La Chambre sociale de la Cour d'appel de Paris a rendu le 9 juin dernier une décision favorable à 23 photographes de l'Agence France Presse (AFP) qui avaient intenté contre elle une action en contrefaçon pour les exploitations numériques de leurs oeuvres.
La Cour d'appel de Paris a en effet jugé que ces photographes n'avaient pas cédé à l'AFP leurs droits d'auteurs pour les exploitations numériques de leurs images. L'arrêt précise que les contrats de travail liant les photographes à l'AFP n'ont pas expressément prévu une clause de cession pour ce type d'exploitation dans le respect des dispositions du code de la propriété intellectuelle.
Elle précise que la spécificité de la mission légale de l'AFP, qui est de fournir des éléments d'actualité régulièrement et d'utiliser les moyens techniques les plus innovants pour développer son action « ne la dispense pas du respect des exigences légales relatives au droits d'auteur » et la Cour relève que la numérisation des photographies est « source d'une exploitation commerciale toujours plus croissante, diversifiée et particulièrement porteuse de conséquences financières » dont les photographes n'ont pas bénéficié.
Ainsi, la Cour estime qu'en reproduisant et diffusant les photographies numérisées sans le consentement de leurs auteurs, l'AFP a commis des actes de contrefaçon qui ouvrent droit à réparation. Elle confirme le jugement de première instance par lequel le Conseil des prud'hommes de Paris a ordonné une expertise visant à déterminer la rémunération que les photographes doivent percevoir sur la base de 10 % du chiffre d'affaires généré par l'exploitation de leurs photographies entre décembre 1997 et décembre 2002.
L'AFP est également condamnée payer à chacun des vingt-trois photographes, une provision de 4000 euros ainsi qu'une somme de 2000 euros au titre de leurs frais de justice.
La Cour d'appel n'a en revanche pas ordonné l'interdiction d'exploiter les photographies des vingt-trois photographes, ces derniers ayant abandonné cette demande afin de ne pas paralyser le fonctionnement de l'AFP et ne pas mettre en péril leur propre source de travail.
Ce litige est né en 1998 lorsque l'AFP lance son service de distribution de photographies sur Internet, « Image Forum ». Les photographes de l'AFP ne percevant aucune rémunération pour les exploitations numériques de leurs images, des négociations sont ouvertes mais n'aboutissent pas.
A partir de 2002, ces photographes adhérent à la SAIF, société de gestion collective de droits d'auteurs, qui faute d'obtenir un accord avec l'AFP, l'assigne en contrefaçon devant le Tribunal de Grande Instance de Paris. En 2003, ce dernier sursoit à statuer sur les demandes de la SAIF et renvoie l'affaire devant le Conseil des Prud'hommes, précisant que la question des droits d'auteur dépend de l'analyse des contrats de travail conclus par les photographes en amont.
Suite à l'arrêt rendu par la Cour d'Appel de Paris le 9 juin dernier, la SAIF (Société des Auteurs des arts visuels et de l'Image Fixe) peut désormais reprendre le contentieux devant le Tribunal de Grande Instance, au titre de la rémunération des exploitations numériques des images des photographes à partir de décembre 2002 par l'AFP et ses partenaires.