Expositions du 29/11/2007 au 20/01/2008 Terminé
Maison de la culture Côte-des-neiges 5290 chemin côte-des-neiges Montréal
Décomposer pour recomposer autrement. Faire en sorte que ce soit la même chose mais tout autre chose en même temps. Transposer, transfigurer.
Ce que je souhaite par ce travail de déconstruction de l'image puis de reconstruction d'une autre figure – à partir de fragments recomposés –, c'est parvenir à saisir le mouvement. C'est faire en sorte que ce qui est fluide, passager, transitoire, se cristallise soudain en une forme. Mes photos veulent donner à voir l'unité, fixée de mouvements multiples. Par conséquent, ces unités cristallisées doivent continuer de bouger sous le regard du spectateur. Elles bougent sans bouger. Elles fixent sans fixer. Elles s'établissent dans ces paradoxes.
Tout ceci nous parle à la fois de fragmentations et de totalités; de mouvements et de fixité; d'indéterminations et de contraintes. Par-delà ces jeux sur ce qui bouge ou ne bouge pas, c'est l'ensemble des perspectives concernant un certain lieu, un paysage, un objet, un visage, un corps que je voudrais mettre en question par mon travail. Je voudrais faire en sorte qu'on ne sache plus trop bien, face à une image, ce qui est horizontal ou vertical, si cette verticale défie ou non les lois de la gravité, si le haut est au-dessous du bas, si ces agglomérations d'éléments disparates sont possibles ou impossibles.
J'aimerais que s'établisse ainsi une sorte de vertige tranquille dans certaines images, et que dans d'autres l'effet soit plus brutal; qu'on ait l'impression qu'une main de sculpteur s'est mise à malaxer, à tordre, à distordre la réalité. Qu'on ne distingue plus alors le vrai du faux, qu'on ne sache plus ce qui est plein et ce qui est creux, ce qui est dedans ou ce qui est dehors. Ce serait donc comme si la matière “civilisée”, travaillée, agencée par l'homme, revenait à sa brutalité première, à sa primitivité, à sa primordialité.
À travers toutes ces recherches et ces manipulations sur la forme et le mouvement, sur le temps et l'espace, je voudrais chaque fois donner à voir des climats, des tonalités de lieux, de durées.
Il est question de temps ici encore, mais au sens du temps qu'il fait. Est-ce un temps d'angoisse ici? De rêve là? De nostalgie ou de mélancolie? Est-il possible d'opérer tous ces bouleversements plastiques en débouchant cependant sur une certaine beauté? Cette question fait également partie de ma recherche. J'aimerais qu'en définitive l'image obtenue fasse plaisir à voir, qu'elle ne rebute pas mais attire au contraire, qu'elle transporte, qu'elle fasse dériver. Ce serait alors comme si l'on se trouvait dans la beauté d'un monde autre. N'est-ce pas ainsi que les paysages de nos rêves se présentent? Cela est possible, croyons-nous, mais en même temps ne l'est pas. Ceci est là, présent, mais pourrait disparaître. Ceci nous fuit, reste insaisissable, mais nous étreint, nous saisit...
Ce travail photographique a été amorcé il y a deux ans.
Je prends une série de clichés d'un lieu, comme si j'avais scanné cet espace, pour ensuite le reconstituer sur l'écran de mon ordinateur en agençant tous ces fragments de façon arbitraire, aléatoire, par une série de collages, coupages, transparences, répétition d'images, distorsions, superposition de multiples surfaces.
De fait, il ne s'agit plus de photographie au sens propre du terme mais de manipulation d'images. Cette démarche m'intéresse car elle donne à voir la photographie d'une toute autre façon. Il ne s'agit plus de saisir un instant mais plusieurs et de les réunir dans un même cadre. La photographie devient un instantané de séquences... En cela, elle s'apparente au cinéma. Elle est une réalité improbable. Elle se moque d'être fidèle au réel. Elle nous suggère que le doute est peut-être un état essentiel dans le regard qu'on porte sur la réalité. Elle est une variation, une extrapolation, un point de vue imaginaire... une idée, vague et réelle à la fois, de la vie.
Tout est vrai et faux simultanément, mensonge et vérité, simulacre, tromperie qui se veut vérité.
Maison de la culture Côte-des-neiges 5290 chemin côte-des-neiges Montréal