MAC/VAL Place de la Libération Boite postale 147 94404 Vitry-sur-Seine France
Nathalie Talec pour sa première exposition rétrospective au MAC/VAL, du 10 octobre au 25 janvier 2009, déploie dans l’espace du musée un protocole d’exposition qui fait oeuvre.
Artiste iconoclaste, tour à tour exploratrice, performeuse, expérimentatrice scientifique, chanteuse, peintre… Nathalie Talec développe depuis près de trente ans un “art sentimental”.
Puisant dans le registre des émotions, elle revendique sa volonté de vouloir ré-enchanter notre quotidien. Son travail interroge le statut de l’humain, en déplaçant les affects pour les réattribuer à des objets, des mots, des personnages héroïques, comme autant de scénarios brouillant les frontières entre la science et la fiction.
L’artiste s’approprie ainsi le musée d’art contemporain du Val-de-Marne pour en faire un nouveau terrain d’expériences, à travers, notamment, une programmation de performances.
C’est en regard de la présentation de la collection sous la thématique “Je reviendrai”, centrée sur le voyage, que s’est naturellement construit le projet d’exposition monographique consacré à Nathalie Talec, véritable incarnation de la figure de l’explorateur-aventurier.
Depuis le milieu des années quatre-vingt, celle-ci crée en effet une oeuvre singulière dans laquelle se mêlent une constante autobiographique, sa présence d’artiste femme, sa fascination pour les grandes expéditions fondatrices ainsi que son rapport poétisé à la science. L’expérimentation devient un outil de compréhension du monde, un mode d’acquisition des savoirs.
Mêlant fiction et réalité, son travail se construit aux frontières de la science et des récits - afin qu’elle puisse mieux s’emparer de l’espace d’incertitude qui hante l’imaginaire. Nathalie Talec investit l’univers domestique, ainsi les expériences se font en cuisine. Les vérifications sont alors autant scientifiques qu’existentielles.
Se plaçant au centre, l’artiste tente de se dépasser et propose de ré-enchanter notre quotidien en lui insufflant une grande poésie.
Alexia Fabre
Conservateur en chef
Tout l’art de Nathalie Talec brosse un portrait de l’artiste en explorateur, un autoportrait avec ou sans microphone de tempête, avec ou sans paire de lunettes pour évaluation des distances en terres froides. L’exploration des régions polaires (découverte, arpentage, cartographie et système de survie en conditions extrêmes) comme métaphore de l’art ou la quête de l’absolu et de l’élémentaire.
De ses premières expéditions (fantasmées puis réelles) dans le Grand Nord, aux explorations des systèmes de représentations du monde (de la Science à la Chanson en passant par le Sitcom), Nathalie Talec s’intéresse à des états intermédiaires, des entre-deux, des zones incertaines. Ce qu’elle met véritablement à l’épreuve par accumulations et conglomérats de sources diverses (histoires scientifiques, de l’art, personnelles…) ce sont les mises en fiction du réel. Avec pour personnage central depuis les premières oeuvres (1979), la figure de l’artiste. Le froid, ses modes d’apparitions (la glace, la neige, les flocons…) et ses histoires et mythologies, mais aussi la vapeur d’eau, la condensation sont pour Nathalie Talec depuis une trentaine d’année un outil de situation dans le monde, d’analyse et de localisation.
De réflexion métaphysique.
Paradoxes : le froid est un état à la puissante richesse imaginaire et symbolique mais également met à distance, éloigne, arrête, fige.
Le recours constant au feint, au factice, à l’artifice, au simulacre, au play-back participe de ce double mouvement d’immersion et de retrait.
Le froid m’a longtemps préoccupée, en qualité d’intrigue / Récits d’explorateurs polaires, contes enfantins… Il devenait sujet et dictait l’ordre des fictions. Le froid est un état d’abstraction : la neige en est une de ses manifestations, légère et molle par opposition au givre ou au gel. Le froid n’est pas une métaphore de la mort (comme chez Dante), ou de l’enfer, il est un état de fixité, qui arrête le temps, et donne une durée à l’objet. C’est un état de pause – comme la pause vidéo. C’est un état de sensation : il se mesure aux frissons ou à la gelure.
C’est un état de dualité : il brûle quand il est trop fort (sous la glace, le feu). C’est un état d’absorption : il absorbe les sons, les odeurs, les formes. Et c’est aussi un état des choses, qui se mesure à l’aide du mercure du thermomètre…*
Cette première rétrospective de l’artiste française née en 1960 retracera une aventure artistique de 30 ans de création. Non chronologique, non exhaustif, ce parcours rassemblera une trentaine d’oeuvres (dessins, photographies, sculptures, performances, projets…) comme autant de marqueurs fictionnels, d’embrayeurs narratifs, d’amorces et de leurres. OEuvres historiques, réactualisations, nouvelles productions seront réunies dans un dispositif inédit, un décor qui fait oeuvre, empruntant à certains codes cinématographiques et à l’imagerie industrielle.
Frank Lamy
Chargé des expositions temporaires