1 franc 27 la minute © David Plion
Après 30 ans de service en France, le Minitel s’est éteint le 30 juin dernier. Ce terminal passif critiqué à l’heure du web, fut pourtant une innovation radicale adoptée par le très grand public aussi bien pour son annuaire électronique, que ses messageries roses. Aujourd’hui les artistes s’en emparent pour lui donner une seconde vie. L’exposition 36 15 DEUX POINT ZÉRO propose les oeuvres de trois artistes qui détournent, transforment et ressuscitent la boite beige, devenue obsolète.
David Plion // 1 franc 27 la minute
Ces images ont été réalisées dans les années 90. A cette époque le Minitel est en plein essor et des services d’un nouveau genre voient le jour, ceux des rencontres érotiques en ligne du 36-15 facturées à la minute. S’en suit un placardage sauvage d’affiches dites de «Minitel rose» qui inondent la banlieue périphérique de Paris. Ma démarche photographique intervenait lorsque ces affiches avaient atteint une dégradation avancée, lorsque les collages se superposaient, s’entremêlaient, se détérioraient, exposés aux variations du temps qui passe.
1 franc 27 la minute © David Plion
Je les ai parcourus au plus près pour en extraire des détails, un travail de recadrage, de composition captant ainsi un certain désespoir de ce que ces affiches vendaient au départ ; la promesse charnelle et érotique restera sous forme de fantasme... Aujourd’hui ces images sont liées à un passé technologique révolu vu sous sa forme publicitaire. Elles donnent ici à voir sa trace, sa mémoire en morceaux, comme des prélèvements rapportés d’une archéologie urbaine.
1 franc 27 la minute © David Plion
Graffiti Research Lab France // 36-15 GRL-FR
Le Graffiti Research Lab France présente une série de 8 Minitels détournés de leur usage premier. Désormais inutilisables en l’état suite à la coupure des services télématiques en juin 2012, ces machines ont fait l’objet de modifications qui leurs permettent de ressusciter sous la forme d’objets déconnectés servant à présent de cadre photo low-tech à l’esthétique et à l’affichage si particulier.
Alexandre Durand // Cheval de Troie
Alexandre Durand utilise une technique totalement obsolète et archaïque dans la représentation du minitel afin d’insister sur son aspect tout aussi archaïque et désuet aujourd’hui. Il propose une réplique en bois constituée de planches complètement pourries et infectées de Mérule. La Mérule est un champignon qui a une grosse capacité de propagation et d’infection. Elle symbolise l’aptitude du minitel à faire rentrer le réseau numérique dans les foyers français à l’époque de la domination télévisuelle. Discrètement, subrepticement avec des services qui n’atteignent pas les espérances promises (et créent une frustration qui sera assouvie avec l’arrivée d’internet), le réseau s‘insinue dans la sphère privée, qui en sera à jamais transformée. Cette boite vide se veut la représentation concrète du réseau et de la technologie virtuelle. Elle s’incruste dans le réel pour la première fois avec le minitel et amène son lot de virus et autre cheval de Troie intrusif, à première vue inoffensif et alléchant.
Cheval de Troie © Alexandre Durand