© Natasha Lythgoe, Série «Opening», 2011
« Opening » est la première exposition de Natasha Lythgoe en France. Jeune artiste britannique, elle inscrit formellement sa photographie comme partie prenante d’un travail d’écriture globale, ouvert au son, au texte et à la vidéo.
Sur le fond, c’est la notion de perception, loin de tout représentation, qui traverse ses installations visuelles, dont cette exposition spécialement conçue pour la Galerie du Centre Iris. C’est véritablement le terme d’ « ouverture » (« opening ») – dont la déclinaison au pluriel serait aussi sensée – qui caractérise peut-être le mieux l’ensemble de ses recherches.
© Natasha Lythgoe, Série «Opening», 2011
Empreint d’une philosophie et d’une pratique bouddhiste, le parcours personnel de Natasha Lythgoe l’a conduit sur le territoire de la danse et de la méditation. Dans ces pratiques, elle cherche une connexion à la nature, à la Terre, à l’instant présent. Cette quête, avant tout intime et personnelle, la guide également dans la photographie, vers un état d’éveil et de conscience. Avec quelques intrusions de la réalité et du rêve, ses images participent, entre abstraction et réalisme, à la déconstruction de la notion de représentation.
Natasha Lythgoe envisage sa photographie comme un tout. Il ne faut pas à l’évidence chercher dans chaque image une objet précis, la volonté d’une représentation et encore moins l’anecdote. Si une image peut vivre de manière autonome, susciter seule une réaction, une émotion, une réflexion, nous percevons sa valeur véritable lorsqu’elle a été incérée dans la lecture complète d’une série.
© Natasha Lythgoe, Série «Opening», 2011
Ce refus de l’image forte, cette distance par rapport à ce qui semble être la matière de telle ou telle image, s’inscrit dans un mouvement de non-représentation. Natasha Lythgoe cherche principalement la perception d’un univers, d’un état sensoriel, en lien avec la nature et les éléments qui la composent : végétaux, animaux, humains. Chaque ensemble d’images associées n’est ni définitif, ni figé dans une séquence immuable.
« Opening » est une proposition : l’idée d’accrochage, voire même d’exposition, ne correspond pas exactement à la liberté de circulation et de fluidité que Natasha Lythgoe tente d’atteindre. Il est plutôt question pour chaque corpus d’images d’une construction, d’un assemblage libre permettant une appréhension physique et mentale de chaque série.
Profondément sensible et sensuelle, à la fois viscéralement terrienne mais mystique, la photographie de Natasha Lythgoe s’inscrit en même temps dans une approche intellectuelle, proche de la théorie de la « déterritorialisation » de Gilles Deleuze. Cette constellation d’images au premier abord disparates forme un tout : ensemble, ces images constituent la possibilité d’un sujet, au-delà de ce qui est représenté, et même en dehors de ce qui est photographié.
© Natasha Lythgoe, Série «Opening», 2011
Natasha Lythgoe nous indique une piste pour regarder derrière la photographie, pour non seulement contempler ce qui nous est donné à voir, mais aussi pour éprouver cette relation physique, psychique et intime qui noue lie à la Terre et au temps. Elle explore les différentes voies par lesquelles un ensemble d’images de différents époques, de différents lieux ou thèmes apparents, peut agréger un tout cohérent et sensible.
C’est également un retour à soi et vers la conscience de soi que provoquent les photographies de Natasha Lythgoe. Elles parlent bien sûr à nos yeux, mais nous les regardons aussi avec nos oreilles, les ressentons avec notre ventre, notre peau.
Dans la proposition de Natasha Lythgoe, rien n’est défini sinon cette perception du vivant, de la nature, des vibrations infimes qui sillonnent notre monde.
© Natasha Lythgoe, Série «Opening», 2011
Natasha Lythgoe est nées à Londres en 1972. Elle est photographe professionnelle depuis 15 ans. Elle vit à Brighton et achève actuellement un Master de Photographie au London College of Communication. Son travail se divise entre travaux de commandes, projets personnels et enseignement de la photographie.
Vignette et photos : © Natasha Lythgoe, Série «Opening», 2011