© Magali Lambert
De retour de la Casa de Velázquez, Magali Lambert propose pour la première fois à Paris une exposition intitulée « Échos ». Cette exposition s’articule autour de deux séries : « Miroirs du Temps (Escurial) » et «Écho», où l’instant présent et l’infini cohabitent dans une mise en abîme constante. L’artiste interroge ces deux notions; elle met en scène la nature et le corps avec des objets aux pouvoirs magiques qui ouvrent une fenêtre sur l’indicible.
Elle propose de mettre en images ce qui ne se nomme pas, le mystère du vivant, le lien existentiel de l’humain à sa condition précaire et son histoire, personnelle et collective. Comment s’opère cette représentation?
Les premières prises de vues de la série « Miroirs du Temps » ont eu lieu autour de l’Escurial, ancienne résidence des rois d’Espagne à Madrid. Ce fastueux complexe royal et monastique, édifié au XVIe siècle, est le symbole du pouvoir temporel et intemporel. Ces espaces gigantesques s’étendent sur un vaste domaine peu visité en raison de leur large superficie. Des lieux emblématiques de l’Espagne catholique dont le maître d’œuvre fut Philippe II.
Que nous montre Magali Lambert ?
Le format carré de la photographie montre au centre de celle-ci un miroir carré lui aussi reflétant ce qui se trouve derrière la preneuse de vue : le ciel bleu éclatant, la végétation, un tronc d’arbre qui répond à celui sur
le-quel est posé le miroir. Un jeu visuel réflecteur et démultiplicateur de l’image piégée. Le miroir carré au centre de la composition se veut l’obturateur de l’appareil photographique, là où passe la perception de la photographe et qui servira de révélateur lors du tirage. La symbolique du carré est prégnante. Le carré incarne un monde équilibré et fixe. Il fait écho aux pierres de l’architecture. Il crée un lien entre ciel et terre. Il tente d’arrêter, de cerner les réminiscences du passé.
Cette problématique, ainsi ouverte, se prolonge dans la série « Écho ». Magali Lambert reprend le format carré. Le dispositif ne fait plus appel à un miroir, il est en miroir puisqu’il s’agit d’autoportraits. D’une «réflexion» sur l’espace corporel. Le corps se love autour d’une sphère laiteuse, réfléchissante et énigmatique, mettant en relation deux espaces, celui de l’intime proche de la caresse et celui de l’étrange, l’autre, le lointain.
L’illusionnisme du passé et du présent rejoint l’intemporalité de l’image cherchée par l’artiste.
L’interaction entre dedans et dehors joue ici sa pleine fonction d’évasion.
Magali Lambert apporte des réponses au silence et à l’absence. Ses photographies sont les stances d’un poème ouvert sur l’infini. Elle nous emmène dans un aller-retour entre profane et sacré sans cesse destitué et
reconstruit. L’artiste va et vient continuellement dans différents espaces temps, de l’intérieur à l’extérieur, entre vivant et trépassé. Nos paroles franchissent les derniers cercles et nous reviennent pour que nous les entendions enfin se briser.