© Quinn Jacobson, Cannabis Farmer
En s’emparant du procédé au collodion humide sur plaques, le photographe américain Quinn Jacobson explore le temps, la mémoire, mais également l’imaginaire collectif. Sur la forme, cette technique photographique, primitive mais complexe, nous ramène au cœur de l’histoire de ce médium. Sur le fond, Quinn Jacobson questionne ses racines, et son «américanité». Il dresse de manière frontale le portrait de ce Grand Ouest Américain, en combinant contemporanéité et imagerie populaire. Fragiles et soumises aux aléas de la chimie, les images sur verre ou sur métal de Quinn Jacobson sont le reflet de vies parfois rudes, souvent singulières. Il se réapproprie le mythe du pionnier pour mieux interroger la réalité et la légende du Grand Ouest Américain.
Après « Glass Memories » présentée au Centre Iris au printemps 2010, « The American West Portraits » constitue une nouvelle étape dans le parcours de Quinn Jacobson, l’un des tous premiers a avoir réutilisé cet ancien procédé qui trouve aujourd’hui un nouvel écho dans la création photographique.
Quinn Jacobson est né dans l’Ouest Américain. Il y a vécu la majeure partie de sa vie. Pour lui, cette partie de l’Amérique demeure envoûtante, belle et dangereuse à la fois. Même si la réalité quotidienne bouscule les clichés de la légende, affadie son aura, il y demeure encore un esprit de conquête et d’exploration ; l’idée d’une terre vierge, d’un espace ouvert à tous les possibles et à toutes les folies. Une force magnétique émane toujours de cette région. Un sentiment de liberté aimante hommes et femmes et les pousse à chercher, retrouver, éprouver ce «rêve américain».
L’Ouest Américain, celui qu’on associe aux pionniers, oscille entre une image romantique et diabolique. Certains le perçoivent encore un peu à la manière d’une peinture d’Albert Bierstadt : d’immenses plaines entourées de hautes montagnes, peuplées par d’immenses troupeaux de buffles. D’autres y voient la grande Ruée vers l’Or de 1849, ou le théâtre du génocide indien.
Ce «mythe» géographique hante encore les esprits et suscite bien des epérances. Il continue toujours d’attirer des « êtres à part », des personnalités en marge de notre société, venues de tous les coins de la planète. C’est cet individualisme forcené qui fascine et intrigue Quinn Jacobson. Il a intentionnellement gommé ou évité toute référence au paysage ou à l’espace. Il les remplace par un fond uniforme, souvent sombre. Seule, la figure humaine est au cœur de l’œuvre de Quinn Jacobson. Il représente ses modèles tel qu’il les voit. De face, sans fards, ni maquillages, ni filtres.