Dans le cadre de l'Image Publique 2009 "Habiter", des projections-débats ont
lieu à la Maison internationale de Rennes, jusqu'au 18 juin, avec projections
d'images et échanges avec les photographes.
Programme complet : www.photoalouest.info
Vous trouverez ci-après un billet réalisé à partir du débat du mardi 2 juin
"bienvenue chez nous", qui réunissait Guy Durand, Christophe Le Dévéhat et
Georges Quaglia, exposés cette année à Rennes.
Comment photographier les gens chez eux? comment rendre compte du quotidien,
entre document et poésie?
Lors de cette soirée, les photographes Guy Durand, Georges Quaglia et Christophe
le Dévéhat, par leurs pratiques photographiques et l'explication de leur
démarche, nous ont amené à saisir les enjeux et les problématiques qui sont à
inhérentes à la photographie telle qu'ils la pratiquent.
Photographier des gens chez eux implique une prise de position par rapport à ces
personnes, comment établir une relation, un cadre, une distance, dans le but
d'une photographie?
Pour Guy Durand (série sur les habitants de Chypre nord, et série éclats de
vie), il s'agit de ne pas laissé trop de marge au photographié, mais plutôt
de l'organiser dans le décor que lui, a choisi. Cela lui permet de construire
son image telle qu'il la pense, et non pas telle que la personne a envie de se
voir. Il s'inspire beaucoup du portrait studio du début siècle, où le sujet fait
face, se donne complètement au photographe sans possibilité de fuite de l'image.
Ainsi, il reste toujours maître de ses compositions, c'est lui qui voit et
interprète photographiquement la personnalité de ses sujets. Le décalage se
trouve alors entre l'attente de la personne, et la distance qu'a le
photographe.
Ne pas trop en savoir et aller à l'essentiel permet alors de dégager des
portraits pertinents et très composés.
Georges Quaglia a une démarche tout à fait différente, puisque son travail sur
les habitants des maisons de retraite est l'objet d'une commande du directeur.
Il a pu donc passer 6 mois à travailler, à rencontrer, à créer des relations
avec les personnes âgées. Il s'est fondu dans ce monde et a pu ainsi saisir des
moments de vie qui témoigne de la proximité du photographe avec les habitants.
Christophe le Dévéhat a travaillé sur les habitants d'une grande tour rennaise,
Sarah Bernhardt, dans la quête de l'identité multiple de cette tour, les
manières si différentes qu'ont les habitants de la vivre. La photo intervenait
après un échange de 2, 3h, et c'est là, habité par une histoire, qu'il
réalisait la photo, mise en scène ou non, l'important étant de faire juste,
avec un arrangement spontané de ce qui est donné, en se laissant techniquement
porter par ses émotions. Ce qu'il cherche avant tout, est que le carré de
l'image soit habité, qu'on sente un ensemble, un cohérence, un rapport fort
entre la personne et tout ce qui l'entoure.
C'est cette écriture qu'il a développé, appartement après appartement, donnant
un visage vivant à une tour austère.
Photographier les gens chez eux passe par tout une entrée en matière, une
disponibilité de leur part à vouloir être vus et regardés, une structure qui
vient justifier le projet et donne le sentiment aux photographiés d'intégrer un
projet
...dans tous les cas, une communication est indispensable, qu'elle passe
seulement par la présence de l'appareil-photo, ou par de longues conversations.
Il semble savoir s'approcher très près pour pouvoir ensuite reculer pour
composer, de manière instinctive ou non, la photographie telle qu'elle reflète
pour le photographe la personne, ou du moins le trait qu'il a envie de
souligner. Le désir des gens de se voir tels qu'ils le souhaiteraient doit être
mis de côté pour aller au-delà du portrait flatteur et calculé. Ces scènes du
quotidien, au-delà du simple portrait, donnnent des photos d'autant plus
saisissantes qu'elles sont sincères. C'est faire passer 'l'habiter' du fond
vers la forme.