Expositions du 06/07/2007 au 30/09/2007 Terminé
Galerie des Hospices 2, rue Félix Eboué - 87 000 Limoges Du mardi au dimanche inclus (fermée le lundi) de 10h à 19h
Du 6 juillet au 30 septembre 2007, à la Galerie des Hospices, la Ville de Limoges rend hommage au grand photographe Izis (Israëlis Bidermanas /1911-1980), au travers de l'exposition « Izis, photographe de l'instant », présentant plus d'une centaine de photographies, dont 70% d'inédites.
Cette exposition est réalisée aujourd'hui à Limoges en souvenir de la période durant laquelle Izis, de 1941 à 1944, sous l'occupation allemande, s'est réfugié à Ambazac (87). Ensuite, il s'est retrouvé aux côtés des FFI et a participé à la Libération de Limoges. Une de ses premières expositions, « Ceux de Grandmont vus par les soldats des FFI », composée de photographies de résistants limousins, a notamment contribué à sa célébrité. La plupart de ces photographies de résistants ont déjà été exposées à la Bibliothèque francophone multimédia de Limoges en août 2004 lors d'une rétrospective intitulée « Visages de la Résistance- Hommes et femmes de l'armée des ombres /Haute-Vienne 1940/1944 ». Elles ont constitué l'élément déclencheur d'une grande carrière de photographe dès son retour à Paris en 1945.
Pour la première fois, la présentation de photographies d'Izis, pour la plupart en noir et blanc, offre aux visiteurs une approche transversale de son œuvre, au travers de neuf grandes thématiques reprenant les sujets qui lui étaient chers : de l'enfance à la ville de Paris, des dormeurs anonymes aux personnalités.
La mise en espace et le choix des photographies, grâce au commissaire de l'exposition qui n'est autre que Manuel Bidermanas, le fils d'Izis, ont permis la réalisation d'un parcours non chronologique mais particulièrement émouvant donnant à voir la modernité, la personnalité et l'humanisme de cet artiste incomparable.
Ainsi, pour compléter le portrait de cet homme, tout à la fois photographe, reporter et poète, des textes, des livres, des anciens numéros de Paris-Match, journal auquel il a collaboré pendant vingt ans, mais aussi des correspondances retraçant ses relations avec des célébrités amies (Prévert, Colette, Chagall, Clancier, etc.) jalonnent et rythment l'exposition. Enfin, un film réalisé par l'équipe de la télévision locale « 7 à Limoges » rappelle avec sensibilité la vie de ce personnage atypique grâce à des images d'archives et à des témoignages.
Pour mettre en valeur l'ensemble de ces clichés, la scénographie, signée Jean-Michel Ponty, reste volontairement sobre avec des panneaux traités avec différentes nuances de gris rehaussés d'un fil conducteur rouge vif révélant ainsi la continuité et la permanence dans l'art de ce photographe inclassable.
Israël Biderman est né à Marijampole en Lituanie le 17 janvier 1911 dans une famille juive pauvre. Son père Uriel est propriétaire d'une petite échoppe de porcelaine. En 1918, après l'indépendance de la Lituanie, il change de nom et devient Israëlis Bidermanas.
Alors qu'il n'a que treize ans, en 1924, son père lui propose de devenir menuisier, mais l'adolescent préfère quitter l'école pour devenir l'apprenti d'un des quatre photographes de son village. Passionné par la peinture, c'est finalement la retouche des tirages, et l'art du portrait qu'il apprend de 1927 à 1930. Il passe ensuite une année à parcourir la campagne et les villes lituaniennes pour prendre des photographies de la vie familiale de ses compatriotes au côté d'un ami.
Pour fuir la guerre, à dix neuf ans, il prend la décision courageuse de partir pour Paris. C'est sans argent, et sans papiers, qu'il arrive dans la ville des lumières en 1931 pour réaliser son rêve. Il ne connaît personne et ne parle pas un mot de français, ses débuts sont donc très durs. Malgré toutes ces difficultés, son avenir va s'éclairer. Il échappe à l'holocauste, ce qui n'est pas le cas de ses parents tués en 1941 et de son frère David tué en 1944 dans le ghetto de Kaunas.
En 1933 après avoir vécu dans la rue, il est embauché chez Arnal, célèbre studio de portrait du Boulevard Rochechouart à Paris. Il exerce également auprès de son beau-père avant son mariage. Il prend ensuite la gérance d'un studio de photographie rue Nationale dans le 13ème art de Paris, où il réalise des photographies de mariages, de communions, et des portraits en tous genres. Il aime cette activité manuelle, mais n'y voit qu'une façon de gagner sa vie. Il consacre ses moments de loisirs à aller voir des expositions de peinture. Anna Rabkine sa première femme, lui donne un fils, Manuel Bidermanas en 1938, qui deviendra lui-même un personnage dans la photographie et dans la presse notamment au journal L'Express et au Point.
Sous l'occupation allemande, en 1941, il est réfugié à Ambazac, où il travaille clandestinement comme retoucheur pour des photographes locaux sous le nom d'Izis, contraction de son nom Israëlis. En Lituanie, son père et sa mère, sa belle sœur et sa petite fille sont assassinés par les Nazis avec toute la population juive de la ville de Marijampole.
En 1944, il est arrêté par les Allemands, à Ambazac. Il tient tête et refuse de dénoncer les villageois, malgré les sévices qui lui sont infligés. Finalement relâché en pleine débâcle allemande, il s'engage dans la Résistance aux côtés des Forces Françaises de l'intérieur (FFI). C'est à ce moment que le cours de sa vie va changer. Avec un vieil appareil à plaque, il demande à faire les portraits des maquisards qui viennent de libérer la ville. Il pense un instant à les faire poser comme il a appris, mais se rend compte que ce serait trahir la réalité. Il leur demande donc de poser avec des chemises sales et mal rasés tel qu'ils les a vus. Ces images font l'objet de quatre expositions intitulées : « Ceux de Grandmont vus par les soldats des FFI », à Limoges. Cet événement lance sa carrière de photographe.
A Paris en 1945, il croise Brassaï, Laure Albin Guillot, et reçoit les encouragements d'Emmanuel Sougez, et commence dès lors à appréhender l'usage de la photographie, avec une vision poétique personnelle. En 1946, il épouse en seconde noce Louise Trailin. Ils ont une fille nommée Lise, née le 14 novembre 1948, qui décède en 1993. Il obtient son césame, avec la naturalisation française, installe son studio photographique rue de Vouillé, et expose à la Galerie La Boêtie, Paris, vu par Izis Bidermanas, une centaine d'images de portraits et de vues de la capitale.
Sollicité par Philippe Boegner, directeur de Paris Match, pour le premier numéro du journal, il collabore dès 1949 et ce pendant vingt ans, à de nombreux reportages sur le monde artistique et culturel pour ce célèbre journal d'actualité. On le surnomme « le spécialiste de l'endroit où il ne se passe rien ». Il se lie d'amitié avec Marc Chagall, rencontre Colette, Albert Camus, Calder, Paul Eluard, Aragon. Il publie son premier livre en 1950, « Paris des rêves », avec une préface de Jean Cocteau, qui devient un succès d'édition, avec 170 000 exemplaires vendus.
Il voyage à Londres en compagnie de Jacques Prévert. C'est dans le quartier populaire de Whitechapel qu'il immortalise un homme en train de faire des bulles de savon, qui deviendra l'une de ses photos célèbres. D'autres livres suivront : « Grand Bal du printemps 1951 », « Charme de Londres 1952 ». Izis rencontre Jacques Prévert en 1951. C'est le début d'une grande amitié et d'une collaboration qui donnera le jour à quatre livres. Invité du Muséum of Modern Art de New York, cette même année, c'est au côté de Henri Cartier-Bresson, Willy Ronis, Robert Doisneau et Brassaï que ces images figurent dans une exposition importante intitulée « five french photographers ». Avec Colette, en 1953, il publie « Paradis terrestre ».
Il voyage en Israël, ce qui donne lieu à l'édition d'un livre du même nom préfacé par André Malraux, avec une couverture de Marc Chagall. Izis est le seul photographe admis par Chagall en 1964 tandis qu'il peint le plafond de l'opéra de Paris, ce qui lui vaudra la publication d'un reportage de 20 pages dans Paris-Match. Fasciné par le monde du cirque et des fêtes foraines, il publie, « Le Cirque d'Izis », préfacé par Jacques Prévert, en 1965. Il quitte son emploi au sein du magazine d'actualité en 1969 et signe « Le Monde de Chagall » aux éditions Gallimard. « Paris des poètes » est son dernier livre sorti en 1977 préfacé par son ami Jacques Prévert. Il est l'invité d'honneur des Rencontres Internationales d'Arles au côté de Lisette Model et William Klein en 1978. Il meurt à Paris le 16 mai 1980. Il est enterré au cimetière de Bagneux.
Ses sujets favoris et multiples
Les réfugiés, la Casbah d'Alger, les pèlerinages de Lourdes et de Fatima, l'inondation des mines de l'Etançon , Monceau les Mines, la foire du Trône, l'abbé Pierre, l'Algérie, Lourdes, Charlie Chaplin, et ses nombreux portraits de stars, tels Orson Welles, Jean Renoir, Marcel Aymé, Paul Léautaud, Colette, Albert Camus, Aragon, Paul Eluard sont quelques uns de ses sujets, avec une préférence pour la ville de Paris, dont les amoureux, les bords de Seine et Montmartre l'inspirent particulièrement.
La création par la peinture, puis plus tard avec sa photographie lui ont sans doute permis de transcender les traumatismes qu'il a endurés au cours de son existence. Moins connu que Brassaï, Henri Cartier-Bresson, Robert Doisneau, Willy Ronis, ou Edouard Boubat, il reste comme un poète, dont l'œuvre mérite d'être redécouverte.
Une biographie d'après les informations de Roland Quilici
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Exposition « Izis, photographe de l'instant » à la galerie de Hospices de Limoges
Les orientations scénographiques
L'exposition « Izis, photographe de l'instant » rassemble une centaine de photographies, la plupart en noir et blanc (sauf certaines liés à Chagall), dont 70% d'inédites.
La scénographie, signée Jean-Michel Ponty, s'est attachée à offrir aux visiteurs un parcours non chronologique, non linéaire, offrant ainsi une lecture transversale de l'œuvre d'Izis et une découverte en toute liberté de l'exposition. La mise en espace des différents clichés insiste sur deux aspects fondamentaux dans l'art de cet artiste : son regard esthétique et moderne et son rapport aux autres, son humanisme.
Les photographies choisies, tirées sur un papier baryté (le meilleur pour le noir et blanc), sont sublimées par la sobriété et la qualité. En effet, Les panneaux supportant les cadres gris métallisés sont traités avec différentes nuances de gris juste rehaussés par un fil conducteur rouge vif montrant la permanence dans l'œuvre de l'auteur. L'ambiance de la salle est donné par un mélange de lumière du jour et d'éclairage ponctuel.
Enfin, pour rythmer la visite, sont également exposés une série en couleur (autour de Chagall), des livres et des correspondances— témoins de ses amitiés (Prévert, Colette, Chagall, etc.)— des anciens numéros du journal Paris-Match, où Izis a collaboré pendant vingt ans, et la projection en boucle d'un film réalisé pour l'occasion.
Un film documentaire sur Izis d'une durée de 16 minutes spécialement réalisé pour l'exposition par l'équipe de la télévision locale « 7 à Limoges » (Direction de la communication de la Ville de Limoges). Ce film évoque son exil à Ambazac durant la guerre, sa carrière de photographe journaliste notamment pour le journal Paris-Match, ses liens avec Israël et, bien sûr, son approche toute personnelle de l'art de la photographie. Des séquences d'archives de l'INA ainsi que des témoignages permettent au public de retrouver avec émotion ce grand photographe humaniste. Son fils Manuel Bidermanas, Henri Delage, habitant d'Ambazac qui l'a aidé pendant la guerre et le célèbre tireur de photographies Philippe Salaün, rencontré dans son atelier à Paris, sont de précieux témoins.
Le final de l'exposition renvoie une nouvelle fois à la modernité, à l'humour et à l'humanité de ce grand photographe avec un choix de photos, des compositions très modernes, et des assemblages mettant l'accent sur ses rapports humains.
Galerie des Hospices 2, rue Félix Eboué - 87 000 Limoges Du mardi au dimanche inclus (fermée le lundi) de 10h à 19h