Dans les ruelles du Caire, quelques bains publics maintiennent encore leur activité, témoins silencieux de l'abandon des fonctions sociales du hammam et de la dégradation d'un patrimoine vieux de onze siècles, hélas oublié des campagnes de restauration. Difficile pour les quelques bains encore ouverts de résister aux pressions immobilières et administratives dans une société égyptienne qui s'est modernisée et où le rapport au corps a changé. Les photographies de Pascal Meunier, résultat d'un long et patient travail d'observation, nous plongent dans des univers fascinants, d'une beauté parfois inquiétante, où le dépouillement de l'architecture côtoie le faste oriental du décor populaire. Dans l'intimité des maslakhs, les salles de réception, ou sur les dalles de marbre des salles chaudes, apparaît un monde où le corps et l'esprit se libèrent, où " l'on redevient humain, simplement, idéalement, poétiquement humain " selon les mots de l'écrivaine égyptienne May Telmissany. A partir de son expérience sensible, elle analyse ici les fonctions du hammam et ses représentations dans la mémoire individuelle et collective. En écho, à travers une série de portraits, Eve Gandossi porte un regard généreux et documenté sur celles et ceux qui tentent de conserver une âme à ces lieux qui disparaissent.