
Edition internationale 2008-2009
263 pages 30,5 x 21,5 - couverture cartonnée
Editions Patou, 2009 (1)
Avant-propos de Eric Patou, préface de Francis Parent
56 €. Diffusion ; FNAC, RMN, librairies spécialisées ( La Hune, etc.)
On le sait, Histoire de l’art et Histoire du nu forment un couple inséparable et de nombreux livres ont essayé d’analyser - sinon de comprendre- en quoi, historiquement, esthétiquement, religieusement, moralement (etc.), ces liens étaient inséparables. Ce « Nude Art Today », magnifique ouvrage d’art qui vient de sortir, n’est pas de cette nature, même si, pour en restituer la problématique, son auteur, le Critique Francis Parent, remet ces pratiques d’aujourd’hui dans une perspective historique. Car si tous les artistes ont pratiqué de tous temps au cours de leurs études, le nu ( le « nu dans l’art »), il aura fallu attendre la Modernité pour que cette thématique (« l’art du nu ») soit perçue comme n’importe quelle autre problématique et qu’ainsi, un artiste peintre, photographe, sculpteur, etc.. puisse bâtir toute sa carrière sur ce seul aspect.
Ce livre est donc plutôt un répertoire des artistes contemporains qui travaillent exclusivement ( ou essentiellement) sur cette thématique et ce, dans toutes les modalités de la création actuelle.
En peinture, cela parle, par exemple, de la richesse des matières et de la touche chez Tania Aubelle ou chez Kathy Burke, et pour la sculpture, de la froideur des pierres tombales photographiées en noir et blanc par André Chabot. S’y décèlent ainsi la pluralité des sentiments qui traversent la vie ; avec différentes formes d’humour, comme celle présente dans les œuvres peintes de Myriam Feuilloley ou de Caroline Maurel ou bien encore, dans celles sculptées d’Isis Bi ou assemblées de Philippe Pluchard. Avec aussi différentes formes du tragique comme celle qui, par exemple, traverse la peinture d’un Jean-Jacques Bailly face à l’aporie de la condition humaine.
S’y repèrent aussi des échelonnements qui vont de l’art le plus naïf et populaire avec, par exemple, Richard Boigeol, Marie Pierre Valat ou Joël Crespin, jusqu’à celui plus « cultivé » d’un Jean Pierre Brigaudiot ou d’un Anton Solomoukha qui mélange dans ses photos aux mises en scène extravagantes, réalités, fantasmes d’aujourd’hui et diverses esthétiques historicisées. De même pour la Figuration (inhérente, bien sûr, à cette thématique du nu…) qui peut aller du moins « réaliste », comme chez l’expressionniste Claudine Ducarroir, à l’hyperréalisme le plus total comme chez Richard Harper.
La photo est donc bien présente dans ce livre avec ses diverses tendances. Celle plutôt « hard » sur la forme et parfois même provocatrice sur le fond de Sylvia Angelova ou encore celles cruellement ambigües de Catherine James ou de Anne Pascale Richard. On y trouve aussi des formes plus classiques comme celles, tout en douceur, de Jean Turco ou, au contraire, tout en contraste, comme chez Daniel Nguyen avec ses lumières qui sculptent à l’infini toutes les courbures du corps.
On y voit le peintre Franta qui depuis toujours travaille le tragique de la condition humaine tout comme l’aura fait Zlatko Glamoçak, mais lui en sculpture, ce qui rendra ses faciès encore plus monstrueux. Dans cet esprit d’humanité sur laquelle pèse toute la détresse du monde, il est à noter la présence dans ce livre de Jean Rustin, qui est l’un des rares artistes à avoir, de son vivant, une fondation à Paris (2). Dans le même esprit, il faut noter celle de Mylela Palakarkina qui, après avoir réalisé des collaborations avec Jean Tinguely, travaille sur des accumulations d’êtres humains semblant résignés face à la dramaturgie de leur quotidien. A remarquer aussi la présence de Ben Ami Koller avec ses dessins pleins d’une sourde souffrance, cet excellent artiste venant, hélas, juste de nous quitter. Celle de Jérôme Mesnager qui fut le pionnier du « Tag’ Art » ; celle de Abraham Hadad avec la puissante matière picturale de ses nus qui se fond dans l’impuissance de la matérialité quotidienne. A noter que ce livre s’ouvre aussi aux nouvelles technologies puisqu’on y trouve, par exemple, les « digigraphies » d’ Hugues Dobbs ou celles de Jacques Hironimus qui enjoignent sexe et esthétique relationnelle.
On ne peut évidemment pas citer les 124 artistes présents dans cet ouvrage, mais on l’aura compris : par delà sa luxueuse apparence ( avec 2 pages par artiste : à droite une image en plein papier, à gauche, 3 images plus petites avec texte en anglais et en français), cet ouvrage est incontournable pour tout amateur qui entend comprendre l’éventail de la création actuelle à travers l’une de ses expressions essentielle ; celle du nu aujourd’hui.
(1) Eric Patou, IMD, 14 bis Bd Voltaire 92130, Issy les Moulineaux- tel ; 01 58 88 32 31
(2) Fondation Rustin, Impasse Berthaud, 75003 Paris