Centre Culturel Canadien 5, rue Constantine 75007 Paris France
Le Centre culturel canadien présente la première exposition en France de la photographe Diana Thorneycroft. L’exposition présente dans sa totalité la série Group of Seven Awkward Moments, une vingtaine de photographies qui ont marqué le milieu artistique du Canada ces trois dernières années (Le magazine Canadian Art a inclus cette série dans l’une des 10 meilleures expositions de l’année 2008), ainsi qu’une sélection d’œuvres de la série plus ancienne, The Canadiana Martyrdom Series. Par cette alliance particulière entre scènes de genre, paysages, petites histoires enchâssées dans la Grande, et martyres de poupées de plastique, cette exposition donne une vision littéralement "dépaysante" du Canada. Les histoires extraordinaires de Diana Thorneycroft exposent l’image inusitée, hybride, iconoclaste d’un pays reconstruit à partir des scènes fantasmées issues d’un imaginaire collectif supposé, un imaginaire débridé où s’entrechoquent faits réels, coutumes, tabous et stéréotypes.
L’artiste joue avec le sentiment d’identité nationale et en montre l’artifice. Dans ses somptueux décors de petites figurines industrialisées, la lumière naturelle est un mensonge visible qui renvoie le spectateur à un monde fabriqué, figé (touristique), vidé de substance mais néanmoins fascinant, domestique (rassurant) et divertissant. Aussi toutes les scènes sont-elles plus obscures qu’il n’y paraît, malgré l’éclatante facture de ces petits spectacles en vase clos.
Dans Group of Seven Awkward Moments, désastres, accidents et scènes ambiguës se déploient sur fond de dioramas élaborés à partir de l’imagerie picturale du célèbre Groupe des Sept. Pour ce groupe de peintres-explorateurs qui s’attacha à représenter la nature sauvage du Canada et dont le nombre varia jusqu’en 1931 (ils furent jusqu’à 10, si l’on exclut Tom Thomson qui mourut avant la fondation du groupe mais qui en est l’inspirateur), un nouveau style devait être inventé pour prendre définitivement distance avec l’art européen qui avait la première place dans les musées du Canada. Leurs paysages, réalisés avec des couleurs franches et de larges touches, avaient pour ambition, dans les années 1920, de représenter une identité distinctive, évocatrice d’un sentiment national canadien.
Or, Diana Thorneycroft réduit cet idéal à une simple image, donne à ces œuvres une « utilité » en en faisant les fonds de scène d’un imaginaire improbable et totalement hétérogène. La nature sauvage idéalisée par le Groupe des Sept est paradoxalement peuplée et entachée d’événements embarrassants. Quant aux martyres de « The Canadiana Martyrdom Series », leur absurdité tranche avec la banalisation de la violence engendrée par la libre circulation des images dans les médias de masse. Que les martyrs soient des célébrités de la culture canadienne représentées par des jouets ajoute au cynisme apparent de l’œuvre.
Diana Thorneycroft utilise l’attirance du spectateur pour les idoles et la violence, et la pousse jusqu’à un travestissement caricatural, là où l’industrie culturelle le pratique tout « naturellement ». Présentées pour la première fois à un public étranger, ces scènes a-typiquement canadiennes auront, sorties de leur contexte national, une résonance tout à fait nouvelle. Elles mettent en question l’exportation d’un certain exotisme canadien.
Cette exposition se déroule parallèlement à l’exposition collective My Winnipeg qui s’ouvre le 23 juin prochain à la Maison Rouge –Fondation Antoine de Galbert à Paris.
Diana Thorneycroft vit et travaille à Winnipeg (Manitoba). Elle est reconnue aujourd’hui comme une artiste incontournable de la création photographique contemporaine nord-américaine et a été sélectionnée comme l’un des 100 photographes les plus prometteurs du tournant du 21e siècle dans la publication Blink (Phaidon Press, 2002), qui réunissait les choix de 10 commissaires internationaux parmi les plus influents.