Hommage à Georges Clausen II © Nicolas Dhervilliers/ courtesy School Gallery
School Gallery Paris 322 rue saint Martin 75003 Paris France
Cette troisième exposition monographique de Nicolas Dhervillers sera l’occasion de découvrir sa dernière série intitulée Hommages.
Certaines de ses photos seront également visibles sur le stand de la galerie à Paris Photo (stand B45) du 13 au 17 novembre 2013.
Une femme nue, le corps languissant sur un tapis d’herbes hautes, la main qui glisse sur le sein droit, se repose. Le ciel prépare son orage, quelques éclairs, peut être. Le clocher de l’église, au loin le village, sont dans le noir des nuages. La femme s’en fout. Elle jouit d’une solitude nouvelle. Elle a laissé ses compagnes, ses sœurs, les demoiselles aux chignons de fleurs. Elle est sortie de la toile de Julius Leblanc Stewart et de sa clairière ombragée. Elle est arrivée là, dans un autre paysage, dans une photographie de Nicolas Dhervillers. Elle est bien ici, elle est chez elle, aussi. Un jeune homme, à genoux, boit dans le creux de sa main l’eau d’une rivière. Il n’a besoin de rien. Pas même de l’écuelle de Diogène du tableau de Poussin. Il est inscrit dans la nature, dans sa poésie brute. Il est à sa place dans ses collines de rocailles infinies, il est en harmonie. Un frère dans sa soutane, au milieu des bois sombres et des arbres puissants, les mains offertes, les paupières closes, a choisi la posture de l’humilité. Il est agenouillé au pied d’un tronc géant, déchiré par les tempêtes. Sa tête regarde vers là haut. Tout là haut. Sans doute entend-il, d’ici aussi la mélodie céleste. C’est Saint François d’Assise, échappé de l’œuvre de Franck Cowper.
Ils sont nombreux les personnages d’Hommages, la nouvelle série de Nicolas Dhervillers. Nombreux à se déplacer, d’une toile de maître à un tableau photographique, de l’huile au numérique. Ils ne sont pas des âmes errantes perdues dans des lumières chien-loup, des touristes cherchant un sens à l’existence sans bagage ni destin. Ils sont des présences, pénétrantes, avec une histoire, une grande et longue histoire qui vient se coller comme une évidence dans une géographie nouvelle. Dans les ombres, les clairs et les obscurs, et dans des bouts de soleil.
Nicolas fabrique un halo spirituel, presque divin et le dépose, en hommage, sur eux. Eux, les petits personnages peints, détourés et en exil, les morceaux de chefs-d’œuvre, ont trouvé dans les paysages de l’artiste une autre maison. Ils ont quelque chose de la grâce. Une autorité et une aisance. Ils sont des résurgences. Ils marquent le décor, l’estampillent et font surgir de lui, sa puissance et son mystère. Dans chaque horizon, dans chaque plan, on est ailleurs, dans des lieux lointains, bien en arrière et très en avant. Des endroits comme des retraites, des zones platoniques et intérieures. Nicolas dirige ses acteurs, l’espace, la photo comme un réalisateur. Et fait des films à image unique. Il invente sa diaspora picturale qu’il disperse dans son monde. Il y a des hommes de James Tissot, un garçon de Vassili Perov, des fillettes et un bébé de William Bouguereau, une femme de Jules Bastien-Lepage ou un faon de Gustave Courbet. Et ils voyagent les déplacés. Et ils ont fait un bon, un saut dans l’histoire des arts. Nicolas Dhervillers leur offre une vie parallèle dans des forêts, des montagnes de rochers, sur des routes ou des chemins de fer, dans le vert d’une colline ou sur une branche d’arbre. Et leur terrible beauté gagne les alentours. Et les alentours sont toujours aussi magiques.
Texte de Julie Estève, 2013
Hommage a Vassili Perov, 2013, Photographie 120x160 cm © NicolasDhervillers / courtesy School Gallery
Hommage à Julius Leblanc Stewart, 2013, Photographie, 110x90 cm © Nicolas Dhervillers / courtesy School Gallery
Photographies et vignette © Nicolas Dhervillers / courtesy School Gallery