© Valérie Belin
Galerie Nathalie Obadia-Bruxelles Rue Charles Decoster, 8 1050 Bruxelles Belgique
La Galerie Nathalie Obadia Bruxelles est très heureuse d’organiser la deuxième exposition personnelle de Valérie Belin en Belgique en présentant un ensemble de photographies inédites, trois ans après son solo show « Hungry Eyes », au FOMU, à Anvers.
L’exposition s’articule autour des œuvres issues de la série Still Life dans laquelle Valérie Belin nous révèle pour la première fois sa propre « collection », foisonnante et onirique. Ses nouvelles « natures mortes » dialoguent en toute cohérence avec la série Intérieurs. L’accumulation presque obsessionnelle des objets est le point d’orgue qui relie les deux séries entre elles. En effet, aussi bien dans ses Still Life que dans ses Intérieurs, Valérie Belin nous emmène aux confins de la frontière entre réalité troublante et fantasme. Thème déjà cher à Valérie Belin dès 2003 dans sa célèbre série des Mannequins, où l’artiste nous interrogeait sur la représentation du réel et du fantasme, en photographiant des mannequins en cire qu’elle avait maquillés.
Dans sa série Still Life, initiée en 2013, l’artiste crée de véritables « compositions » à part entière et nous fait ainsi voyager dans l’intimité d’une expression sublimée de ce que nous pouvons voir, percevoir ou ressentir. À travers ses photographies, soit en noir et blanc, soit en couleur, Valérie Belin continue d’explorer le champ des représentations possibles des objets : recherches sur la lumière, les détails et les textures des matières.
Cette trilogie formelle, qui bénéficie des dernières technologies numériques dont l’impression pigmentaire (jet d’encre) pour les épreuves en couleur, est servie par l’abondance et la diversité des objets représentés. Sous l’effet de leur superposition presque outrancière, la table - lieu de la mise en scène - manque de disparaître. L’élément mobilier est néanmoins d’importance puisqu’il délimite le cadrage serré des compositions à la manière des natures mortes flamandes et hollandaises du 17ème siècle.
À cette époque, la tendance était déjà à l’accumulation suivant le goût des collectionneurs du temps épris, comme Valérie Belin, d’objets insolites et exotiques. En revanche, l’artiste française ajoute ici des accessoires de son quotidien comme si elle voulait nous livrer quelques fragments de son intimité. Alors que sa série Intérieurs dresse un « portrait en creux » des collectionneurs du 21ème siècle, dans sa série Still Life, Valérie Belin semble nous dévoiler sa « collection » personnelle qui étonne par son caractère hétéroclite et son foisonnement à la fois baroque et surréaliste. Il y a tant d’objets que certains sont en équilibre instable et menacent de chuter de la table. Autre procédé inspiré des peintres nordiques qui avaient recours à cet artifice pour signifier la vacuité et la fragilité du monde dans lequel ils vivaient.
© Valérie Belin
Depuis, les temps ont-ils changé ? Les natures mortes de Valérie Belin nous soufflent subtilement la réponse.
En 2008, l’artiste avait déjà démontré son attachement à la peinture ancienne à l’occasion de l’exposition « Correspondance : Belin / Manet » où ses Corbeilles (de fruits) dialoguaient avec les natures mortes de Manet. Cette invitation du Musée d’Orsay lui permit alors d’expérimenter la saturation des couleurs et de la lumière qui caractérise également la série Still Life, exposée à la Galerie Nathalie Obadia à Bruxelles.
Ses natures mortes en noir et blanc font l’objet d’un traitement spécifique à l’origine de leur aspect rutilant.
Valérie Belin les aborde à la manière d’ « un paysage de science-fiction » dont l’apparence « lunaire » provient de la technique de solarisation qui inverse la source de lumière en aplats noirs.
Cela qui a pour effet de lisser les reliefs naturels des détails et des textures, alors que le traitement métallique de la lumière augmente paradoxalement leur présence physique. Cette illusion de la réalité, surréelle pourrait-on dire, souhaite créer «la symbiose entre les caractéristiques matérielles de son objet et l’essence lumineuse du médium physique lui-même ». Ainsi, les objets photographiés deviennent eux-mêmes des « empreintes lumineuses » qui les relient aux photogrammes de László Moholy-Nagy (1895-1946) et aux photographies surréalistes de Man Ray (1890-1976) qui sont des références historiques revendiquées par Valérie Belin comme « un point de départ » à son travail actuel.
Dans l’exposition à la Galerie Nathalie Obadia Bruxelles, les natures mortes sont mises en perspective avec les photographies en noir et blanc de la série des Intérieurs qui a recours au même procédé de solarisation. Ici, l’usage d’un grand angle pour réaliser les prises de vue accentue l’expressivité des lieux par un effet de « première impression » (celui qui nous frappe lorsque l’on pénètre dans une pièce et avant que l’on fragmente l’espace par des sélections, nous explique Valérie Belin). L’artiste nous explique également que la petitesse du format, proche d’une miniature, achève l’effet d’instantané car l’on voit tout en « un instant ».
© Valérie Belin