Hannah WHITAKER - Red 666, 2013
Galerie Christophe Gaillard 5 rue Chapon 75003 Paris France
La Galerie Christophe Gaillard présente «The Fifth Hammer», première exposition personnelle d’Hannah Whitaker à Paris. Des photographies représentant des paysages de la Louisiane, du Costa Rica, des portraits ou encore des natures mortes composées d’objets quotidiens y seront présentées.
Des principes organisationnels sont à l’origine des photographies d’Hannah Whitaker : motifs visuels, répétitions, systèmes numériques ou encore les compositions musicales de John Cage. Dans chaque photographie Whitaker présente un raisonnement manifeste - illustré par une grille, un motif ou encore la répétition sur une série de photographies - tout en contrariant cette logique avec des erreurs, du hasard, des imperfections, du désordre.
Cette exposition souligne l’intérêt croissant de Whitaker pour l’espace à l’intérieur même de l’appareil photographique. Elle utilise une chambre photographique 4x5 pouces ce qui lui permet de manipuler la pellicule à la main. Elle utilise des écrans papier découpés à la main pour perturber ou transformer le processus photographique, défiant ainsi l’intégrité de l’image technique. Déployant ces écrans à différentes étapes de l’exposition de la pellicule, elle les utilise parfois directement lors de prises de vues multiples, ou encore s’en sert pour exposer la pellicule à la lumière. Grâce à ces techniques «in-camera», ses images se composent de couches successives de langages visuels, associant géométrie et photographie, le «fait main» et le technique, le plat et le tri-dimensionnel. Ainsi, les objets et espaces sont identifiés tant comme matière photographique, que comme produit des écrans eux-mêmes - marques de fuites de lumière ou formes définies par les écrans de papier découpés.
Avec une emphase sur la linéarité syncopée du dénombrement, les photographies de Whitaker donnent un rythme au regard, similaire au mouvement qu’induit la lecture. S’inspirant des écrits de Gertrude Stein et des designs textiles d’Anni Albers, elle met en place des types de stratégies répétitives qui seront défiées aussi vite qu’elles auront été établies. Whitaker s’intéresse aux histoires politisées et codées qui se cachent derrière les motifs et l’abstraction géométrique, tant dans les Beaux Arts que dans les arts populaires. Dans Water Water Water par exemple, elle emprunte la logique modulaire des «quilts» traditionnels Américains. Dans la série Limonene, elle va chercher dans les détritus récupérés sur les trottoirs de Miami, un langage visuel enraciné dans la peinture abstraite. La série Red est issue d’un projet plus large qui comprend 36 photographies re-photographiées, basé sur une séquence numérique.
Contrairement à ses précédentes séries, les sujets de «The Fifth Hammer» sont intentionnellement terre à terre. Tandis que l’élaboration de ses photographies est pour le moins non-conventionnelle, ce qu’elles représentent ne s’éloigne pas des usages convenus de la photographie. Elles documentent sa vie personnelle et ses voyages. L’emphase mise sur les conditions dans lesquelles ces photos ont été créées contredit néanmoins l’expérience même du regard : la photo 255 ne tire pas sa force de la grille qui dissimule le regard du modèle, mais du fait que malgré elle, le regard nous parvient.
Le titre de l’exposition trouve son origine dans la légende des marteaux de Pythagore racontée par Boèce dans laquelle Pythagore, en écoutant les bruits d’une forge, s’interroge sur l’harmonie rendue par les différents marteaux frappant l’enclume. En comparant le poids de chaque marteau au son qu’il produit, il en déduit les principes de l’harmonie musicale quantifiant ainsi un phénomène esthétique. Le cinquième marteau cependant est dissonant à l’égard des autres, Pythagore ne l’inclut donc pas, délibérément, à son étude. Cette histoire montre la limite d’un raisonnement logique quand il s’agit d’expliquer le monde qui nous entoure, de la même manière que les images perturbent la pensée linéaire pour y introduire des modes de pensée paradoxaux ou absurdes.
Hannah WHITAKER - 36 Antipopes, 2013
Galerie Christophe Gaillard presents Hannah Whitaker’s first solo exhibition in Paris, “The Fifth Hammer.” On view is a selection of new photographic works ranging from landscapes shot in Louisiana and Costa Rica, staged portraits, and still lifes of mundane objects.
Whitaker’s photographs start with organizing principles ranging from visual patterning, to repetitive motions, to number systems, to the structures of John Cage’s musical compositions. In each photograph, Whitaker presents an overt rationale—represented visually by a grid, a pattern, or repetition across several photographs—while undermining this logic with mistakes, randomness, imperfection, and messiness.
The exhibition marks Whitaker’s increasing focus on the space inside the photographic apparatus. She uses a 4x5-inch view camera, which allows for a film plane large enough to be manipulated by hand. She makes use of handcut paper screens to disrupt or transform the photographic process, defying the integrity of the technical image. Deploying these screens at various points in the process of exposing film, she at times shoots through them for one or multiple exposures and, at other times, uses them to leak light directly onto the film. Using these in-camera techniques, she often layers different visual languages within a single image, placing the geometric alongside the photographic, the handmade alongside the technical, and the flat alongside the dimensional. As a result, objects and spaces are articulated both through recognizable photographic means and also as artifacts of the screens themselves—spots of light leaks, or shapes defined by a cut in the paper screen.
With an emphasis on the syncopated linearity of counting, Whitaker’s photographs provide a rhythm to the action of looking at a photograph, like the motion of reading. Drawing from Gertrude Stein’s writing and Anni Albers’s textiles, she establishes patterns of repetitive strategies that are defied as quickly as they are established. Whitaker is interested in the coded and politicized histories of patterns and geometric abstraction in both fine and vernacular arts. In Water Water Water, for example, she employs the modular logic of traditional American quiltmaking. In the Limonene works, she extracts a visual language rooted in abstract painting from litter collected off the streets of Miami. The Red works are excerpted from a larger project comprised of thirty-six re-photographed photographs based on a sequence of numbers.
Unlike in previous bodies of work, the subject matter in “The Fifth Hammer” is decidedly banal. While her photographs are made via unconventional means, what they depict is in line with conventional uses of photography—they document her personal life and travels. Whitaker’s emphasis on the conditions for making these works belie the actual experience of looking at her photographs, such as in 255, which derives its strength not from the grid that obscures a woman’s gaze into the lens but in spite of it.
The exhibition takes its title from a story told by Boethius about Pythagorus. In it, Pythagorus stumbles upon a forge from which he could hear the harmonious sounds of hammers banging against rock. By comparing the weight of each hammer to the sound it produced, he deduced the principles of musical harmony—thus quantifying an aesthetic phenomenon. The fifth hammer, however, was discordant with all others, and so Pythagorus discarded it. The story points to the limits of logic rationale to explain the world, much the way that images disrupt linear thinking in favor of nonsensical or paradoxical modes of thought.
Hannah WHITAKER - Water Water Water, 2013