© Steven Pippin
A Non Event (Horizon). Un non-événement.
Mais aussi un horizon, au sens astronomique du terme.
Depuis le début de sa carrière, Steven Pippin cherche à tordre notre rapport habituel au temps – et à mettre en acte cette distorsion dans la photographie. Après avoir élaboré de nombreux dispositifs qui nécessitaient des temps de pose d’une heure ou plus, il s’intéresse aujourd’hui au moment charnière de la destruction : de cet instant, il fait œuvre.
Comment appréhender une telle frontière temporelle ? Pippin propose d’explorer l’instant-limite où, dans le dispositif à la base de sa série Point Blank, l’appareil photo « s’immortalise » (dans un instantané) à l’instant précis où il est détruit par balle. Plus encore que la trace photographique qui en restera, c’est cette fraction de seconde où l’appareil disparaît dans une dernière réalisation de sa fonction qui fait sens.
C’est cela, l’horizon, ce point déterminant où l’on passe d’un espace-temps connu aux nouvelles lois du trou noir, et où, entre autres, il n’y a plus d’événements au sens où nous l’entendons.
A Non Event (Horizon) présentera pour la première fois au public la série Point Blank.
Photographier et être photographié : « Tout est photographiable et tout le monde est photographe […] Tout peut produire des photographies.» Frédéric Paul, Steven Pippin
Faire coïncider le photographié et le photographiant, ainsi pourrait se résumer la démarche de Steven Pippin : il transforme des objets très divers (une baignoire, des toilettes de train, les machines d’une laverie automatique…) en dispositifs photographiques complets, comprenant une chambre noire et les éléments nécessaires à l’intégralité du procédé de développement.
Le nouveau dispositif créé pour A Non Event (Horizon), et qui donne naissance à la série Point Blank, est non seulement un mécanisme technique très précis, mais aussi un dispositif de miroirs : d’une manière générale, le travail de Pippin tourne autour de la mise en abîme ou du jeu de miroirs. Un enjeu supplémentaire apparaît ici : celui de la coïncidence entre la création d’une dernière image et la destruction.
« Développer un appareil photo qui puisse prendre son propre processus photographique à l’œuvre et ensuite rendre compte de lui-même : cela devrait être l’objectif final, l’objectif ultime de la photographie. » Steven Pippin