© Steven Pippin
© Steven Pippin
Photographe, inventeur Steven Pippin transforme des objets du quotidien en chambre noire de la baignoire, au réfrigérateur en passant par les toilettes de train ou la machine à laver. Il interroge le procédé photographique et cherche à redéfinir ce qu’est l’appareil photo en élaborant des systèmes de prise de vues et en créant des machines artisanales hybrides, qu’il nomme des "non-appareils". Cette première monographie de l'artiste accompagne l’exposition éponyme présentée au Centre Pompidou à partir du 14 juin 2017.
Chez Pippin, le résultat est une photo, mais l’artiste convie moins l’observateur à contempler cette image qu’à lui faire rebrousser chemin et retracer l’histoire du processus. Le processus en soi n’a d’ailleurs pas tant d’intérêt s’il aboutit sans problème au résultat prescrit. Ce qui intéresse Pippin, et ce qui nous intéresse chez lui, c’est la dimension épique de ses investigations. Le processus et le résultat motivent ses recherches, mais c’est le cheminement intellectuel et pratique de la recherche qui lui confère tout son intérêt. Le photographe amateur campé par Pippin est un aventurier. L’œuvre, ici, est un récit. Sans résultat, pas d’histoire.
Frédéric Paul, extrait de l'ouvrage
© Steven Pippin
Steven Pippin s'intéresse à développer d'ingénieux dispositifs donnant lieu à de véritables performances. Le temps d'un trajet Londres-Brighton, Pippin s'enferme dans les toilettes du train à la fois sujet, appareil photo et chambre noire où il développe une image photographique dans des conditions acrobatiques. En 1997, le photographe lance un cavalier au galop dans une laverie automatique où douze machines à laver transformées en chambres noires, leur hublot devenu objectif, décomposent le mouvement de cette course, en hommage au pionnier Eadward Muybridge. Après cet exploit, Pippin s'est détourné de la photographie pendant dix ans. Au bouleversement de la révolution numérique qui nous sature d'images, il bricole, découpe, recompose des appareils photo pour les détourner de leur fonction première. Ce sont, alors, des retrouvailles violentes puisque la série Non Event, met en scène la destruction d'appareils photo shootés (dans les deux sens du terme) au moment même où une arme fait feu à bout portant pour les mettre hors d'usage : il les détruit physiquement, mais il respecte leur intégrité "philosophique" (...) à défaut de pouvoir photographier l'acte photographique, il faudra photographier son empêchement, comme le souligne Frédéric Paul.
Cet ouvrage réunit toutes les grandes interrogations de Steven Pippin qu'il traduit sous forme d'expérimentations techniques aux résultats poétiques. Les textes de l'artiste accompagnés d'un long essai de Frédéric Paul, conservateur au Centre Pompidou et commissaire de l'exposition, nous éclairent sur la démarche de Pippin et son exploration conceptuelle du médium photographique.
© Steven Pippin
Steven Pippin
Né à Redhill (Angleterre) en 1960, il développe dès son enfance un intérêt très fort pour la mécanique et les objets manufacturés. Il suit des études d'ingénieur à l’université de Brighton et s’attachera ensuite à transformer les objets de la vie quotidienne en appareils photo ou en sculptures cinétiques. Son travail figure dans de nombreuses collections dont celles du Centre Pompidou, du MoMA et du Guggenheim Museum de New York, ou encore de la Tate Gallery à Londres, de la Collection Lafayette Anticipations - Fonds de dotation Famille Moulin, et dans les Frac Limousin et Bretagne. En 1999, il a été sélectionné parmi les finalistes du prestigieux Turner Prize avec l’œuvre Laundromat Locomotion. Son travail est représenté par Gavin Brown's Enterprise à New York. Il vit et travaille à Greenwich.
Aberration optique
Steven Pippin
éditions Xavier Barral
35€