Sans titre, 1954 © Vivian Maier / Maloof Collection. Courtesy Howard Greenberg Gallery, New York
Jeu de Paume / Château de Tours 25 avenue André Malraux 37000 Tours France
Véritable autodidacte, Vivian Maier (1926-2009) a cultivé un sens aigu de l’observation et de la composition. Née à New York, Maier a passé une partie de son enfance en France avant de revenir à New York en 1951 et de réaliser ses premières photographies. En 1956, elle s’installe à Chicago où elle demeure jusqu’à sa mort, en 2009.
Son talent est à rapprocher des figures majeures de la street photography américaine telles que Lisette Model, Helen Levitt ou encore Diane Arbus et Garry Winogrand. L’exposition présentée au Château de Tours par le Jeu de Paume, en collaboration avec la Ville de Tours et diChroma photography, est la plus importante exposition consacrée à Vivian Maier en France. Avec 120 épreuves argentiques noir et blanc et couleur tirées à partir des diapositives et négatifs originaux ainsi que des extraits de films Super-8 qu’elle réalisa dans les années 1960 et 1970, ce projet, conçu à partir de la collection réunie par John Maloof avec l’aide de la galerie Howard Greenberg de New York, est une première approche de l’œuvre, révélant un regard, une poésie et un humanisme hors du commun.
Les étonnantes photographies de Vivian Maier (New York, 1926–Chicago, 2009) ont été découvertes par hasard par John Maloof, en 2007, dans une salle des ventes de Chicago. à la recherche d’une documentation historique sur un quartier de Chicago, ce jeune collectionneur fit alors l’acquisition d’un lot considérable d’épreuves, de négatifs et de diapositives (dont une grande partie non développée) ainsi que des films Super-8 d’un auteur inconnu et énigmatique. Personnalité discrète et solitaire, Vivian Maier a, en effet, réalisé plus de 120 000 prises de vue et produit en trente ans une œuvre conséquente qu’elle n’a montrée à personne, ou presque, de son vivant.
Sans titre, sans date © Vivian Maier / Maloof Collection Courtesy Howard Greenberg Gallery, New York
Pour gagner sa vie, Vivian Maier fut gouvernante d’enfants. Un appareil autour du cou (d’abord des appareils type box ou folding, puis un Rolleiflex et un Leica), elle consacra ses loisirs et ses moments de repos à arpenter et à photographier les rues de New York puis de Chicago. Les témoignages des enfants dont elle s’est occupée la décrivent comme une femme cultivée, ouverte d’esprit, généreuse mais peu chaleureuse. Ses images, quant à elles, montrent une réelle curiosité aux choses du quotidien et une profonde attention aux passants qui croisèrent son regard : les physionomies, les attitudes, les tenues et les accessoires à la mode pour les plus aisés ou encore les signes de pauvreté pour les plus démunis.
New York, état de New York, sans date © Vivian Maier / Maloof Collection Courtesy Howard Greenberg Gallery, New York
Si certains clichés ont été pris à la sauvette, d’autres rendent compte d’une véritable rencontre avec les individus qu’elle a photographiés frontalement et à faible distance. C’est d’ailleurs avec une évidente empathie qu’elle s’est s’intéressée aux sans-abris et aux marginaux, signant ainsi de troublants portraits dans une Amérique pourtant en plein essor économique.
Vivian Maier meurt dans l’anonymat, en avril 2009, après avoir été recueillie et hébergée par la famille Gensburg pour laquelle elle avait travaillé pendant près de dix-sept ans. Une grande partie de ses biens ainsi que l’intégralité de sa production photographique avait auparavant été déposées en garde-meuble puis saisies et vendues, en 2007, pour honorer des impayés. Sa biographie est à présent partiellement reconstituée grâce aux recherches et aux interviews menées après la mort de la photographe par John Maloof et par Jeffrey Golsdtein, autre collectionneur qui fit l’acquisition d’une part importante de son œuvre. Les sources administratives indiquant ses origines austro-hongroise et française, ses différents voyages en Europe, en France principalement (dans la vallée du Champsaur en Hautes-Alpes où elle passa une partie de son enfance) mais aussi en Asie et aux états-Unis ont clairement été identifiés et répertoriés. Mais les circonstances qui l’ont menée à la photographie et son parcours d’artiste restent encore aujourd’hui à découvrir.
Sans titre, Chicago, Illinois, août 1976 © Vivian Maier/Maloof Collection, Courtesy Howard Greenberg Gallery, New York
Plus qu’une passion, la photographie apparaît chez elle comme une nécessité voire une véritable obsession : se sont accumulés dans les cartons qu’elle emportait à chaque changement d’employeur, à chaque déménagement, l’impressionnante quantité de films qu’elle n’a pas développés, faute d’argent, ainsi que des archives composés de livres ou de coupures de presse relatant des faits divers.
L’œuvre de Vivian Maier met en lumière des détails anodins, trouvés au hasard de ses promenades, décrivant l’étrangeté des gestes, la singularité des figures et la distribution graphique des corps dans l’espace. Elle a également exécuté une série d’autoportraits saisissants, reflets d’elle-même mis en scène par l’intermédiaire de miroirs ou de vitrines de magasins.
Photos et vignette © Vivian Maier/Maloof Collection, Courtesy Howard Greenberg Gallery, New York