Galerie Stella & Vega 6, rue monseigneur Graveran F-29200 Brest France
Benjamin Deroche a grandi sans douter de l’omniprésence de l’image dans notre monde, mais s’il est difficile d’en mesurer l’impact et l’influence sur notre société considérée évoluée et moderne, produisant donc à profusion ses propres représentations, elles lui ont permis de forger très tôt et de manière instinctive son
regard de photographe.
Inside / Outside, présente deux aspects de son travail, à travers des univers antagoniques mais complémentaires, grâce auxquels il propose une reconstruction de nos archétypes, par un déplacement du sujet dans l’image. Parfois cynique ou encore provoquant, mais souvent aussi emprunt de désinvolture, alors qu’en studio, il s’amuse à pousser la maîtrise de la mise en scène à son paroxysme, à l’inverse, il s’autorise à travers ses paysages, urbains ou non, la respiration du mouvement, ample et profondément humain.
Par son processus de création, Benjamin Deroche s’inscrit dans le temps comme pour le braver ou à minima, tenter de le figer, dans le but avoué de maîtriser les sensations.
Bouleversant nos codes pré-établis, les scènes qu’il imagine, construit, élabore, réalise puis photographie, représentent chacune un sentiment en suspens. Ainsi, détaché de toute idée matérialiste, il perturbe notre mémoire des objets, les en détournant sciemment afin de parvenir à faire naître chez l’observateur un sentiment authentique et avéré à travers une image artificielle.
Il nous confronte à des poupées prenant la pose, cherchant à nous toucher de leur regard vierge et innocent, mais animés et expressifs, ou subversivement, jouant aux adultes dans de tendres ébats. À l’inverse, n’ayant pas peur de forcer cette émotion, il peut alors utiliser le corps vivant mais inanimé, nu, niant toute pudeur, obéissance ou politesse que lui conférerait le vêtement, comme un simple vecteur de nos émotions…
Ou finalement le remplacer par des poulets, pas vraiment objets, mais plutôt ex-vivants, en les substituant aux modèles utilisés par Araki au cours de séances de bondage.
À travers les paysages de Benjamin Deroche, c’est moins l’émotion que la sensation quasi physique de temporalité qui surgit, arrêtée ou en mouvement. Dans ce dispositif inverse, il devient cette fois dépendant de l’élément extérieur, recherchant à construire un sentiment par le biais de l’image naturelle. Ainsi le travail de Benjamin Deroche, tel une mise en abîme, nous fait prendre conscience de notre état de mortels à travers cette illustration du temps, lui-même image mobile de l’éternité.