Si toute l'oeuvre d'Anna Malagrida (1970) est une réflexion sur les limites de la photographie, elle l'est aussi sur le monde contemporain et notre relation à lui. « Vues voilées » est une exposition qui questionne les limites du visible et inscrit l'acte du regard comme une expérience esthétique et politique.
En 2006 Anna Malagrida réalise une série de vues de la ville d'Amman depuis les grandes fenêtres de quelques hôtels de luxe qui dominent la capitale jordanienne. Ce point de vue offrant une vision distancée et privilégiée de la ville incarne un symbole du pouvoir. Cependant, un petit accident est survenu : les rayons x des machines de sécurité situées dans les différents accès aux hôtels ont provoqué le voile partiel des négatifs par une surexposition à la lumière. La précision du détail photographique est effacée. Cette disparition accidentelle de l'image fragilise alors la notion de pouvoir. Amman, la ville blanche, est éblouie et surgit comme un mirage dans le désert. L'excès de lumière, le voile, la transparence, symbolisent dans cette série la limite de la vision et insistent sur l'éphémère de l'être et la fragilité du monde.
"Danse de femme" est une vidéo installation qui veut explorer l'illusion d'un espace intermédiaire. Il s'agit d'une vue d'intérieur d'un petit refuge situé dans le désert de Jordanie : une fenêtre est couverte par un voile noir et devient comme un obturateur photographique qui filtre la lumière tout en évoquant la condition de la femme dans le désert. Dans un espace située entre l'extérieur et l'intérieur, l'ombre et la lumière, cette dualité prend forme dans une sorte de danse à la fois délicate et fragile.