© Philippe Assalit
Galerie Dock Sud 2 quai Aspirant Herber F-34200 Sète France
« MONNAIES »
Série inédite de 40 portraits - 40 monnaies - 40 pays, 2013
Il est surprenant que l’homme utilise depuis plusieurs siècles des petits papiers dessinés, les billets de banque, comme moyen d’échanges.
P. Assalit a réalisé à ce jour le portrait de femmes et d’hommes de plus de 40 pays, en associant à leur visage les billets de banque actuels ou historiques. Le visage est refaçonné par les détails des billets utilisés comme une palette de couleurs. P. Assalit parle de « fonte des images » un nouveau visage nait, comme la technique de la sculpture où le métal en fusion prend place au sein du moule.
Pourquoi le billet de banque ? Car le billet de banque est un petit morceau de papier que l’homme aime tenir parce qu’il est nécessaire à l’échange, qu’il passe de mains en mains, des milliers de mains, échappe et revient. Parce qu’il est souvent beau au regard de la beauté des dessins gravés et de la précision du trait. Parce qu’il rappelle la multiplicité des figures humaines, la diversité du monde végétal ou animal, des paysages, de l’architecture ou témoigne de l’homme au travail, de l’histoire des peuples, des découvertes scientifiques, des révolutions, des œuvres d’art... Il est un témoin du voyage dans un pays voisin ou lointain, trésor gardant une part de mystère car partiellement déchiffrable. Il est un symbole du 20ème et 21ème siècles, vecteur de transactions multiples face à la dématérialisation grandissante des échanges. Chaque billet a sa texture particulière comme la peau capable de supporter la pluie, la lumière, l’usure du temps.
© Philippe Assalit
Chaque portrait photographique joue avec la mémoire gravée sur les billets de banque, étant entendu que cette mémoire est elle-même souvent gravée d’après photographie. « Cette seconde peau » est un kaléidoscope des cultures et de leurs signes, qu’ils soient langue, symbole, figure humaine, construction architecturale, élément végétal ou animal, œuvre d’art (...) et c’est tantôt un signe singulier ou inconnu, tantôt un patrimoine commun. P. Assalit va utiliser la forme du « Mix », assemblant histoires individuelles et collectives, en puisant et peut-être détournant les sources iconographiques présentes sur les billets pour écrire la partition d’un nouveau visage étonnamment présent et réel.
Chaque portrait est une invention: à l'image du billet lui-même, il mixe traditions et dernières avancées technologiques et joue avec les échelles, les agencements et les transparences.
Ainsi sont mis en scène, dans un portrait photographique, par le truchement du billet de banque, les fils qui lient figure humaine, billet de banque et photographie : réel, imaginaire, présent, histoire, représentation, pouvoir, abstraction, figuration se jouent l’un de l’autre comme dans un reflet sans tain.
Technique photographique
C’est un travail photographique qui emprunte des voies plastiques diverses : Dans un premier temps, c’est la réalisation du portrait de la personne du pays concerné en prise de vue classique.
Puis, suit un moment de découverte et de recherches afin de s’imprégner des cultures et des réalités des pays. Ensuite, un temps préparatoire de recherche historique et iconographique des billets conduit à la saisie des images des différentes séries émises depuis la création du pays, soit au total plusieurs dizaines d’images de billets qui vont être décryptées et dont les éléments iconographiques et graphiques vont être identifiés et choisis. C’est le rapprochement du portrait de la personne et de l’ensemble des images de billets ou de détails qui forment la boite à outils de la future composition.
Le portrait n’est pas transformé et correspond à la réalité de la prise de vue, mais chaque détail graphique présent sur une face d’un billet peut être découpé de façon extrêmement précise. La plasticité des possibilités de montage est semblable à la liberté donnée par la palette du peintre : découpages, imbrications, duplications, agrandissements, anamorphoses, couleurs, transparences concourent à la création de cette «seconde peau», rappelant parfois le décalcomanie, ou le tatouage tribal.
Depuis les premières expériences de collage en 1912 de Braque et de Picasso, suivis par les Dadaïstes, puis les Surréalistes, c’est la même volonté qui opère de se libérer du règne de la réalité. Aujourd’hui, la technologie permet de réaliser une sorte de « super-collage » ou de « mix ».
Le grand format des œuvres permet de lire à la fois le portrait et les dessins gravés sur les pores de la peau et donne la sensation d’une œuvre picturale ou d’une « sculpture photographique ».
«TÊTES», Série de 60 portraits, 2011
Le visage fait littéralement corps avec un ensemble de matières minérales, végétales, brutes ou ouvragées, 60 têtes voient le jour comme autant de sculptures/photographiques : homme fleur, homme écorce, marbre, rivière, fontaine, homme oursin, galuchat, lichen, corail...
Cette recherche, grâce au grand format des images, invite à se rapprocher au plus près, dans le détail et le secret d’un morceau d’écorce, de pétale de fleur, d’éclat de roche ou de mur, de goutte d’eau. La matière est à la fois chair et peau, c’est comme une peau retournée où l’intérieur et l’épaisseur sont apparents.
Chaque image est un voyage qui renvoie à l’enfance, à des souvenirs enfouis ou étrangement à quelque chose de reconnu. Cette plongée sub-humaine est au service d’une représentation humaine intime illustrant son essence et ses désirs, une humanité façonnée par son environnement et qui l’a aussi façonné.
L’avenir de l’homme se trouve interrogé avec sa capacité à décider de son destin avec ou sans celui de la nature.
© Philippe Assalit
« La série n’a pas vraiment de titre, il s’agit de « Portraits ». Le sujet ? C’est lui, non seulement en tant qu’être, mais en tant qu’homme. L’artiste se confronte aux éléments jusqu’à parfois se confondre en eux, s’y dissoudre partiellement. Si la nature et sa puissance semble un terrain privilégié pour son côté quasi « homme des bois », Philippe Assalit se sent aussi profondément un « urbain convaincu ». Son équilibre personnel s’inscrit entre ces deux univers. Il s’interroge sur la nature, les lieux transformés (parfois en bien ou aussi en moins bien) par l’homme. Entre nature et urbanité oscille son travail de « Subimpression » tout en évitant l’idée de camouflage. Eléments végétaux, minéraux...mais aussi la modernité, la civilisation créée au passage de l’homme traversent, transfigurent ses portraits. Mystère, inquiétante étrangeté d’êtres hybrides où le visage se devine sous les traits du photographe. Entre bio et bionique, un travail d’une profonde humanité et poétique. »
Antigone Schilling, Paris 2009, extrait du Catalogue de l’exposition, Galerie Acte 2, Paris, 2009.
© Philippe Assalit
Photographies et vignette © Philippe Assalit