“La place la plus sûre de mes oeuvres est dans la mémoire” Peintre de formation, Nikolay Pollisky intervient dans le paysage avec d’étranges constructions. Son travail est du Land Art reconstruisant des formes architecturales classiques, écologiques. Ephémères, provisoires, ses installations sont destinées à disparaître. “J’ai compris que la peinture ne m’apportait plus ce que je recherchais. En dessinant et en peignant cet espace, j’ai su qu’il me fallait travailler de façon concrète dans ce lieu bien réel, que c’était là mon atelier, mon laboratoire. Il me semble que l¹art contemporain est trop éloigné du spectacle de la nature, qu’il est trop élitiste. Il s’est enlisé dans des questionnements typiquement urbains.”
En Russie Nikolay Polissky s’est installé à la campagne, fait inhabituel pour un artiste dans un pays où tout est centré sur la capitale. Ses installations font l¹événement dans un monde rural exclu de la vie culturelle. Dans la Russie qui se souvient de l¹époque communiste, on aime et on estime l¹artiste qui a toujours refusé de travailler pour l¹État afi n de rester fi dèle à ses convictions artistiques. Polissky se considère comme faisant partie de l¹univers collectif dans lequel il crée ses oeuvres, et non comme un prudent observateur extérieur.
Dans ses sculptures monumentales, il crée des symboles spirituels et ironiques de la Russie traditionnelle, pays magnifi que, pays statique, gauche et monumental. Il construit une oeuvre d’art à partir d¹un matériau naturel issu du terroir où il s’installe. Pour lui il est très enrichissant de communiquer avec ceux - issus du même terroir - qui l’ont aidé à bâtir.
C’est en 2000 que tout a commencé… avec de la neige: plus d’une centaine de bonhommes de neige investissent les champs du parc national Ougra.
C’était un projet de Nikolay Polissky et Konstantin Batynkov avec les habitants du village. L’artiste les considère d’ailleurs comme les co-auteurs de ses oeuvres et leurs noms apparaissent toujours dans les catalogues d’expositions par ordre alphabétique.
Une fois la neige fondue, c’est l’herbe qui a poussé. C’est alors qu’une tour gigantesque en foin a été construite. Puis une tour en bois. Plus tard c’est la tour média..
Polissky, lui-même, ne considère pas ses oeuvres comme des constructions architecturales, mais plutôt comme des sculptures libres. Quand il fait des croquis, il ne connaît pas à l’avance le résultat. Et c’est ce qui lui plaît ; créer quelque chose, en utilisant des techniques traditionnelles, profi ter du potentiel du matériau. Il ne fait jamais de modèle précis et n’a pas de budget limité. L’artiste considère son projet, avant tout, comme une expérience sociale. Ce qui est important dans son travail, ce ne sont pas tant les constructions ellesmêmes, mais plutôt le fait qu’elles aient été réalisées en collaboration avec les habitants du village. L’artiste apprécie justement ces formes collectives de pratiques artistiques. Il présente son oeuvre comme une utopie sociale. Selon lui, sa mission consiste à élaborer une communauté artistique, dans laquelle le travail quotidien serait perçu comme une oeuvre d’art.