Pan Yue d'après Piero della Francesca © Pan Yue
Hotel Scribe 1 rue Scribe 75009 Paris France
Du 5 juillet au 5 septembre 2012, la Galerie des Nouvelles Images de l’Hôtel Scribe présente Apology to the Great Masters, photographies et art vidéo de deux jeunes artistes chinois de la génération post-révolutionnaire, Pan Yue et Wang Xiaohui. Une interrogation pleine d’humour sur l’eurocentrisme de l’art. Fils d’artistes, né en 1968, Pan Yue a étudié la peinture à l’Académie des Beaux Arts de Pékin avant de se reconvertir à la photographie.
Dans la série « Apology to the Masters », Pan Yue réinterprète les chefs-d’oeuvre de la peinture occidentale au travers de tableaux vivants joués par des acteurs réels de la troupe de l’Opéra de Pékin, mis en scène et éclairés dans les conditions d’un studio de cinéma, et photographiés par l'artiste.
d'après Manet © Pan Yue
Des éphèbes chinois interprètent ainsi le Déjeuner sur l’herbe de Manet. Il n’y a plus ni jardin ni verdure. L’action se concentre sur les personnages. La muse a les sourcils en forme de papillon de nuit, le teint pâle et poudré, le visage rougi de cinabre. Maquillée comme une courtisane, elle est assise nonchalamment sur son kimono en soie brodé, un homme tout aussi maquillé à ses côtés.
Le peintre, clown au pantalon rouge et bouffant, leur offre un verre de huangjiu ou de vin chinois évoquant les buveries de Li Po et de Du Fu, poètes de l’époque Tang. Gabrielle d’Estrées et de la Duchesse de Fontainebleau est rejoué sur un fond de soierie rouge et dorée, décorée de phénix et de dragons. Tout est érotisme, intrigue et ambiguïté.
Les portraits du duc d’Urbino Federico da Montefeltro et de son épouse Battista Sforza peints sur fond de paysage par Piero della Francesca sont transformés en mandarin et son épouse, dans un portrait de mariage aussi figé que la société traditionnelle confucéenne. Les Ambassadeurs et leurs insignes de culture et de puissance, peints par Holbein deviennent deux eunuques de part et d’autre de l’autel taoïste, maquillés de blanc tels des clowns ou des diablotins, conscients de leur pouvoir terrestre au sein de l’empire.
d'après Van Eyck © Pan Yue
L’exposition présente aussi ses ré-interprétations des Portraits des Epoux Arnolfini de Jan Van Eyck ou de la Maja Desnuda de Goya. Les copies de tableaux des grands maîtres renvoient également à de célèbres opéras de Pékin.
Ainsi la Pietà de Michel-Ange fait référence à l’opéra La fille de l’empereur, histoire d’un amour interdit dont l’action se déroule à l’époque Ming. Dans un tragique dénouement, la princesse Chang Ping, enceinte, se suicide par piété filiale, auprès de son amant, pauvre lettré. Dans la version chinoise, ce n’est pas la Vierge qui tient son fils mourant mais le lettré qui tient sa belle mourante.
Dans la deuxième série de Pan Yue « Ballet Révolutionnaire », les danseuses se lancent avec ferveur sur scène, habillées ou nues. Les ballets-opéras de l’époque communiste, les huit yang banxi, opéras rouges dont La fille aux cheveux blancs, Le Bataillon des femmes gardes rouges, Capturer la montagne du tigre étaient les seuls autorisés sous ordre de la toute puissante Jiang Qing, épouse de Mao. Pan Yue représente les danseuses telles que pouvaient les imaginer les spectateurs, comblant l’ennui par le fantasme.
Photos et vignette © Pan Yue
