© Elger Esser
Galerie Photo du Pôle Image Haute-Normandie 15 rue de la Chaîne 76000 Rouen France
Avec l’aide du Pôle Image Haute-Normandie, le photographe allemand Elger Esser, né a Stuttgart en 1967, s’intéresse depuis 2010 aux jardins de Claude Monet à Giverny. Ce spécialiste de la photographie de paysage, élève de Bernd Becher à la Kunstacademie de Düsseldorf jusqu’en 1997, possède une passion pour la culture française et ses lieux évoquant À la recherche du temps perdu de Marcel Proust. Collectionneur d’images, de livres et de cartes postales, Elger Esser intitule d’ailleurs « Combray » une partie de ses photographies en référence aux descriptions de paysages données par Proust dans son grand œuvre. De nuit, le photographe allemand a enregistré avec de longs temps de pose, sur ses plaques grand format, l’atmosphère du jardin japonais conçu à Giverny par Claude Monet comme un motif pour sa peinture. Le plus souvent en noir et blanc, parfois à la lumière de la lune, Esser a laissé les arbres, les reflets, les ombres inscrire dans la matière photographique la magie de ce lieu hors du temps.
Exposition programmée dans le cadre du festival « Normandie Impressionniste »
La résidence de Elger Esser initiée en 2010 avec l’aide du Pôle Image Haute-Normandie a bénéficié du soutien du ministère de la Culture et de la Communication / DRAC Haute-Normandie. Un livre accompagne l’exposition : «Nocturnes à Giverny» photographies de Elger Esser, Schirmer / Mosel, Munich, 2012. Elger Esser est représenté en France par la galerie Thaddaeus Ropac, Paris
Une charmante passerelle japonaise surplombe l’étang aux nymphéas ; les saules et les iris d’eau jalonnent la rive et la lumière joue dans l’épais feuillage des arbres – c’est ainsi que Claude Monet (1840-1926), le plus fameux des impressionnistes français, a peint son jardin, qu’il a lui-même créé dans les années 1880-1890 à Giverny, un village de Haute-Normandie. Depuis, Giverny est devenu un lieu de pèlerinage pour les artistes, historiens de l’art et amateurs de jardins – et pour un photographe comme Elger Esser, qui porte un regard tout particulier sur les beautés qu’offrent les paysages de la culture française. Fait intéressant, c’est en noir-et-blanc, au crépuscule ou à la lumière de la Lune, qu’il a photographié les enchantements de fleurs et d’eau dans le jardin de Monet. La magie du lieu préservée – s’y ajoute un élément aussi irrationnel que l’invocation d’une époque révolue, un rêve d’artiste qui existe à présent depuis déjà plus de cent ans.
(Hubertus v. Amelunxen, quatrième de couverture du livre « Nocturnes à Giverny » photographies de Elger Esser, Schirmer/Mosel, Munich, 2012.)
© Elger Esser
La nuit les lumières volent au petit bonheur et la nature se dépose dans les plis du temps. Aveuglé, de jour, par la lumière, l’oeil cherche à s’habituer à la pénombre jusqu’à ce que les choses réapparaissent, donnant naissance à un espace dont les limites demeurent incertaines et que chaque nouvel avènement renforce l’incertitude, nous poussant à deviner ce que nous avons laissé derrière nous et ce que nous avons face à nous, en perspective.
De l’artiste Elger Esser, on pourrait croire qu’il a plongé ses images dans d’autres temps qu’elles n’ont donc rien de contemporain, ne portent pas cette « estampille du temps présent » dont l’empreinte promet un futur. On pourrait penser qu’au contraire ce sont des temps révolus qui émergent d’elles, ces grands paysages et ces grandes vedute photographiques, que si ces vues sont lointaines au point d’englober un présent, notre temps actuel, c’est une manière tout au plus onirique, c’est-a-dire faisant abstraction du présent. À cette idée je réponds qu’Esser n’est pas un photographe pratiquant la peinture – nous touchons ici au pittoresque –, mais qu’il est, parmi les artistes plasticiens, l’un de ceux qui travaillent avec l’écriture. Et le fait qu’il écrive avec de la lumière justifie qu’il ait choisi le média de la photographie. S’il avait fallu un parrain pour justifier cette décision, on pourrait en outre se référer à cette phrase sans ambiguïté de Paul Valéry selon laquelle on devrait arrêter d’écrire avec de l’encre ce qui s’inscrit de soi-même avec des nitrates d’argent. Les images d’Elger Esser sont imprégnées de temps, mais d’un temps qui place l’instant dans le temps, dans une durée où le présent apparaît comme passé, où le passé semble présent et ne trouve pas de fin.
(Hubertus v. Amelunxen, Texte extrait du livre «Nocturnes à Giverny» photographies de Elger Esser, Schirmer/Mosel, Munich, 2012.)
© Elger Esser
Photographies et vignette © Elger Esser