
Galerie Délicatesse N 5, rue du général Guilhem 75011 Paris France
Un petit goût de brûlé dans l'air, une rivière de pierres qui a fait son lit au milieu des arbres, sans les toucher, les laissant intacts.
Je guette, comme si chaque branche agitée par le vent m'annonçait le passage de quelqu'un...car j'aime voir sans être vue.
Il y a quelque chose d'aveuglant, la chaleur m'accable, et c'est un privilège d'être seule ici.
Puis des éclats d'écorce découverts. Cet endroit m'attendait, qui a jonché son sols de signes épars, de restes et de vestiges d'un festin devenu minéral; méandres, branches torturées ou cassées net, concrétions mises à sac par la foudre?
Quelque chose d'antique et de primitif s'est passé ici.
Maintenant, c'est un refuge au soleil, caché au milieu des brindilles, un refuge pour les lézards où le temps s'est arrêté; chaleur et sècheresse baignent dans une musique lancinante. C'est agréable et angoissant au point qu'on s'y perdrait. La sècheresse fissure et lézarde tout sur son passage. Elle fait éclater et révèle au grand jour les miettes et les morceaux, l'intérieur des organismes. Elle fait plier sous son poids, elle oblige à des contorsions, à des détours. Une odeur de cailloux et de poudre.
L'écorce préserve ça et là une esquisse de feuillage, dont la délicatesse et la force méritent qu'on s'y attarde; est-elle arrivée ici par hasard?
Ici, on se cogne à une certaine brutalité. On cherche les traces humaines absorbées par le trop-plein de lumière.
Mais lorsque j'ouvre à nouveau les yeux, je fixe juste au-dessus de ma tête un feuillage qui se balance à un ryhtme irrégulier; c'est la première chose que je vois à mon réveil. Le reste peut attendre.
Candice Corbeel