immortalise les fragments d’une réalité des plus ordinaires où la machine règne “telle une divinité” aussi fascinante qu’inflexible.
Au début des années 1980, Peter Klasen arpente les sites industriels et portuaires de Dunkerque où il découvre ces espaces en marge de la ville. Dès lors, ces lieux, loin d’être anodins aux yeux de l’artiste, exercent sur lui une véritable emprise, le conduisent à sillonner le monde et à revenir sur le Dunkerquois en 2008 puis 2009, à l’invitation du LAAC.
DE LA MACHINE AU PORT
Pour l’exposition, Peter Klasen a proposé au LAAC un voyage « initiatique ». Il nous fait découvrir son univers, son obsession pour l’industrie, ses paysages, ses rouages, ses mécanismes, et nous entraîne de Los Angeles à La Havane, villes portuaires où l’artiste a pu, un temps, partir à la recherche de la déesse machine. Sur de grands tirages photographiques, cette dernière se révèle dans tous ses états : éclatante, opulente et omniprésente à Los Angeles, meurtrie par le blocus économique et les ravages des cyclones et néanmoins providentielle à La Havane.
TOUS LES CHEMINS MÈNENT À DUNKERQUE
Peter Klasen dresse ensuite un portrait du territoire dunkerquois : les photographies des années 1980 et 1990 font écho à celles, plus récentes, de 2008 et 2009. L’artiste enregistre, constate, énumère, retrace. Il tisse avec la machine des liens intimes et s’en approche, comme pour nous la faire toucher, ou, au contraire, reprend une distance nécessaire pour nous révéler le gigantisme et la toute-puissance industriels : ici, l’irruption d’une colonne sèche ou l’errance feinte de tuyauteries ; là, les meurtrissures des carrosseries d’un engin de chantier. Parfois, dans un cadrage plus large, il capte l’éclat de grandes cuves sous les rayons du soleil ou encore un ciel zébré par des colonnes électriques.
DUNKERQUE ET LES « LOST LANDSCAPES »
Les photographies de Dunkerque deviennent le point de départ d’une série d’immenses compositions réalisées pour l’exposition. Des images fragmentées de corps féminins, issues de photos de magazines, se découpent sur un arrière plan où se juxtaposent usines et équipements portuaires. Réalité réinventée d’un paysage dunkerquois impossible, ces « Lost Landscapes » s’apparentent à des icônes contemporaines.