Un aperçu de mon travail à cette adresse: www.dorianne-wotton.book.fr
Après avoir pratiqué, depuis l'enfance, divers modes d'expression, c'est en autodidacte et par hasard que j'ai abordé la photographie en 2007.
En proie depuis toujours à un flagrant délire de contradictions, je n'ai toujours eu de cesse de capter mes hallucinations; m'abandonner devant l'objet que je contemple, m'enivrer d'innombrables associations d'idées, conduire mon imagination dans l'incertain et l'indéterminé de sa fantaisie.
Animée par une forme de colère, une sordide détresse ironique, j'ai toujours cherché à exprimer dans mes créations une douce déception, voire un élégant malaise quant à la réalité extérieure. Le recours à différentes fioritures pour rendre ma réalité plus acceptable à des yeux trop vite heurtés est un mal parfois nécessaire... A cet égard, la photographie s'est avérée être un puissant vecteur me permettant de transcrire ces images mentales que je ne savais exprimer, de matérialiser mes visions. Elle est aussi un travail introspectif pour gérer mes démons, mes névroses; contenir mon instabilité, réprimer mes passions. Aimant la solitude inhérente à la prise de vue, la capture de l'image est rapidement devenue une grande joie physique et intellectuelle.
La photo fait rêver, elle travaille notre rêverie et notre inconscient, elle habite notre imagination et notre imaginaire. Elle nous fait basculer dans un autre espace et un autre temps. Avec la photographie, je ne raisonne pas, je rêve. Un renoncement triste et tendre; une languissante agonie. Un idéal complexe. Fouillant au fond de moi, j'essaie tant bien que mal de donner une forme à ces aspirations vagues, ces tristesses sans cause, ces émotions sans objet. Dans une société où l'immédiateté prime, j'ai choisi de figer le temps.
Mon approche photographique est principalement consacrée à la représentation de l'esthétique de la désolation. Il s'agit de montrer le monde tel que je le ressens, souligner l'obscur, le mystérieux... Pointer ce qu'on comprend de misère, de faiblesse, de banalité, de laid... Attirer le regard sur ce qui fait sens, sur ces multitudes de petites choses sur lesquelles les regards ne s'attardent pas car elles ne rentrent pas dans les codes esthétiques ou moraux. Intéresser et montrer ce que le monde peut avoir de noirceur, de douloureux, etc. Reconnaître que tout est habité par le chimérique, le fictif, l'imaginaire, l'irréel, bref le romanesque.
Tout devient alors potentiellement objet et sujet de mes créations, pourvu qu'ils répondent à cette démarche artistique. C'est ainsi que chaque série est une nouvelle mission, une errance, une recherche en faveur de ces images qui visent avant tout à mettre en scène l'esthétique de la désolation. Cette démarche se caractérise alors visuellement, quelque soit le sujet, par des ruptures, des discontinuités et une poïétique du décalage, du métissage et de l'amalgame.
Loin des ritournelles prétentieusement sophistiquées, loin des codes techniques et esthétiques, tout est affaire de sensations. Je ne me limite donc pas par un format photographique ou des tabous. Grain, flou, textures, surimpression, déformation, accidents. Je fais rendre tout ce qu'il peut à ce procédé.
Le moyen? L'exode mental, quelque soit sa forme et où qu'il me mène... L'exploration et la sublimation des affects les plus extrêmes...L'exaltation devant l'esthétique de la désolation que le monde et mes contemporains m'offrent quotidiennement... La confusion des genres, des valeurs et des dogmes... L'illusion de me fondre dans un autre monde, enveloppée par mes doux et oppressants compagnons narcotiques...
Le résultat? Un long et insipide prosélytisme, des anachronismes irritants, une somme d'abjections et d'arrogances devant la faune grouillante, insipide et grégaire, une hébéphrénie frivole, une fiévreuse instabilité, un caractère imperturbable, une litanie affligeante et affligée. Un oxymore incarné. Le tout et son contraire. Noir sur blanc.
Ainsi, ne reculant devant aucun dégoût, et sans sacrifier au snobisme de la « Culture » (les détails de la vie sont tellement plus enivrants!), je photographie.. Du moins, j'essaie. Reflets furtifs, échos troublés de ma conscience; miroirs déformés de la dureté, de la cruauté et de la violence impitoyable du réel; colères, songeries et paradoxes... Espérant secrètement que d'Autres partageront cette quête de (non) sens et cette apologie de la désolation.