Tar & Feathers, Selfportrait, 2012 Chromogenic Print Courtesy Galerie Rabouan Moussion © Erwin Olaf
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Erwin Olaf est né en 1959 à Hilversum aux Pays Bas. Il vit et travaille à Amsterdam depuis le début des années 1980.
Avant d’enchaîner les portraits mondains, le fauve Van Dongen peignait les bordels de Paris. Avant d’immortaliser les collines paisibles du Somerset, le grand reporter Don Mac Cullin photographiait les horreurs de la guerre.
Le temps de la maturité, pour certains artistes, devient le temps de la réflexion et de la mise à distance des anciens démons. Erwin Olaf pourrait bien être de ceux-là. S’il a démarré sa carrière sous les sulfureux patronages de Robert Mapplethorpe, d’Helmut Newton et de Joel-Peter Witkin, il s’est fait connaître des collectionneurs, vingt ans plus tard, lorsque que les thèmes du deuil, de la perte et de la solitude l’avaient transformé en un photographe assagi, épris de mélancolie. L’artiste qui autrefois recherchait l'impact direct de l'image, jusqu’à la crudité parfois, est devenu un virtuose de la photographie allusive.
Pour ceux qui ont découvert l’œuvre d’Erwin Olaf lors des dix dernières années, il est difficile d’imaginer que les anormaux, les difformes, les obèses, les clowns, les drag queens et les gitans ont été ses premiers héros. Les vingt premières années de sa carrière, il les a glorifiées avec une énergie et un culot peu communs. Il pratiquait alors un noir et blanc contrasté ou recourait à une palette de couleurs très vives, proche de la chromie publicitaire.
Contrairement à ses toutes dernières séries, nimbées d’une clarté presque arctique, les séries anciennes confrontaient les personnages à de scabreuses ténèbres. Figures-clefs du panthéon alternatif d’Olaf, les clowns ont fait l’objet de deux séries très élaborées, dès 2001.
Freimaurer Loge Dahlem, 22 avril 2012 © Erwin Olaf
Dans «Paradise The Club», des clowns démoniaques se livrent à toutes sortes de turpitudes, sur fond de fête orgiaque. Cette série est née à la suite d’une grande soirée sur le thème du cirque organisée par le photographe dans le temple de la pop, le « Paradiso », à Amsterdam. Frappé par « l'horreur et la décadence de la vie nocturne », Erwin Olaf a abouti son projet quelques temps plus tard lorsqu’il a découvert, au musée du Prado, le tableau de Rubens intitulé « Le viol de Hippodamia ». Il a conçu alors six images au vitriol, des scènes à grand spectacle, six tableaux de débauche et de crime qui agressent l’œil autant que l’esprit. Mais comme l’écrit Jean Cocteau, « les spectacles les plus grossiers, les plus agressifs, contiennent un ange qui s’échappe ». Dans la série qui a suivi, « Paradise portraits », les clowns ont soudainement gagné en humanité. Cadrés en gros plan, leurs masques de démons sinistres ou de Pierrot lunaires forment une galaxie chavirante. Les maquillages coulent, laissant paraître les défauts de la peau, les rides, les signes de la sénescence et du pathétique. « Paradise The Club » et « Paradise portraits », réalisés en 2001, figurent une sorte d’apocalypse, et mettent un terme au cycle des œuvres ouvertement provocatrices. En 2003, Erwin Olaf entreprend « La
Séparation » et s’engage, comme il l’avoue lui-même, dans la seconde partie de sa vie. Les neuf images de cette série sont encore plongées dans les ténèbres mais le photographe y aborde pour la première fois le thème de la solitude ontologique et met en scène l’impossible union entre une mère et son fils.
Dans « Séparation », la mère, juchée sur de très hauts talons, est entièrement revêtue d’une seconde peau en latex noir, tout comme son petit garçon. Cette combinaison asphyxiante n’évoque pas les fantasmes du sadomasochisme mais le dénuement de corps séparés du monde extérieur. Les yeux de la mère sont opacifiés, tandis que ceux de l’enfant sont grand ouverts, en quête d’un regard échangé qui ne viendra jamais. Privés de regards, privés de toucher, mère et fils en sont réduits à se tendre vainement les bras, dans un décor domestique plongé dans la nuit.
Tout comme son contemporain Gregory Crewdson, Erwin Olaf réalise ses photos en studio, grâce à une armée de décorateurs, de maquilleurs et de stylistes. Quatre-vingt dix pour cent de ses images sont réalisées dans son grand atelier d’Amsterdam. Cent pour cent de ses photos, jusqu’à sa toute dernière série Berlin, dont certaines scènes se déroulent en extérieur– figurent des intérieurs coupés du monde, comme si le photographe mettait à jour les secrets d’une boite close qui pourrait bien être sa propre boite crânienne.
Stadtbad Neuköln, 23 avril 2012 © Erwin Olaf
À première vue, Erwin Olaf agit davantage en metteur en scène qu’en photographe. Chaque image est soigneusement scénographiée, comme un plan de cinéma. Les lumières sont toutes artificielles et le photographe a ajouté un dos numérique à son Hasselblad pour pouvoir contrôler chacune de ses prises de vue. Les décors font l’objet de longues recherches documentaires, et se signalent par des raffinements d’une précision maniaque. Les prises électriques ou les plinthes d’appartement sont reconstituées avec le même soin que la couleur des papiers peints ou le design des lampes. Chaque modèle fait l’objet d’un casting drastique.
Mais derrière la facture apparemment froide et léchée de ses photos, par - delà le souci évident de tout maîtriser, il y a chez Erwin Olaf ce goût de l’imprévu qui lui permet de contourner in extremis les clichés. Loin d’être prisonnier de la lourdeur de sa machinerie, de l’inertie de son décor, Erwin Olaf reste un œil aux aguets, un photographe à même de recevoir les dons du hasard. Il n’opère finalement pas si différemment d’un Henri Cartier-Bresson qui attend l’« instant décisif », et prône la nécessité de « mettre sur la même ligne de mire la tête, l'œil et le cœur. » À cet égard, pour reprendre la boutade de Jean-Luc Godard, l’ambition d’Erwin Olaf n’est pas de fabriquer « juste une image », mais bien au contraire « une image juste ».
L’esthétisation à outrance de ses dernières séries peut en agacer certains. Distinction des personnages, élégance des habits, sophistication des coiffures, douceur des lumières, luxe des décors et du mobilier : dans les séries emblématiques réalisées depuis 2004, tout concourt en effet à l’agrément de l’œil. Les tirages eux–mêmes, d’une netteté quasi irréelle, constituent de véritables objets du désir, propres à décorer les salons bourgeois dont Georges Perec a dressé l’archétype dans son roman « Les Choses ».
Mais la beauté, chez Erwin Olaf, n’est pas le signe du partage et de l’harmonie entre les humains. Elle est au contraire un facteur tragique d’isolement. De même que l’argent ne fait pas le bonheur, le beau ne suscite chez lui ni partage ni communion entre les êtres. C’est ce paradoxe qui recharge les images d’Erwin Olaf en émotion et en humanité. Dans toutes ses œuvres de la dernière décennie, les personnages sont seuls ou pire, ils s’ignorent. Nul contact physique, nul magnétisme charnel. Les mères de « Dawn » (2009) et de « Dusk » (2009) sont coupées de la relation avec leurs enfants. Quant à la série « Séparation » (2003), qu’Erwin Olaf considère comme l’œuvre séminale des années 2000, son titre à lui seul est éloquent.
La série « Le dernier cri » (2006) combine le portrait de deux précieuses ridicules, déformées par la chirurgie esthétique et placées en regard de végétaux si lisses qu’ils en paraissent factices. Les végétaux, toujours disposés dans des vases d’un grand raffinement, sont omniprésents dans les dernières séries d’Erwin Olaf. Ils ne signalent pas l’opulence et la volupté comme les bouquets profus des maîtres de l’âge d’or Hollandais.
Erwin Olaf, au contraire, prend soin d’élaguer les branches et les feuilles de ses compositions florales qui deviennent de véritables objets sculpturaux. Coupés de l’idée même de nature, ces végétaux inertes, proches de l’anémie, allégorisent la rigidité et le puritanisme d’un monde où tout excès de sentiment est banni. On est loin ici des « Fleurs du mal » de Mapplethorpe, charnelles et vénéneuses, plus près de l’ikebana japonais qui valorise l’arrangement graphique. Erwin Olaf n’hésitait pas autrefois à exhiber ses fantasmes et à violenter notre regard. Ces derniers temps, il a savamment mis en scène les non-dits de la société occidentale. En nous conviant désormais à libérer nos propres chimères, il reste le maître des interdits. Natacha Wolinski
Tar & Feathers, Selfportrait, 2012 Chromogenic Print Courtesy Galerie Rabouan Moussion © Erwin Olaf
BERLIN
En 1989, après la chute de l'intransigeant Eric Honecker en République démocratique allemande, le mur de Berlin est finalement tombé. Il est difficile de se remémorer cette époque qui fut un moment d'espoir et d'euphorie. Plusieurs centaines de jeunes se sont rendus en Allemagne afin d'être présents pour ce moment historique. Tous désiraient assister à ce que la multitude ressentait comme une aube nouvelle. Un commerce de tessons gaudiens de béton armé, des morceaux du mur peints à la bombe, a alors émergé. Le mur avait été un symbole important - de la répression et de la séparation et de la Guerre Froide - et sa chute fut également hautement symbolique.
Pas seulement en Allemagne. 1989 fut l'une de ces années cycliques, comme 1968 ou 1830, où le monde prend une nouvelle bouffée collective de liberté. En Pologne, le mouvement Solidarité de Lech Walesa atteignit son point culminant, obligeant le gouvernement à organiser des élections qui auront lieu en 1990. Glasnost et Perestroïka poussèrent l'Union soviétique toujours plus près de la rupture, qui arriva finalement en 1991. En Afrique du Sud, il était clair que Nelson Mandela allait bientôt être libéré, ce qui fut le cas au début de 1990. Cela semble déjà si loin. Et pourtant, cette grande respiration collective se mua en un soupir. De grands
changements avaient été mis en branle, mais de grands projets allaient également rester inachevés.
En Allemagne, la réunification fut plus douloureuse et beaucoup plus lente qu'on ne l'avait imaginé. Berlin, à la tête de la plus grande économie de l'Europe, aurait pu s'attendre à être la capitale d'une nouvelle Europe unie en 2013, élargissant son rôle de puissance économique à celui de promoteur social et environnemental. Si cela est bien en train de se produire, c'est à un rythme digne de l'ère glaciaire et par un chemin parsemé d'obstacles. Certes, l'euphorie n'est pas la première humeur qui caractérise l'esprit des Européens en ce début 2013.
Dans les années 1990, quand tout cet espoir était encore frais, Berlin devint la « capitale créative » de l'Europe. Une scène de fête en plein essor, exagérément décrite comme « underground », qui attirait les artistes en grand nombre. Curieusement, cependant, cette explosion ne produisit presque rien de vraiment durable. Nous pouvons déjà entrevoir que le Berlin
de cette période ne soutient pas la comparaison avec le Paris des années 1930, ou le New York des années 1950. Une nouvelle fois, la bouffée d'air collective se dissipait, et surtout l'occasion était perdue.
C'est dans ce contexte que s'inscrit la nouvelle série d'Erwin Olaf. Berlin est une grande ville moderne et performante. Mais elle est aussi un symbole, riche en contrastes d'ombre et de lumière. Dans la psychologie de Berlin, le Temps des Lumières et la République de Weimar se côtoient. Mais Sachsenhausen, le principal camp de concentration, est à moins de quarante kilomètres.
Olaf est de la génération qui a connu de très bons moments à Berlin dans les années 1990. Il le dit lui-même, il a participé à toutes les fêtes où il fallait être. Revisiter Berlin aujourd'hui, revient à comparer ce que cette génération espérait voir se produire avec ce qu'elle a effectivement accompli. C'est une coïncidence qu'Olaf revisite Berlin au même moment que David Bowie, dont le premier single depuis dix ans (« Where are we now?»), se référant au Berlin qu'il connaissait dans les années 1970, est paru en janvier 2013. Pour les deux artistes, le travail consiste à faire le point. Qu'est-il arrivé à cette nouvelle capitale européenne que nous pensions voir éclore ? Le ton de l'artiste Bowie, plus âgé, est résolument élégiaque, une complainte. Celui d'Olaf est plus complexe.
Les photos forment des tableaux, des moments soigneusement imaginés ancrés dans le présent, mais ressassant incontestablement le passé. Un groupe de portraits représentant les acteurs de ces scènes se distinguent: ils sont contemporains, se réfèrent au présent. Un couple d'autoportraits d'Erwin Olaf lui-même semble péniblement faire une allusion à l'avenir. Olaf se plaint, en effet, d'un manque de souffle. Ce n'est pas un hasard s'il s'est lui-même photographié, soit dans la contemplation anxieuse d'un escalier ou en plein effort à mi-parcours: on a l'impression que les choses deviennent plus difficiles pour Olaf. Et il a l'humour et l'honnêteté de le reconnaître. Comme il me l'a dit l'autre jour, s'il voulait être riche, il pourrait refaire encore et encore les mêmes vieilles photos. C'est exactement ce que font beaucoup de photographes. Mais Erwin Olaf veut continuer à se surprendre, même si cela implique un grand effort personnel.
On pourrait voir Berlin comme un opéra. Nous y retrouvons les grands éléments de l'histoire, qui, tels des morceaux de légende ou de mythe ou d'histoire biblique, composent les intrigues de l'opéra. En voici quelques-uns: la Neue Sachlichkeit (la Nouvelle Objectivité, une désignation par l'histoire de l'art du réalisme le plus cru de peintres comme Otto Dix ou Christian Schad).
Voici l'immeuble où John Kennedy s'est qualifié lui-même de Berliner (« Je vous demande donc de regarder par-dessus les dangers d’aujourd’hui vers les espoirs de demain, de ne pas penser seulement à votre ville et à votre patrie allemande, mais d’axer votre pensée sur le progrès de la liberté dans le monde entier. »). Ici encore, un rappel difficile à ignorer du grand Jesse Owens, qui, en déchaînant les applaudissements aux Jeux Olympiques organisés par Hitler en personne, faisait un pied-de- nez au racisme du chancelier. Et voici la subculture propre aux clubs de duel : on y voit un gamin qui a l'air mal à l'aise comme une recrue enthousiaste de la jeunesse hitlérienne, avec ses cheveux gominés et ses gants de cuir noir. Ces références sont des plus concrètes mais pas déployées avec un objectif précis. Olaf s'en sert pour nous guider à travers une palette d'humeurs, exactement comme le fait l'opéra. Nous n'avons pas besoin d'un récit exact parce que nombre de ces références historiques sont très claires. Au lieu de cela, nous obtenons un ensemble de photos simplement imprégnées de Berlin. Olaf est un perfectionniste. Cela lui a été particulièrement utile en tant que photographe commercial, et nous en avons suffisamment de preuves ici. Son éclairage, en particulier, est élaboré dans les moindres détails. Pourtant, dans une zone particulière, il s'octroie le luxe de l'imprécision. Cette zone est celle que la plupart des photographes cherchent à identifier immédiatement : la question du sens.
Portait 08, 10 juillet 2012 Fuji Crystal Archive Digital Paper Courtesy Galerie Rabouan Moussion © Erwin Olaf
Aucune de ces images n'ont de signification particulière. Elles nous entraînent dans une « Stimmung » (une atmosphère) qui est suffisamment vaste pour justifier plusieurs relectures des images et nous maintenir, nous les spectateurs, intéressés. Ce ne sont pas des photos que vous pouvez simplement « saisir » puis partir. Et deux d'entre elles sont si parfaitement étranges qu'elles relèvent la saveur de toute la série. Un homme en déguisement d'obèse disparaît par l'escalier privé du chancelier dans le stade olympique. Ni son visage, ni ses gestes ne nous disent qui il est, ni ce qu'il pourrait être en train de faire. Il n'est qu'une simple parodie de la joie, disparaissant. Une image plus complexe montre une femme masculine ou un homme efféminé sur un plongeoir, tenant un pli cacheté.
Encore une fois, aucun indice ne nous dit ce qui se passe. Ce sont des images merveilleuses, et elles sont typiques d'Erwin Olaf, qui a déjà souvent réalisé des photos où en ne disant rien, il disait tout. Sa grande série Grief (Chagrin) de 2007 était de cette veine: l'humeur devenait plus lourde et plus dense image après image, mais sans aucune suite logique ni conclusion permettant d'en déduire une histoire. Dans Berlin, une sorte de Dadaïsme sournois n'est jamais très loin. Les portraits sont plus simples que les tableaux, mais pas si simples non plus. Qui photographie les acteurs dans leurs rôles lorsque ces rôles ne sont pas définis ? C'est dans les portraits que nous entrevoyons un autre élément de la série des plus clairement: Erwin Olaf a élaboré une tension entre les jeunes et les vieux qui sous-tend l'ensemble de l'œuvre. Est-ce le passé contre l'avenir, comme dans un simple match de football ? Ou bien est-ce que la jeune génération revendique désormais une place qu'elle n'a jamais eue ? Il y a des années, nous avons fait des jeunes un « marché » en orientant toute la production sur eux. Mais aujourd'hui, ils réclament l'autonomie qui va avec, la liberté de prendre leurs propres décisions, même si celles-ci impliquent l'outrage aux anciens. Ces questions ne sont probablement pas plus visibles à Berlin qu'ailleurs - sauf qu'à Berlin les actions des générations précédentes ont eu des conséquences si évidentes que même un enfant peut les juger. Olaf nous montre des enfants prenant le contrôle. C'est énervant, mais pas injuste. C'est généreux de la part d'Erwin Olaf de ne pas donner trop de détails sur ces images. Il faut du courage pour dire : « J'ai fait cette photo, mais je ne sais pas ce qu'elle signifie précisément ».
Elles sont une exploration, non une thèse. Nous sommes invités à nous y joindre. Certaines de ces images sont des impressions carbone, un écart de la part de l'artiste. En partie, cela signifie simplement que ce ne sont pas des impressions numériques. Les plaisirs d'une belle surface sont rarement présents avec des impressions numériques. En partie, aussi, c'est une reconnaissance des compétences artisanales qui sous-tendent l'imagination du photographe.
Erwin Olaf est un grand artisan. Le fait que d'autres le voient aussi comme un très grand artiste n'est pas en cause: mais réaliser des impressions carbone aussi réussies que celles-ci, démontre un niveau de maîtrise pratique qui est déjà hors de portée de la majorité, sans même aller jusqu'au choix du sujet.
Nous avons là une série puissante, riche en sédiments. Par exemple, il fut un temps où Berlin exportait ses photographes. Un certain nombre d'entre eux intégrèrent l'équipe du Picture Post en Angleterre, sous la direction de Stefan Lorant, lui-même un produit exilé de l'industrie du film berlinoise. Peut-être la plus belle exportation entre toutes fut celle d'Erwin Blumenfeld, qui quitta Berlin pour la Hollande (avant d'abandonner définitivement l'Europe et se faire un nom comme le plus grand photographe de mode d'avant-garde à New-York). J'aime l'idée du photographe néerlandais Erwin Olaf parcourant ce chemin en sens inverse.
Berlin est un pèlerinage, ou plutôt un témoignage d'honneur et de respect.
Francis Hodgson Critique photo, Financial Times
Traduction: Karin Py