Jean-Paul Gauthier © Jonas Unger
Galerie Derouillon 38 rue Notre Dame de Nazareth 75003 Paris France
Jonas Unger est né en 1975 à Cuxhaven en Allemagne. Il vit et travaille entre Paris et Berlin.
Son travail a fait l’objet d’expositions à Berlin et a été présenté au sein d’institutions muséales tels que le Fotografie Winterthur Museum en Suisse (2012) et le Musée Deichtor Hallen (Internationale Kunst Und Fotografie) d’Hambourg. Il a notamment reçu le Lead Award et le Prix Hansel Mieth (2013).
Paul Nizon
© Jonas Unger
Pour sa première exposition parisienne à la Galerie Derouillon, le photographe allemand Jonas Unger présente une série de selfie de célébrités aux statuts énigmatiques. L’artiste interroge ce qui nous relie à ces personnalités, celles-là mêmes qui disparaissent si souvent derrière le masque de leur couverture médiatique. Vulnérables et sensibles, les stars « encapsulées » par Jonas Unger apparaissent à nos yeux dans toutes leurs singularités, une fois redescendues du socle des images de la presse people.
Convertir un écrivain en une incarnation de l’intellect, métamorphoser une actrice en sex symbol, voici le travail de l’image devenue spectacle, structurant un rapport au monde détourné de toute vérité humaine. Tandis qu’il décèle l’illusion de ces mirages omniprésents, Jonas Unger nous invite à quitter la caverne platonicienne des ombres mensongères pour renouer un lien avec la réalité qui anime ces confrères de notre monde. Lors de chaque rencontre, une fois le moment propice arrivé, l’artiste tend l’appareil à chacune de ces célébrités ; il leur demande de se photographier elles-mêmes à l’aveugle, sans décorum ni instruction particulière. C’est ainsi que nous découvrons les visages de ces stars dans la relation intime qu’elles nouent subitement, le temps d’un clic, avec cette machine qui les transforme si souvent en images – autrement dit en icônes du temps présent.
Cécile Coulon
© Jonas Unger
En résultent la trace d’un instant de vérité, le dévoilement d’une expression authentique, émancipée de toute emprise scénique de l’acte photographique. Aucun des clichés présentés par Jonas Unger n’est semblable à un autre, tant l’unicité de ce qui se produit alors est chaque fois inédit, et ce, au travers d’un geste aussi banal qu’ineffable. Chez certains, on reconnaitra les résidus d’un art de la pose, tandis que d’autres se ratent – l’image est alors coupée - ou préfèrent baisser les yeux.
Adèle Exarchopoulos
© Jonas Unger
L’une grimace gaiement, l’autre nous offre la vulnérabilité d’un sourire quelque peu interloqué. L’image délivrée de tout artifice soumet au regard du visiteur la sincérité d’une forme de maladresse nécessaire au dévoilement d’une proximité maximale entre eux et nous.
C’est alors qu’une relation devient possible. Par le prisme d’un simple jeu avec Narcisse et d’une logique de retrait, Jonas Unger offre à ces hommes et à ces femmes l’humanité qui nous les rend attachants. Empreinte d’autant de singularités individuelles, cette humanité ainsi révélée ouvre la voie à la réinvention de notre monde commun détaché du culte païen des icônes contemporaines.
Laure Jaumouillé