© Eric Bourret
Galerie Lazarew Paris 14 rue du Perche 75003 Paris France
Eric Bourret est un artiste français, né à Paris le 10 mars 1964. Il vit à la Ciotat et passe de longs séjours dans les Alpes et dans l’Himalaya. C’est lors d’un stage d’astronomie dans l’Aveyron, qu’Eric Bourret découvre la photographie. Depuis, il arpente avec obstination les montagnes de l’Himalaya ou des Alpes pour y photographier “le temps des paysages”.
Le temps est en effet primordial dans sa démarche, il désigne l’aléatoire, l’indéterminé. L’artiste s’impose alors un mode opératoire amenant à prendre les constitutifs du procédé photographique à revers : il saisit en marchant, 6 à 9 fois un même motif cadré sur un même négatif.
« La photographie n’est plus ici un arrêt du temps mais la saisie aléatoire de temporalités » « En redoublant de multiples fois la prise de vue sur le même négatif, une partie de l’image se désintègre sur la pellicule avant de se concrétiser (...), le prélèvement qui en résulte tente de superposer l’échelle temporelle géologique à l’échelle temporelle humaine. » explique-t-il.
S’appuyant sur une technique de surimpression (addition de temps sur du temps sur du temps....), ses photographies soulignent la dynamique temps / mouvement qui est celle du marcheur, ajoutant, par leur rendu insaisissable, une indéniable puissance poétique aux pay- sages qu’il nous offre.
Il rend ainsi visible, sur une seule image photographique, un feuilleté temporel de toutes les mémoires et expériences vécues en un lieu.
Sa démarche personnelle est un véritable exercice au sens physique, il faut marcher long- temps et s’immerger dans la nature pour ne plus avoir plus de point de repère et gommer ainsi le temps perçu et parcouru.
« J’assume pleinement l’indétermination qui résulte de ma démarche, ce qui me permet de me concentrer sur le sujet de la nature impermanente appréhendée comme un corps vibratoire. Cet aléatoire provoque une tension qui évacue partiellement la saisie photographique comme « acte décisif » et brouille les données perceptives pour ouvrir l’horizon aux interprétations métaphysiques».
« En marchant, je fais corps avec le paysage, j‘épouse les accidents du relief » nous dit Eric Bourret qui, par ce travail à l’aveugle, et in progress, touche à l’effacement produit par excès de visible.
Nous avons été séduits par la force et la beauté des oeuvres d’Eric Bourret. Aussi nous sommes particulièrement fiers de présenter le travail de cet artiste durant le Mois de la photographie 2013 à Paris.
Ces oeuvres font parties d’importantes collections publiques en France (Musée d’Art Moderne et d’Art Contemporain, Nice - Bibliothèque Nationale de France, Paris - Hôtel des Arts, Toulon - Musée Picasso, Antibes ...) - A l’étranger ( The Photographic Museum of Finland - Fondazione Italiana per la Fotografia, Turin - Muséu da Imagen, Braga - Musée de l’Élysée, Lausanne) .... ainsi que des collections privées en Europe, Afrique du Sud et aux Etats Unis.
Népal, Himalaya 2012 © Eric Bourret
ERIC BOURRET
Texte de François Bazzoli
« Cette vision aurait des liens serrés et quasi généalogiques avec l’art éphémère de l’extrême fin de vingtième siècle et du début encore vagissant du siècle suivant, une causalité sans faille avec “le presque rien et le je-ne-sais-quoi”. Dans cette proposi- tion, l’œuvre d’Eric Bourret aurait une place de choix, ses liens avec la concrétion, l’ef- facement programmé, mais aussi avec le monument tumulaire, tutélaire, étant très fortement marqués, insistants même. Avec la capacité de transformer l’image lisible en son contraire, de faire du paysage une œuvre de Land Art transformable à sa volonté. »
... « On pourrait imaginer cette photographie comme un immense “memento mori”, un lac- is inextricable de traces fragiles vouées à l’oubli, un massif de mémoires tremblantes, de lignes bougées, un cénotaphe vide consacré à l’infime durée des choses de ce monde... »
... « On pourrait également imaginer la photographie telle que la pratique Eric Bourret comme la somme totale de toutes les mémoires de l’œil, car il ne peut exister de mémoires sans oubli. Une plaque sensible sans limites, qui serait le réceptacle de chaque couche de forme et de sens. Une superposition sans fin de toutes les réalités pour parvenir à une seule image. ... »
... « les images d’Eric Bourret sont toutes remplies de ces superpositions infimes, semblables à un brouillage mais nourrissant abondamment le regard de leur complexité. Une complexité de con- struction qui n’exclue pas une grande simplicité de lecture, où l’émotion affleure comme un souvenir qui peine à réapparaître tout en laissant deviner qu’il est là, latent, prêt à émerger. Mais cette super- position ne doit rien au hasard ou au bougé, elle s’engendre par la mise en place d’une procédure qui peut se répéter d’image en image, qui se réédite de procédure en procédure afin de compren- dre (pour le spectateur comme pour l’artiste) ce qu’il peut advenir de différent au sein du même...”
.... « Certains photographes, comme Georges Rousse se disent essentiellement peintre, et d’autres pourraient prétendre à la fonction de sculpteurs. Dans le travail d’Eric Bourret, chaque œuvre super- pose, en même temps que des prises de vue, le photographe, le peintre et le sculpteur, sans que l’un soit plus présent que ses alter ego : si un jour l’un se met à prédominer, il n’y aura plus d’image.... »
François Bazzoli est historien d’art, professeur titulaire d’Histoire de l’Art Contemporain à l’École Supérieure des Beaux-Arts de Marseille-Luminy depuis 1984. Il est auteur de nombreux articles sur l’art pour des revues, cata- logues, ouvrages spécialisés et actes de colloques.
Photographie et vignette @ Eric Bourret