© Richard Ballarian - « L'homme qui marche »
La Mairie du VIe arrondissement de Paris présente dans la salon du Vieux Colombier l’œuvre du photographe Richard Ballarian.
Photographe de mode américain d’origine arménienne, Richard Ballarian a travaillé pour les plus grands magazines, Vogue, Harper’s Bazaar, Madame Figaro, Marie Claire, Elle, mais aussi pour des maisons et marques prestigieuses : Christian Dior, Givenchy, Valentino, L’Oréal... Parallèlement à cette activité, l’artiste a développé un langage personnel dans ses recherches artistiques à partir des années soixante-dix.
L’exposition révèle au visiteur l’ensemble des recherches personnelles de l’artiste du Polaroïd spontané à la série Urban Man, dont le rendu proche de la peinture est obtenu après un long travail sur les procédés chimiques dans la chambre noire.
Au rez-de-chaussée, l’exposition est consacrée aux œuvres grand format avec Urban Man – Urban Car et les photomontages. La mezzanine dévoile des photographies plus intimistes : ses réflexions sur l’eau et les végétaux, des Polaroïds et des portraits de célébrités.
La ville : Urban Man-Urban Car
De sa rencontre avec la ville lumière au milieu des années soixante-dix naît le désir de se consacrer à la photographie artistique. « C’est Paris, la ville, ses citoyens, qui m’a donné envie de commencer ce travail », aime-t-il dire. Quels que soient le format et le langage choisis, la ville reste le sujet principal de son œuvre.
Paris et ses habitants semblent transposer dans une autre réalité. Les personnages se muent en silhouettes désincarnées, intemporelles, qui évoluent dans une cité dématérialisée. Qui est cet Homme qui marche, qui sont ces Étudiants après leurs cours ? Des âmes errantes, des bras, des jambes, c’est au public de construire leur histoire, leur passé, leur devenir. Ces photos ont le pouvoir de susciter un dialogue entre le regardant et l’œuvre d’art. Ses personnages évoquent la solitude des grandes villes et les écrits d’Alfred Döblin, de John Dos Passos ou de Robert Musil.
Les Braqueurs de banques ne sont que des hommes dans une voiture. Le travail précis de l’artiste leur donne une dimension énigmatique. Cette photo de la série Urban Car est celle qui lui a donné le plus de travail : « Il m’a fallu dix, peut-être quinze pellicules pour réussir cette image. J’ai passé plusieurs nuits sur la place de la Bastille à photographier des voitures jusqu’à avoir la bonne. La voiture va quelque part, mais on ne sait pas où, ni ce que ses passa- gers sont en train de dire, de faire. Ils pourraient être des braqueurs de banque. La part de mystère est bien là. Cette photo illustre la balance entre spontanéité et travail de long terme. Si les scènes sont spontanées, la prise de vue ne l’est pas. »
Cette série est le résultat d’un long processus de recherches chimiques dans sa chambre noire : « L’expérimentation prend une grande part dans le travail et je crois que mes études de physique ont développé chez moi un amour de cette recherche. » Il introduit le facteur du hasard. La prise de risque, l’aventure, l’incertitude et l’accident font désormais partie du processus créateur. Des roses pâles, des verts tendres, des beiges et du marron sépia viennent sublimer le noir et blanc. Ses expériences témoignent de sa quête de la nouveauté. Son œuvre photographique évoque alors la peinture et nous rappelle la calligraphie (Gens traversant les Champs-Elysées) ou Alberto Giacometti (L’homme qui marche).
L’architecture : les photomontages
Les photomontages sont le résultat de ses réflexions sur l’architecture commencées en 1980. L’artiste transforme, « déconstruit », afin de créer un nouvel espace chargé d’une dimension émotionnelle. Si l’essentiel de recherches photographiques est centré sur Paris et ses citoyens, ses collages puisent leur inspiration dans ses voyages, une église en Italie, le Louvre à Paris, une place en Espagne, la gare Saint-Exupéry à Lyon... « Dans le photomontage du château de Chambord, j’ai réorganisé l’espace et joué avec les symboles, pour transposer le tout en une nouvelle réalité. C’est ce glissement de la réalité qui est la clé de la réussite. » Il place le spectateur au centre d’un univers poétique et onirique.
Dans la série Métal, Richard Ballarian réfléchit sur l’esthétisme des ponts et de l’architecture industrielle (usines sidérurgiques de la Ruhr). Il repense ses constructions et nous dévoile à travers ses montages leur beauté intrinsèque. Avec la série Diamonds, Richard Ballarian pousse son imaginaire au bout de la représentation logique. Ces œuvres au rendu géométrique sont le résultat d’une recherche de recomposition à partir de clichés de signalétique urbaine.
© Richard Ballarian - La salle d'attente du Paradis
Natures mortes
Une de ses premières séries est consacrée aux végétaux, aux fleurs, aux arbres, aux fruits et aux plantes séchées. Cette série de Richard Ballarian insiste sur le côté éphémère et fragile de ses sujets, arbres nus pétrifiés par le froid hivernal, fleurs citadines disposées en bouquet telles des danseuses graciles qui semblent osciller sous l’objectif de l’artiste.
De son travail sur les plantes naissent Les Abstractions, végétaux séchés entrelacés dont l’esthétisme évoque les toiles des ex- pressionnistes américains comme celles de Jackson Pollock.
Water
Une fois de plus l’artiste joue la lumière et ses reflets. Il étudie les mouvements de la lumière dans l’eau. Sous son objectif l’eau semble de- venir solide, véritable sculpture aquatique. Il la dirige, la plie à sa volonté comme un acteur dont il serait le metteur en scène : « En photographie, on travaille souvent avec la lumière naturelle, mais si on veut pouvoir travailler dans toutes les conditions, il faut savoir jouer avec elle et savoir la créer. »
© Richard Ballarian - Corps
Polaroïds
Ces œuvres fragiles et uniques s’inscrivent dans le renouveau de la photographie contemporaine. Ses Polaroïds font la liaison entre la mode et le langage intime de la recherche artistique. Ce sont de vrais instantanés, sans mise en scène préalable : manifestations vues de sa fenêtre, morceau de trottoir, intérieurs, vases, lampes... À la manière d’un impressionniste, il saisit un lieu dans l’instant. (Rue de Rennes en hiver, Rue de Rennes la nuit). Dans ces travaux, la lumière joue un rôle prépondérant. Il la capte, l’analyse, parfois la recompose : « Tous mes essais de lumière étaient testés au Polaroïd, comme la plupart de mes confrères d’ailleurs. J’attachais une grande valeur à ces Polaroïds. J’en ai fait des centaines, et j’ai gardé ceux que j’estime avoir une vraie valeur émotionnelle, esthétique et historique. »
© Richard Ballarian - Rue de Rennes sous la neige - Paris, Polaroïd
Célébrités
L’exposition se termine sur les portraits de célébrités réalisées par l’artiste : Loulou la Falaise, Claude Chabrol, Isabelle Huppert, Fanny Ardant, Charlotte Rampling, Montserrat Caballé, Andrée Putman.
Créateur de tableaux photographiques, Richard Ballarian nous révèle un art où poésie et science s’allient.
Isabelle Huppert et Claude Chabrol © Richard Ballarian
Témoignages
« Nos sens sont étourdis par son travail sur ces petits et splendides moments qui, sans lui, nous auraient échappé. Ballarian capture les tendres, magiques et souvent minuscules mouvements qui animent notre monde merveilleux. »
Jerelle Kraus, directeur artistique du New York Times
« La majorité de ces images enregistrent un passage dans le temps que l’on pourrait ap- peler mouvement. La caméra enregistre cette mutabilité d’une façon que personne ne pourrait les visualiser. »
« Des images proposent une vision qui frappe l’œil avant même d’atteindre l’esprit... D’autres ne peuvent s’expliquer que par la magie de la symétrie. » Richard Ballarian
infos pratiques
Entrée libre du lundi au vendredi de 10h30 à 17 heures, jeudi jusqu’à 19 heures, samedi de 10 heures à 12 heures. Ouverture exceptionnelle dimanche 6 avril de 14 heures à 18 heures.
Tous les mercredis à 16 heures et les samedis à 11 heures, Richard Ballarian fera une visite guidée et signera la monographie Richard Ballarian, recherches photographiques personnelles.
Cet ouvrage fera office de catalogue. Version française : 30 € Versions anglaise et chinoise : 40 €
biographie
1928 Né d’un père arménien et d’une mère écossaise à Pittsford, banlieue de Rochester, État de New York
1950 Obtient une licence de physique à l’université de Rochester
1953-56 Études de Photojournalisme à l’Art Center School de Los Angeles
1966 Il ouvre son propre studio de photo à New York et travaille comme photographe de mode pour Gentleman’s Quarterly, Woman’s Day, Seventeen, Ladies Home
1975 S’installe à Paris et collabore avec Elle, Marie Claire, Jardin des Modes, Figaro Madame, Harpers Bazaar Europe et USA.
Il signe de nombreuses campagnes de pub : Givenchy, Dior, L’Oréal…
1976 Début de son travail artistique, photomontages, Urban Man, Écritures d’eau, fleurs et abstractions.
Expositions
Octobre 1998
The New York Photography Fair
Octobre 1999
The New York Photography Fair, Puck
Building , New York
Janvier 2000
Urban Man, Los Angeles 2000 Photography
Fair, Los Angeles
2000-2003
Urban Man, Egypte et Urban Car, The Armory
Show, New York
Juin-juillet 2013
« Le Néophile », Galerie Basia Embericos, Paris
mai 2013
« Vers les hommes qui marchent », Galerie
Métanoïa, Paris
novembre 2013
Invité d’honneur de Photo Off
décembre 2013
Zealous, Londres