© Yann Datessen
Expositions du 7/11/2015 au 22/11/2015 Terminé
Maison du Danemark 142, avenue des Champs Elysées 2ème étage) 75008 Paris France
En 2014 le photographe français, Yann Datessen, a passé 5 mois à Christiania – une ancienne caserne militaire à Copenhague qui depuis 1971 abrite une communauté alternative et autogérée. Ce séjour lui a permis de se documenter sur les habitants qui défendent cette ‘ville libre’ – une ville verte basée sur une idéologie de l’anarchie, de l’amour, de la liberté et du communautarisme au plein milieu de Copenhague.Maison du Danemark 142, avenue des Champs Elysées 2ème étage) 75008 Paris France
Ses portraits et photos de Christiania témoignent une saison passée entre le clapot des radeaux du lac et les cornes de brume des paquebots qui au loin quittent le port de Copenhague. Son série d’images navigue entre les arbres d’une forêt sans âge et la fumée des hautes cheminées de l’usine voisine d’Amagerværket, et revient d’un territoire étrange fait de poupées gigognes, où les apparences sont souvent trompeuses et l’appareil photo pas forcément le bienvenu.
Tour à tour logé dans les foyers communautaires du quartier de Mælkebøtten, puis en pleine forêt dans les cabanes en bois de la griffe de l’ours ou encore du Caramel Bleu, j’ai demandé à mes voisins, « colocataires », rencontres et amis de poser pour moi, raconte Yann Datessen. Les christianites m’ont ainsi accueilli chez eux, sans retenu, le temps d’une bière, d’un repas, d’un silence : utopistes de tout poil, apaches et zazous, vieux rêveurs et jeunes rebelles, junkies et clochards, solitaires allumés tout droit sortis d’une nouvelle de Bukowski, familles citadines réfugiées loin des tracas de la capitale, artistes en éveil, artistes en réveil, Dionysos partout et des circassiens aux anges.
En 1971, sous une pression démographique croissante, la mairie de Copenhague décide d’évacuer la plupart des squats de la ville pour les réhabiliter. Du jour au lendemain des centaines de marginaux et d’idéalistes se retrouvent jetés à la rue. En quête d’un nouveau refuge, une poignée d’entre eux se tourne alors vers la presqu’île de Christianshavn où la marine danoise a récemment abandonné un terrain de 34 hectares.
L’ancienne base militaire dont le territoire est formé au sud d’un complexe de bâtiments désaffectés du XVIIIème siècle se prolonge idéalement au Nord par un lac et une forêt redevenus quasi sauvages. En très peu de temps tout ce que le port de Copenhague compte d’hippies, d’anarchistes, d’anticonformistes, de sans-abri, de chômeurs et de paumés y afflue. A plusieurs reprises les forces de l’ordre tentent de les déloger mais bientôt dépassées par leur nombre et leur détermination, elles renoncent.
Fristaden, la ville libre de Christiania est née.
La communauté s’organise : elle n’a ni chef, ni guru, ni hiérarchie, c’est l’autogestion et le modèle libertaire qui prévalent. Autour du lac on s’installe pour de bon et les constructions folles ne tardent pas à s’y multiplier. Du côté de « Christiania-ville », à l’intérieur même des anciennes constructions de briques, les logements collectifs et les coopératives naissantes se chargent de donner un toit et un travail à chacun.
Le gouvernement reconnaît le squat comme « expérience sociale » ; la ville dans la ville devient le phare de la contre-culture européenne et se gère tant bien que mal sans l’intervention extérieure de l’état pendant plus de 40 ans, jusqu’aux nos jours où Christiania est toujours debout.
© Yann Datessen