© Charles Delcourt - Steve, Noeux-Les-Mines, aout 2009.
Présentation de l’exposition à 18h en présence du photographe.
Le paysage du Nord est entièrement manufacturé, façonné par l’homme et ses usages. Dans le bassin minier Lensois, les montagnes le sont aussi.
Ces montagnes de schistes, appelées terrils, sous-produits de l’exploitation du charbon, dépassent parfois 100 mètres de hauteur et s’imposent au regard, témoins récurrents de l’histoire des lieux, chapelet d’obstacles suivant une ligne Est-Ouest qui entaille ce pays.
Le reportage est rythmé par ces relais visuels. La navigation s’est donc fait «à vue», un terril en appelant un autre, de l’extrémité Ouest du bassin minier, à Bruay-la-Buissière, en allant vers l’Est, jusqu’à Oignies.
Ce travail égraine les sommets, utilisant ce prétexte pour s’attarder sur la vie qui s’écoule aux pieds de ces géants et chercher à définir l’essence des lieux.
Aujourd’hui, 20 ans après les dernières fermetures de mines qui les ont créés, les terrils ont évolué de manière indépendante, au gré des intentions politiques ou industrielles, jusqu’à développer une identité propre. On les retrouve donc ainsi: bruts et minéraux; paysagés par l’homme ou reconquis par une végétation spontanée ; convertis en pistes de ski ou en bases nautiques ; ré-exploités pour leur
schiste rouge ; entaillés, aplanis ou même transformés en station d’épuration... Des spectacles, des randonnées, etc. y sont organisés. Entre reconversion, aménagement ou laisser-aller, les scenarii sont très divers. Reste partout l’attachement que leur portent les proches habitants.
Les terrils sont intégrés à l’environnement quotidien, appropriés par les habitants, désormais voisins de ces montagnes. La ville s’est étendue jusqu’à les entourer, les «digérer » presque tout entiers. Ils dominent d’anciens corons réhabilités, des collèges, des aires de gens du voyage, des terrains de sport, des zones industrielles ou des parcelles agricoles.
Ainsi intégrés à l’environnement et à la vie ordinaire, ils rappellent à toute une population son histoire. Identitaires, ils persistent en repères, «totems» pour une population que le passé minier rassemble. Malgré la dureté de la tâche, la nostalgie de l’époque minière est bien présente.
© Charles Delcourt - Bain de soleil, Oignies, Avril 2009.
C’est en revenant dans sa région natale que Charles Delcourt prend toute la mesure du symbole identitaire du terril Sainte Henriette, porte d’entrée du bassin minier. Entre 2008 et 2014, il entreprend un important reportage sur ces montagnes de schistes issues de l’exploitation du charbon, qui sera en partie publié par le magazine GEO et est édité aujourd’hui sous le titre Face Nord.
Sensible au paysage et à ses modifications, Charles Delcourt parcourt le territoire en suivant une ligne qu’il surnomme la vallée des terrils, image empruntée à la vallée des rois et à ses pyramides d’Egypte. Au-delà des paysages, ses images nous offrent des rencontres avec les habitants du bassin minier.
Charles Delcourt crée alors des images drôles, émouvantes en sympathie et qui montrent combien ces personnes sont attachées à leur territoire si singulier.
Cette exposition propose plus d’une quarantaine d’images prises entre Denain et Bruay-la-Buissière, présentes dans l’ouvrage Face Nord, composé à quatre mains avec l’écrivain ukrainien Andreï Kourkov, qui a imaginé trois récits inédits.
© Charles Delcourt - Terril du 11/19, Loos-en-Gohelle - Juin 2010.
Charles Delcourt est membre de l’agence Light Motiv. Né en 1977 à Lille, il est architecte-paysagiste de formation. Il s’oriente progressivement vers la photographie jusqu’à s’y consacrer exclusivement depuis 2006. En dehors de ses travaux pour la presse et pour diverses entreprises ou institutions, il se consacre à des projets personnels aux thèmes sociaux et humanistes. Placer l’homme dans son contexte et s’attarder sur son quotidien constitue l’essence de sa photographie. Au travers de cadrages rigoureux et de compositions colorées, il cherche à théâtraliser le banal et surtout à restituer les ambiances des lieux.