© Eric Bourret
Village des Antiquaires de la Gare 2 bis avenue de l'Egalité 84 800 L'Isle-sur-la-Sorgue France
L’ivresse des sommets
Chaque fois c’est la même chose : un éclat de lumière au centre, entouré d’une nébulosité qui peu à peu s’estompe à mesure qu’on s’en éloigne, jusqu’à sombrer dans l’obscurité.
Mais une fois qu’on a dit cela, une fois posé le principe de ce repère pour ainsi dire cartésien qui structure les images et leur donne leur sens de lecture, du centre à la périphérie, on n’a pas dit grand chose et tout ou presque reste à regarder. Ce sont alors mille détails qui s’offrent à l’œil. C’est une effloraison de formes qui, d’ailleurs, à proprement parler, ne sont pas tout à fait des formes, avec tout ce que le mot implique d’épure – de simple, donc, et de reconnaissable –, mais un entre-deux, plutôt, entre la forme et l’informe – cet absolu qui n’existe pas, sinon comme une vue de l’esprit, ou mieux de l’intellect, dernier acte possible pour lui, et quasi de démission, face à la complexité du réel –, un entre-deux, dis-je, où la prolifération des formes déjoue, précisément, notre capacité à les reconnaître comme telles – des formes –, et peut-être aussi, par conséquent, notre capacité elle-même de connaissance possible, au sens du moins d’une connaissance d’entendement. Forcé d’abandonner celle-ci, en même temps que d’abandonner le moindre souci d’utilité, ce souci qui toujours la hante, reste à s’absorber alors dans une contemplation gratuite, à s’y laisser mener, toujours, d’étonnement en étonnement.
C’est cette préoccupation pour la complexité du réel, cet émerveillement face à la richesse inépuisable des formes nouvelles que sans cesse il engendre, par-delà le répertoire des quelques formes simples et reconnaissables, toujours identiques, où nous avons trop vite tendance à l’enfermer, à nous enfermer, c’est cela, je crois, qui caractérise le mieux l’œuvre d’Éric Bourret.
On connaît ses photographies de montagnes, tantôt couvertes de neige, tantôt purement et simplement minérales (Montagne au carré, 2002-2006 ; Hun-Tun, 2005-2008 ; Lure, 2009-2010), ses photographies de végétations (Mù, 2005-2009) ou bien encore de sols (Cradle Of Humankind, 2009). Tout cela, nonobstant cette rapide tentative de classement, se mélangeant chez lui le plus souvent.
Sans qu’il faille l’y réduire, le fait est qu’il y a, dans l’œuvre d’Éric Bourret, une récurrence, une prédominance même, des photographies d’éléments naturels. La série qu’il propose ici, des photographies de ciels – ou faut-il dire de cieux ? –, n’y déroge pas.
Dans un article publié en 1987 dans le volume 43, numéro 2, de la revue Laval philosophique et théologique, consacré à la question de savoir si la conception du ciel chez Aristote est encore influencée ou non d’éléments issus des mythes grecs, Richard Bodéüs souligne, en introduction, combien il est frappant de constater que le mot ciel, jadis d’usage fréquent dans l’une et l’autre, a complètement disparu du vocabulaire de la science et de la philosophie. Tandis qu’elles lui préfèrent désormais celui d’espace – ce changement dans les termes étant bien sûr aussi un changement dans la manière de penser –, le mot ciel, note encore Richard Bodéüs, ne demeure plus guère aujourd’hui que l’apanage des dévots, « fidèles à la lettre des vieilles Écritures », de l’homme de la rue, « dont les façons de parler échappent à toutes les réformes », ou du poète.
C’est ce dernier point de vue, celui du poète, qu’adopte en effet Éric Bourret lorsqu’il décide, non pas en l’occurrence de parler du ciel, mais de le photographier. Un acte qui vaut bien l’autre, à vrai dire, au niveau de la prise de risque : on s’expose au moins autant, ce faisant, à passer pour un ringard ou un naïf à l’aune des progrès de la science et de la philosophie qu’il est convenu d’appeler contemporaines. Pourtant, ce n’est certes pas avec naïveté ni avec ringardise qu’Éric Bourret pointe, quant à lui, l’objectif de l’appareil dans cette direction. Tout au contraire : comme c’était déjà le cas tout à l’heure, lorsqu’il s’occupait de montagnes, de végétations ou de sols, c’est en tant qu’il est mû par une certaine idée de la nature, de l’ordre tout à la fois de l’intuition et de la réflexion, qu’il décide ici de photographier le ciel. Que cette idée de la nature le décale par rapport à la science et à la philosophie contemporaines, au monde d’objets et de représentations d’objets qu’elles déterminent, il en a, du reste, pleine et entière conscience. Bien mieux, c’est, en un sens, l’effet recherché : il s’agit justement, pour lui, de voir, ou de revoir, ce que, dans ce cadre, on ne voit plus. Ou pour mieux dire : il s’agit justement de le ressentir et, par le moyen de ses photographies, de le faire ressentir.
Quelques précisions s’imposent, dès lors, sur ce moyen lui-même : sur les protocoles exacts qu’il met en place au cours des prises de vues, ainsi que sur l’esthétique des résultats qu’il obtient.
Les photographies d’Éric Bourret sont le fruit d’une véritable ascèse, au sens grec de l’askesis : elles sont le fruit d’un exercice. Il a fallu, pour les prendre, se mettre dans des conditions particulières, extraordinaires en ce que, stricto sensu, elles sortent de l’ordinaire.
C’est en montagne qu’il a l’habitude de travailler. Autrement dit : dans un certain éloignement vis-à-vis du monde, du quotidien, et, si possible aussi, en altitude. Ce qui implique bien sûr que, pour y parvenir, et pour s’y déplacer, il faille longtemps marcher. Dans un tel contexte, c’est peu dire que les points de repère ne sont donc plus les mêmes : points de repère culturels aussi bien que physiques. On est forcé de voir, de sentir différemment.
Pour la seconde fois, le lecteur aura remarqué que je glisse, sémantiquement, de voir à ressentir : de fait, l’expérience à laquelle se soumet Éric Bourret, l’expérience qu’il vit, ne relève pas seulement de la vision : c’est une expérience qui l’engage totalement. Et c’est une expérience totale, aussi, qu’il entend transmettre au récepteur de ses photographies.
C’est la raison pour laquelle, je crois, il apporte tant de soin à l’élaboration esthétique de celles-ci : les tirages sont toujours de grands formats (ils font ici 150 par 180), que l’utilisation d’un boîtier 6 x 7 lui permet d’obtenir sans perdre pour autant en qualité de résolution. Or on comprend aisément l’intérêt que présentent pour lui de telles dimensions : elles permettent une double lecture des photographies. Une fois passé le premier contact qu’on a avec elles dans la distance, et qui n’est un contact que visuel, demeure encore la possibilité, lorsqu’on s’en approche, d’être absorbé par elles, en elles, et cette fois c’est avec tout le corps, dans la contemplation de leurs détails, tous points de repère abolis. Mais à ce jeu qu’induisent toujours chez lui le grand format et la qualité de résolution s’ajoutent encore, dans la présente série, l’effet de matière, densité et volatilité, ainsi que l’effet de profondeur d’image si particuliers liés au choix du support diasec. J’ai parlé, pour commencer, d’éclats de lumière et de nébulosité. J’ai ensuite parlé de ciels. Mais à vrai dire, à bien regarder ces photographies, de plus près, on ne sait plus trop de quoi il s’agit. Sont-ce vraiment des ciels ? Ne s’agit-il pas plutôt de reflets dans l’eau ? Et ces éclats, qu’on remarquait tout à l’heure au milieu, sont-ce ceux du soleil ou ceux de la lune ? Mais qu’importe au fond tout cela ? Ce dont il s’agit ici, n’est-ce pas, plutôt que ces termes qui appartiennent trop encore au registre classique du paysage, de ce que j’appelais tout à l’heure du nom volontiers plus indistinct d’éléments naturels ? Ne s’agit-il pas de se laisser aller à l’infinité et à l’indéfinité des formes complexes, et inconnues, par-delà les formes simples et connues ? Ne s’agit- il pas de se hisser, ou de descendre – la hiérarchie se perd –, à ce degré de l’être où les substances ne sont plus substances, mais se dissolvent et passent les unes dans les autres ? N’est-ce pas cela, surtout, cette incertitude, cette mouvance incessante, cette instabilité, mais aussi du même du coup cette richesse de la nature, de l’être, qu’Éric Bourret cherche à capter et à restituer dans ses photographies ?
Il n’y a peut-être pas de hasard, j’y songe maintenant, à ce qu’Éric Bourret confesse une prédilection pour l’Asie comme terrain de recherche. Bien sûr, il y a, à cela, des raisons qu’on pourrait qualifier de techniques. Les chaînes de l’Himalaya lui offrent à merveille les conditions qu’il réclame : l’éloignement vis-à-vis du monde ainsi que l’altitude, sans qu’il lui faille pour autant délaisser la marche au profit de l’escalade. Mais s’y ajoutent peut-être d’autres raisons, tout aussi déterminantes, encore que moins pondérables : quelque chose de l’ordre d’une affinité en matière de philosophie. Sans s’aventurer ici dans une théorie des climats, il n’est peut-être pas indifférent en effet que ce soient ces mêmes lieux, jadis, qui aient vu naître la philosophie bouddhiste. Ou que ce soit en Asie toujours, même si c’est à l’autre bout, en Ionie, que les premiers physiciens, comme le notait déjà Proclus, aient fait leur apparition : Thalès, Anaximandre ou Héraclite. Deux écoles, bouddhiste et ionienne, qui placent la mutabilité de l’être, la transmutation de la matière au coeur de leur recherche et dans la proximité desquelles résonne singulièrement, harmoniquement pour ainsi dire, l’œuvre d’Éric Bourret. De sorte qu’il n’est guère surprenant, au fond, qu’il se sente chez lui là où elles sont nées et se sont développées.
À parler ici d’Héraclite, ce penseur par excellence de la mutabilité de l’être, me vient, alors qu’il serait temps de conclure, une ultime comparaison, à prolonger encore un peu le jeu des parentés. Comparaison avec un autre marcheur, de l’aveu même de qui Héraclite était ce qui lui ressemblait le plus « au milieu de tout ce qui a jamais été pensé » : je veux parler de Nietzsche. Tout comme les textes de Nietzsche nous y exhortent, l’œuvre d’Éric Bourret, en effet, ne nous invite-t-elle pas surtout, par-delà les formes du déjà vu et du prévu, à essayer de voir, ou plutôt de ressentir la vie, fût-ce pour un instant seulement, dans l’ivresse dionysiaque des sommets, qui est aussi celle des abîmes : en esprits libres ?
François Coadou
Professeur de philosophie de l’art à l’ESA TPM
Critique d’art (AICA)
© Eric Bourret
Eric Bourret est né à Paris le 10 mars 1964.
Il vit à Marseille, la Ciotat, dans les Alpes, en Himalaya.
www.ericbourret.com
Biographie sélective
2011
Centre d’art Le Moulin, la Valette-du-Var.
Théâtre de la Photographie et de l’Image, Nice.
Galerie DNR, L’Isle-sur-la-Sorgue.
Marche hivernale dans le massif du Mercantour.
Marche estivale sur les hauts plateaux du Changtang. Tibet et Inde.
2010
Arts on Main, Johannesburg, Afrique du Sud.
Musée Prieuré de Salagon, Alpes de Haute-Provence.
Traversée glacière automnale du Zanskar et Paldar, Inde.
Marche automnale et hivernale sur la montagne de Lure.
2009
Musée Départemental Arles Antique, RIP, Arles.
Marche hivernale sur le territoire du « Cradle of Humankind » Afrique du Sud.
Marche estivale dans la Vallée de la Cure et du Cousin, Yonne.
2006/08
Musée d’Art Moderne et d’Art Contemporain, Nice.
Traversée glacière de printemps dans le massif de la Vanoise et en Italie.
Traversée de printemps du Ladakh et Zanskar. Inde.
Marche sur le massif du Mont Blanc, France.
Marche à toutes les saisons dans les Alpes du Sud et du Nord.
2005/06
L’hôtel des Arts, Toulon.
Marche à toutes les saisons sur le littoral Varois.
Traversée glacière de Printemps, de Chamonix à Zermatt.
Marche sur les sites de Pagan, Mrauk U, Birmanie.
Traversée estivale du Ladakh et Zanskar, Inde.
Marche automnale et hivernale sur la chaîne himalayenne au Népal.
2002/04
Centre Atlantique de la Photographie, Brest.
Galerie du Château d’Eau, Toulouse.
Musée d’Aquitaine, Bordeaux.
Marche à toutes les saisons sur le sentier de halage du Canal de Nantes à Brest.
Traversée automnale du Ladakh, Zanskar et Changtang, Inde.
Marche hivernale autour du Pic Bolivar, Venezuela.
1997/01
Le Centre d’Art Informel de Recherche sur la Nature, Digne-les-Bains.
Musée Départemental, Gap.
Musée Matisse, Nice.
Marche à toutes les saisons dans le massif des Écrins.
Marche hivernale dans la Réserve Géologique de Haute-Provence.
1990/00
The Photographic Museum, Helsinki. Finlande.
Muséo do Mosteiro de S. Martinho de Tibàes, Portugal.
Le Parvis, Scène Nationale. Tarbes.
Marche dans les sites pré-islamiques En Égypte, Jordanie, Syrie, Liban et Yémen.
Marche estivale sur le littoral écossais, irlandais.
Marche automnale en Laponie finnoise et norvégienne.
Marche côtière automnale à Terre-Neuve, Canada.
1979
Découvre la photographie lors d’un stage d’astronomie dans l’Aveyron.
COLLECTIONS PUBLIQUES
The Photographic Museum of Finland, Helsinki, Finlande.
Fondazione Italiana Per La Fotografia, Turin, Italie.
Muséu da Imagen, Braga, Portugal.
Musée de L’Élysée, Lausanne, Suisse.
Musée d’Art Contemporain et d’Art Moderne, Nice. France.
Musée Picasso, Antibes, France.
Le Parvis, Scène Nationale, Tarbes, France.
Hôtel des Arts, Centre Méditerranéen d’Art, Toulon, France.
Théâtre de la Photographie, Nice, France.
Le C.A.I.R.N, Digne-les-Bains, France.
Bibliothèque Nationale de France, Paris, France.
Musée Prieuré de Salagon, Mane, France.
Fonds Départemental, Conseil général de l’Yonne, France.
Galerie du Château d’Eau, Toulouse, France.
Musée Départemental, Gap, France.
Musée d’Art et d’Archéologie, Aurillac, France.
Musée Intercommunal d’Histoire et d’Archéologie, Louvres, France.
Musée de St Dié-des-Vosges, France.
Fonds Communal, Ville de Marseille, France.
Fondation Regards de Provence, Marseille. France.
Faculté de Toulon, France.
Centre d’Études Cathares, Arques, France.
Villes de Lyon, Manosque, La Seyne-sur-Mer, La Valette-du-Var, Vitry-sur-Seine.
Direction Départementale de l’Équipement, Marseille, France.
Artothèques de Draguignan, Fos-sur-Mer, Grenoble, Nantes et Nice, France.
Coffret Hermès remis aux Chefs d’États, Conseil Européen, Nice, France.
© Eric Bourret
Dialogue Isabelle Bourgeois et Éric Bourret (Extrait)
Centre d’Art du Moulin la-Valette-du-Var, Mardi 4 octobre 2011
Exposition Excuse me while, I kiss the sky
Itinéraire d’un piéton d'altitude
Isabelle Bourgeois
Aujourd’hui, on peut dire que tu continues ton chemin d’artiste marcheur, mais cette fois en levant les yeux au ciel, en t’en rapprochant effrontément comme le confirme le titre de l’exposition, Excuse me, while I kiss the sky…
Éric Bourret
Que je photographie la terre ou le ciel, je garde les mêmes préoccupations, entre autres celle des matières des espaces traversés, sol et ciel. L'épaisseur des éléments et leur fugacité restent criantes.
La possible métamorphose de la matière nous interroge toujours. L’eau que nous pouvons percevoir dure comme de la roche, et inversement des pierres évanescentes comme les nuages.
IB / C’est l’interprétation, la révélation de cette dualité, de cette ambiguïté, qui sont l’enjeu de ton travail. Hier sur les pierres, aujourd’hui dans les nuages…
EB / C’est en me frottant corps et esprit au paysage que je fais œuvre et rends compte de la marche.
Je suis constitué des paysages que je traverse et qui me traversent. Pour moi, l'image photographique est un réceptacle de forme, d’énergie et de sens. Elle fixe les expériences, le trop comme le pas assez, excès de visible dans la série des grands panoramiques exposés au MAMAC de Nice en 2008 ou raréfaction des formes dans La série blanche présente au Prieuré de Salagon en 2010. ÀA mon sens, c’est par la mise en scène, les limites du visible que se jouent les enjeux de la photographie, sa capacité d'être « "au plus proche d'un réel en mouvement »".
IB / Mais pourquoi marcher avec tant de constance, d’insistance ? Et pourquoi marcher, si loin et si
haut comme tu le fais depuis des années ?
EB / Cela fait vingt cinq25 ans que j’allie les deux pratiques, marche et photographie. En fait, je ne peux plus les dissocier en fait. Je prépare les itinéraires à l’aide de cartes détaillées, mais la marche est une pratique très simple qui ne nécessite ni apprentissage ni technique, ni argent. Il faut juste un corps, de l'espace et du temps. En Himalaya ou dans les Hautes-Alpes, la marche invite au dépouillement. La marche peut également être un acte philosophique et une expérience spirituelle.
De plus, si tu marches durant de nombreux jours, les distorsions entre soi et le paysage emprunté s’amenuisent.
La machine photographique, quant à elle, enregistre, rend lisible l’expérience du paysage traversé. La photographie retranscrit les flux qui animent le paysage comme ceux qui animent notre propre corps.
Elle rend compte du mouvement et de la modification des corps gazeux, liquides et minéraux.
IB / Ton choix de marcheur impénitent fait que tu avances, au propre et au figuré ! Ce work in progress n’est pas étranger au fait que nous nous retrouvions en 2011, au choix de proposer cette autre étape ensemble. Et quand tu m’as parlé de cet énième voyage au Ladakh l’an dernier, du
début de ton travail sur le ciel, j’ai eu envie d’emprunter ton pas et de te mettre en mains le pari de l’exposition d’aujourd’hui.
EB / J’avais commencé ce travail au cours des deux hivers précédents sur la montagne de Lure. Une courte série de cieux énigmatiques est apparue. En fait, une forme insaisissable, sans échelle, ni haut ni bas, ponctuée systématiquement d'un point blanc au centre. Du métaphysique dans l'air ! Tu as largement contribué à poursuivre et rendre visible ce travail produit dans les « espaces illimités » qu'offrent l'Himalaya. Le Ladakh, est une terre-ciel privilégiée pour ce type d'expérience : tu marches entre 4 000 et 6 500 mètres d’altitude. Le rapport à l'espace s’en trouve largement modifié, exacerbé. On devient piéton d’altitude, « temporary nomad » comme m’ont surnommé les guides ladakhis qui m’accompagnent chaque été !
IB / Au final, dix oeuvres, montrées en grand format, parmi des centaines de clichés et des centaines
d’heures de marche.
EB / Oui, 30 jours de marche en général, durant 600 km environ, en autonomie totale. Les images choisies ont en commun d’être traversées par un éclat de lumière. Comme nous l’avons évoqué, la marche à raison de huit heures par jour, engendre physiologiquement une autre attitude à l’espace et une vraie mise en condition. Tant qu’à la fin, je ne sais plus trop si je vois avec les yeux ou avec mon corps. Le grand format propose au lecteur de l'exposition une relation physique et hypnotique.
IB /Oui, tout est là, rien de plus ni de moins que ton regard porté et « grimpé pedibus » au plus prés des nuages… D’où le titre de l’exposition, emprunté à un guitariste légendaire et à une chanson que l’on retrouvera en fouillant les vinyles des seventies !
© Eric Bourret
Vignette et photos © Eric Bourret