© Pierre Duterte
La Capitale Galerie 18, rue du Roule 75001 Paris France
" Il y a 20 ans, je rencontrais Pierre Soulages pour la première fois, j’étais très intimidé. Assis dans son atelier pour un entretien de 30 minutes je me permis de lui demander de me montrer « ses outils » que je pressentais peu « ordinaires », j’obtins pour réponse un « non je ne les montre pas»! Nous avons échangé sur le « miraculeux » de sa peinture, sur la pêche à la mouche, sur le travail des artisans, sur Joseph Delteil. Et, après … deux heures, très gentiment Pierre me dit : « viens, je vais te montrer mes outils ».
Un étroit placard s’ouvrait alors et je faisais face à ses outils faits maison, faits main ! J’étais très impressionné devant la boîte aux trésors que j’avais pressentie. Nous nous étions retrouvés sur le geste du tailleur, du cordonnier etc. et j’ai compris que sa peinture non traditionnelle, extra-terrestre nécessitait des outils hors du commun. Que la main de Pierre avait besoin de ses outils pour traduire ce qu’il cherchait dans l’instant.
Je compris alors que sa liberté de création passait aussi par la liberté de créer SON outil. Au-delà d'une vision éthique, il y avait une réflexion sur l'outil. La liberté de créer passait par des « instruments » qui n'étaient pas le fait du hasard, ou d’une habitude de marchand de pinceaux. Ces pinceaux ordinaires n'avaient rien à faire ici. Tout était lié, réfléchi, tout était unique. Son idée relayée par sa main et terminée par son pinceau. L’outil n’entraînait pas le travail. Le travail particulier d’un moment particulier avait besoin de son outil. S’il n’existait pas il fallait le créer, lui aussi.
Il y a quelques mois, j’ai dû vaincre ma réserve à oser demander de pouvoir photographier ces outils, ses outils. Cette exposition, moment d’échange et de partage, est un pont entre notre première rencontre et aujourd’hui. "
Pierre Duterte