Maison de la Chine 76, rue Bonaparte Place Saint Sulpice 75006 Paris France
Joseph Skarbek, d’origine polonaise, naît le 21 novembre 1879 en Dordogne, où son père travaille au bureau d’étude de la ligne de chemin de fer de Périgueux à Ribérac. Quand il perd père à sept ans, son éducation est prise en main par ses deux oncles qui l’orientent vers le métier de cheminot tout en lui transmettant leur passion pour la photographie. Il se spécialise alors dans la construction de voies ferrées et devient ingénieur.
En 1906, il a 26 ans quand la Société française des Ingénieurs coloniaux lui propose de partir trois ans en Chine centrale dans la province du Henan, entre 1906 et 1909. Mis à la disposition de la Compagnie Impériale des Chemins de Fer Chinois, il participe à la construction de la ligne Kaifeng-Luoyang. Les travaux qu’il conduit permettent de mettre au jour quelques sites archéologiques de l’antique civilisation chinoise dont le Henan est le berceau. Le chemin de fer reliant Luoyang, plusieurs fois capitale impériale, et Kaifeng, carrefour commercial foisonnant depuis la fin de la dynastie des Tang au Xe siècle suit une route qui emprunte la vallée du Fleuve jaune, région la plus anciennement peuplée de Chine. La ville de Zhengzhou, située à peu près à mi-chemin entre Luoyang et Kaifeng et dont l’origine remonte au moins au IIe millénaire avant notre ère, est aujourd’hui la gare de jonction entre les deux principales voies ferrées qui coupent la Chine d’est en ouest et du nord au sud.
Le segment de chemin de fer construit par Joseph Skarbek et ses collègues se trouve aujourd’hui au cœur du réseau ferroviaire chinois. Ces ingénieurs ont non seulement permis l’industrialisation de la vallée du Fleuve jaune mais également la découverte des vestiges des longues époques entre les Shang et les Song.
Joseph Skarbek se passionne d’emblée pour cette région de Chine alors méconnue et pour sa culture. Il rapporte une riche documentation photographique, dont les photos exposées ici sont une sélection. Toutes ont été prises avec son appareil dit « jumelle » de type Mackenstein à chambre fixe et obturateur à rideau pour plaques de verre (format 9 sur 12 centimètres, recouvertes d’une émulsion de gélatino-bromure d’argent).
Au-delà de leur qualité artistique, ces clichés sont certainement les premiers témoignages modernes sur cette région visitée alors uniquement par de rares expéditions archéologiques : celles d’Edouard de Chavannes en 1902 et 1907 et du capitaine Henri d’Ollone en 1908. Joseph Skarbek va figer les dernières heures de l’empire chinois et les moments de vie de gens ordinaires suivant le rythme des saisons : costumes de fête pour la Nouvelle Année, scènes d’enterrement, théâtre villageois, fileuses de coton, égrenage du millet, marchands de tofu, perruquiers de rue ou restaurants ambulants.
Les 66 photographies exposées sont des agrandissements prêtés par la Bibliothèque Polonaise de Paris et réalisés à partir de la numérisation effectuée par l’Ecole Française d’Extrême Orient qui détient désormais les droits. Nous remercions ces deux institutions de leur gracieuse contribution.