
Dans 15 août, Olivier Nord propose un ensemble de vingt-cinq photographies en couleur prises spontanément sur la plage d’Ampolla (Espagne) les 14, 15 et 16 août 2007. Le frétillement des cercles acidulés jaune citron, vert tendre, bleu turquoise, la fulgurance de la lumière, déterminent un flot vivant qui répond implicitement à celui de la mer, absent. Les formes et les couleurs sont divisées comme si l’image parcellaire existait en fonction de l’impression générale qui s’en dégage.
La tragédie est associée au burlesque…tragique de l’enfance perdue et comique de sa mise en scène : à l’image du château de sable, Olivier Nord confronte celle de la conversation, des intrigues, y associant les affects d’une société toute entière, où l’adulte joue à être adulte, où même en vacances, au-delà des apparences détendues, tout est maîtrisé. Par ailleurs, la poésie très libre des formes et des couleurs n’exclut pas les sommations de la réalité la plus pressante : si la retouche est possible en photographie, celles de 15 août sont gardées à l’état brut, sans complaisance pour les physiques ravagés par le temps et les excès. Les publicités ont envahi les arrière-plans et derrière la tentation du communautarisme, les trustes ont colonisé l’espace, standardisé, comme en écho aux résidences jalonnant les abords de nos villes.
Contre la normalisation des espaces et des instants de vie, il propose la joie d’une mosaïque construite de façon éminemment intuitive.
Damien Chantrenne (historien de l’art).
DÉCOUVERTE / PRISE DE POSSESSION
Depuis trois ans, Olivier Nord développe un projet photographique témoignant de l’urbanisation de la campagne française, une étude sur la présence humaine dans un paysage récemment métamorphosé. Il s’agit d’une topographie de lieux, d’espaces naturels ou urbains du territoire colonisé par un style de vie qui s’impose socialement et nous transforme individuellement. Une envie irrépressible de conformisme et de banalité. En regardant ces scènes de très loin, tout semble dérisoire. L’alignement des maisons construites sur un même modèle, à peu de distance les unes des autres, sur des terrains qui furent hier encore des champs, possède un surplus de réel. En parcourant les photographies d’Olivier Nord, nous apprécions sa maîtrise de la couleur et de la lumière, de la composition et du goût pour les détails mais aussi son besoin de documenter un changement d’usage du paysage : il n’hésite pas à installer sa chambre photographique en haute montagne ou en bord de mer dans des lieux précaires où la pression urbaine repousse encore plus loin notre besoin inhérent de nature (une nature belle mais domptée) et de liberté. Pourtant, le silence et la quiétude qui les habitent contribuent à créer une atmosphère de douceur, où la vie, figée un instant, devient image-témoin de notre civilisation.