© Horric Lingenheld
La résidence de France de Stockholm 26 de l'avenue Narvavägen Stockholm Suède
Cette série de portraits a été réalisée sur une période d´un an, à Stockholm, entre 2011 et 2012.
En venant vivre en Suède, découvrir la ville c’était aussi vouloir rencontrer ses habitants. Il existe toujours quelque chose d’exotique à photographier à l’étranger comme si l’on voulait vérifier ses préjugés. Ceci dit, sans aller jusqu´à devenir Suédois, mon regard sur la ville de Stockholm a peu à peu changé car je n’étais plus simplement de passage : J´y résidais. Ce projet est venu d’ailleurs plusieurs mois après mon installation, après deux déménagements, après avoir connu l’été comme l’hiver, la nuit comme la neige et surtout ce soleil de mars ou la lumière de l’été en juin. Très vite, mon affection s´est portée plus particulièrement sur certains quartiers, certaines places, certaines îles ou même certains versants exposés plein sud.
Une typologie vestimentaire, aussi, m´est apparue et m’ a permis de reconnaître les gens habitant l’île de Södermalm, de Kungsholmen ou plus encore d’Östermalm. Sans entreprendre un travail aussi méticuleux que le travail d’un ethnologue, je me suis fixé un certain protocole afin de confirmer ce qui me fascinait dans cette ville. En me référant au travail d’August Sander et à celui d’Eugène Atget, je souhaitais installer un vrai rapport frontal, en pied, avec les personnes, comme on peut le faire en photographie d’architecture où le grand format rime avec lenteur et précision. Non pas que j´aspirais à faire de ces portraits des monuments mais je souhaitais prendre le temps de dresser le portrait d’une ville, en choisissant méticuleusement les lieux de prises de vue, l’heure de la journée en fonction des saisons, tout en prenant le soin de changer de rue à chaque prise de vue.
© Horric Lingenheld
Ainsi, cette production s’inscrit pleinement dans la démarche documentaire d’une photographie contemporaine, où la subjectivité participe à la quête de sens, sans toutefois chercher l’anecdote et l’esthétisme d’un portrait de commande.
En voulant travailler ainsi avec cette chambre 4x5 inches sur pied, voile noire et photo à l’unité en argentique, sans éclairage artificiel, j’ai eu la chance d’être accompagné dès le début par Guillaume Delcourt. Guillaume a joué tour à tour, avec talent, les interprètes, les rabatteurs, le modèle pour préparer les cadrages, tout en se chargeant de demander l’autorisation à chacune de personnes de diffuser leur image. En effet, une fois la rue choisie, la chambre installée, le cadrage effectué, il fallait attendre le « bon modèle », homme, femme, jeune, vieux et -plus encore- celui que ce quartier, cette petite rue attendait parce que son vêtement, ses chaussures ou son allure correspondait le plus.
Si le portrait est une rencontre, le faire à grande échelle et dans la rue, impose ce rapport assez lent. Il fallait attendre parfois deux heures au même endroit pour ne réaliser qu’une vue avec le risque que le soleil ne tourne ou que la nuit ne tombe dès midi, en plein hiver. Mais quelle récompense, quand la personne surgissait au détour d’un croisement comme une évidence. Deux prises vues uniques, très peu de refus, beaucoup de gentillesse, et finalement une fierté d’avoir été choisi avec le même soin qu’ils avaient pris à s’habiller, ce jour-là.
© Horric Lingenheld
S’il existe bien une école du design scandinave, baladez-vous dans les rues de Stockholm, vous y rencontrerez ses acteurs, dont je vous livre dans ce petit catalogue, un petit extrait de la centaine de portraits réalisée en un an.
Un petit portfolio de la ville complète cette série, réalisé en moyen format durant cette même période, car certains bâtiments sont eux aussi de vrais personnages.
Photographies et vignette © Horric Lingenheld