Expositions du 4/11/2015 au 28/11/2015 Terminé
La Petite Poule Noire 25 rue Beautreillis 75004 Paris France
Beyrouth est stratifiée, saturée. Elle vit un syncrétisme désespéré qui la rend belle et monstrueuse. J’ai rarement vu une terre heurter autant ses habitants. La guerre passée est encore si proche. On y parle toujours d’une construction permanente, de ses fêtes, de la vie qui aurait su garder ses droits. J’y vois pour- tant une poussière épaisse qui s’est immiscée partout, déposée là comme un voile sur l’innocence. Les libanais aiment et détestent leur pays. Ils s’angoissent, pensent que tout peut se perdre toujours. Alors ils jouissent. Il n’y a pas d’autre choix. Et ce presque rien, ce fil ténu, résiste aux vents, les sauve en tissant leur prison. Une cage dorée pleine d’argent et de femmes. Fissurée. Le Liban fait partie de ces terres trop aimées. Aimées par des parties ennemies qui ont pra- tiqué la haine de l’autre jusqu’au sang mais pour le moment pas prêtes à tout perde. La noirceur qui j’y vois n’est pas celle des abysses, elle est aussi profonde que la lumière est proche. Le Liban ressemble à la vie: le deuil, la tragédie sont immanents à sa beauté.La Petite Poule Noire 25 rue Beautreillis 75004 Paris France
Beyrouth 75-15 est composé de trois ans d’errances photographiques et d’images d’archives retrouvées dans les décombres d’un ancien hôtel de luxe du centre ville. Images antérieures à la guerre civile, danse et innocence d’avant l’histoire que je mixe avec les traces restées dans les chambres de l’hotel délabré et sur les murs de la ville aujourd’hui. J’y mêle paysages et instants de vie. Il s’agit d’évoquer l’intrication du passé et du le présent. La mémoire d’une his- toire commune enfouie en chaque libanais. Ou comment, en marge de notre nature, se terre l’obscur destin d’un peuple.
Il y a le temps d’avant. Et le temps d’après. La cassure, 1975, est la date de la guerre civile qui a embrasé le Liban.
Dans les images de Stéphane Lagoutte, on retrouve les évocations d’une vie balayée à tout jamais, le murmure de fantômes chéris qu’on tente, en vain et pourtant inlassablement, de ramener à soi, la bouleversante palpitation de ce qui n’est plus. De l’autre côté de la cassure, surgit le Liban d’aujourd’hui couturé des cicatrices qu’a laissées le conflit dans son paysage urbain.
Entre ces deux époques, ces deux ères, ces deux mondes, s’ébauche un dialogue subtil par un processus patient reposant sur des recherches d’archives, des superpositions et un travail très délicat de la tonalité. Pour tisser, peut-être, un avenir commun…