© Alexander Apo?stol
Galerie mor.charpentier 8, rue Saint-Claude Paris, France 75003 Paris France
Le travail d'Alexander Apostól cherche à établir des liens entre l'art et l'architecture, et la politique et l'organisation sociale. Pour sa première exposition personnelle à la galerie mor.charpentier, l'artiste présente la vidéo Contrato Colectivo Cromosaturado (2012) qui expose en six chapitres l'identité sociale et politique de différents groupes sociaux du Venezuela démocratique, avec les outils de l'art cinétique. Selon un principe similaire, la série de photographies « Color is my business » (2012-2014) utilise les couleurs emblématiques des partis politiques vénézuéliens pour identifier les secteurs de domination, influence ou corruption de chaque parti, par le biais de la couleur ou de nuances de gris.
Contrato Colectivo Cromosaturado, 2012 © Alexander Apóstol
Le début de la démocratie au Venezuela remonte aux années 1950, avec la fin de la dictature de Pérez Jiménez ; et les années 1960 virent se succéder des changements politiques et économiques radicaux. Le pays, toujours instable, cherchait une base politique et économique solide, et c'est le choc pétrolier de 1973 qui enclencha la période de prospérité dont le Venezuela, membre fondateur de l'OPEP, avait besoin pour établir les bases de sa démocratie. De la même façon, l'État cherchait une image fédératrice autour de laquelle il pourrait rassembler les différentes classes sociales, des travailleurs aux entrepreneurs, en passant par les intellectuels, les employés et les étudiants. C'est ainsi qu'il repéra et donna son soutien à un groupe d'artistes vénézuéliens basés à Paris, parmi lesquels Carlos Cruz-Diez, qui développait un art vibrant et très coloré, aseptisé, millimétrique, contemporain et ludique, tout en alimentant le fantasme du Venezuela d’être un pays « développé » sur le modèle occidental. Ce fut ainsi que tout le pays, de la campagne à la ville, des entreprises aux habitations, des bus à la rue, se convertit au cinétisme, suscitant l’enthousiasme de la population.
Color is my business, 2012-2014 © Alexander Apóstol
Color is my business, 2012-2014 © Alexander Apóstol
Le cinétisme est un art participatif où la perception du spectateur dépend de son positionnement dans l'espace : les couleurs et les formes changent en fonction de l'endroit d'où on les regarde. De la même façon, les politiques populistes du Venezuela démocratique, tout comme certaines politiques contemporaines du pays, peuvent être perçues de manière différente en fonction du positionnement de celui qui les observe.
Dans les années 1970, l'argent du pétrole permit l'ascension sociale des différentes strates de la population, ainsi que la normalisation et l'assimilation de la corruption. Cependant, entre les années 1980 et 1990, en conséquence des désordres économiques successifs et de l'escalade de la corruption, le Venezuela s'enfonça dans une spirale de grèves, crises sociales, révoltes et coups d'État. Le pays fut le théâtre d'une crise sociale profonde et irrésolue – en parallèle de la progression toujours soutenue des revenus pétroliers - qui provoqua le démantèlement successif des institutions démocratiques et du système, dont les conséquences politiques, économiques et sociales sont toujours d'actualité et continuent à s'aggraver.