Magnum Photos Paris 19 Rue Hegesippe Moreau 75018 Paris France
Une exposition du grand photoreporter suisse René Burri rend hommage à son ami Jean Tinguely (1925-1991), à l'Espace Jean Tinguely – Niki de Saint-Phalle. Les Fribourgeois redécouvrent «leur» artiste grâce à cette exposition créée en 2005 par le Musée Tinguely de Bâle, avec la collaboration de l'agence Magnum. «Tinguely et Burri se ressemblent: même profondeur, même vitesse du geste, humour. Ils sont tous deux restés des garçons toute leur vie!» C'est ainsi que Guido Magnaguagno parle de ses deux amis qu'il a réunis dans cette exposition. «Pour nous, c'est un beau moment car René Burri a été grand reporter dans le monde entier, mais il nous permet aussi de revoir des personnes aujourd'hui disparues», déclare à swissinfo Yvonne Lehnherr, directrice du Musée d'art et d'histoire de Fribourg. Et puis René Burri a ses quartiers depuis longtemps à Fribourg puisqu'il a présidé à trois reprises la défunte Triennale de photographie, rappelle Mme Lehnherr. «Monstre sacré» René Burri, c'est un «monstre sacré» de la photo du 20e siècle. Depuis 1955, il parcourt le monde pour, de son propre aveu, «assouvir un intérêt profond pour l'homme, une envie de découvrir le monde et d'en rapporter des images». Il a travaillé en Amérique du Sud, notamment à Cuba où il tira des portraits de Fidel Castro et d'Ernesto Che Guevara. Puis dans les régions sensibles du Proche-Orient, à commencer par la Guerre des Six Jours en 1967. Il a aussi observé la Chine de Mao et des étudiants de la Place Tienanmen, ou l'Afrique du Sud de l'apartheid. Comme les Etats-Unis, avec les funérailles de Kennedy, la guerre du Viêtnam ou la rencontre Reagan-Gorbatchev. Etc., etc. Photographe de guerre, il se dit surtout photographe des gens, «avant tout dans le respect de la personne». Apôtre de la simplicité, il a toujours appliqué une grande rigueur formelle, acquise dans les années 50 à l'Ecole des arts et métiers de Zurich. Il a aussi réalisé des films et travaillé en Suisse. Son œil critique a, entre autres, observé les remous de l'initiative populaire contre la surpopulation étrangère en 1970. Légende vivante En 1956, il a été engagé comme correspondant de l'agence photographique Magnum. Il en est devenu membre de plein droit en 1959, puis président de Magnum Europe de 1982 à 1984. Il a publié dans tous les grands magazines comme Paris Match, Life ou Stern et signé d'innombrables expositions. Mais, à 73 ans, cette légende vivante est restée elle-même. «Il est très ouvert, très enthousiaste, avec un humour toujours prêt à jaillir», constate Emma Hascoët, de l'agence Magnum Tinguely dans son atelier fribourgeois, en 1990, un an avant sa mort. (Photo René Burri, Magnum Photos) L'ami Jean Tinguely Il s'intéressa aussi à l'architecture et à l'art avec des portraits de Pablo Picasso, Alberto Giacometti, Le Corbusier ou Jean Tinguely. Les collages qu'il réalise depuis le temps de ses études le rapprochent lui-même de la création. «René Burri a eu des rencontres sporadiques avec Tinguely», explique Yvonne Lehnerr. Il l'a rencontré pour la première fois en 1967 à Montréal, alors qu'il installait son «Requiem pour une feuille morte» au Pavillon suisse de l'Exposition universelle. Ensuite, il a réalisé plusieurs portraits individuels, ainsi que des reportages, de l'artiste et son œuvre jusqu'en 1991 à Venise. Il l'observe notamment dans son atelier à Soisy-sur-École (France) et lors de la construction de la sculpture monumentale «Le Cyclop». Expo conçue à Bâle en 2005 C'est donc au Musée Tinguely de Bâle que l'exposition a été conçue en 2005 par Guido Magnaguagno, qui avait déjà monté la rétrospective Tinguely à Zurich en 1982. L'exposition présente un cycle de photos montrant Tinguely installant ses œuvres aux expositions de Montréal, Bâle ou Venise. Le photographe «a su capter la spontanéité, la créativité, l'extraordinaire vitesse et la profondeur de l'artiste», déclare Guido Magnaguagno à swissinfo. René Burri a également fait une sélection de photos en noir-blanc et en couleurs de Jean Tinguely et de ses proches (par exemple sa femme Niki de Saint-Phalle, ou Yves Klein) pour les présenter en une installation avec des reportages classiques et tirages grandeur nature. Cette exposition était donc prédestinée à être montrée à Fribourg, dans le deuxième lieu dédié à l'artiste fribourgeois en Suisse, l'Espace Jean Tinguely – Niki de Saint-Phalle. Isabelle Eichenberger