
Vernissage le jeudi 19 mai de 19h à 21h30
« L'essence de l'image est d'être toute dehors, sans intimité, et cependant plus inaccessible et mystérieuse que la pensée du for intérieur ; sans signification, mais appelant la profondeur de tout sens possible ; irrévélée et pourtant manifeste, ayant cette présence-absence qui fait l'attrait et la fascination des Sirènes. » Maurice Blanchot
Ces quelques lignes de Maurice Blanchot se révèlent précieuses pour qui veut comprendre le travail de l'artiste-photographe Jérôme Combe : le réalisme – imposé par le processus de reproduction du réel propre à la Photographie – , est comme distancié, voire cassé, par l'esthétique picturale prégnante dans ses photographies. La Nature, pour lui, est avant tout matières, formes, couleurs, une palette propre à créer des images.
« Je m’attache aux matières, aux textures, à la répartition des masses et des couleurs en me détachant de la réalité photographique. Mes sujets se situent sous mon regard, natures peut-être mortes, plans uniques dépourvus d’horizons. J’aime à explorer les frontières, à la recherche d’équilibres subtils », nous dit l'artiste.
Photographies de la nature, leur réalisme imposé se teinte d'un lyrisme voilé murmurant la mélancolie. Difficile, en effet, de se laisser aller à la seule contemplation de l'objet capturé : en face de ses œuvres nous pensons inévitablement à Barthes pour qui la Photographie touche à l'art par le théâtre « à travers un relais singulier : la Mort ». C'est la pose, fondement essentiel de la photographie, qui amène l'homme à penser conjointement le Temps et la Mort nous dit Barthes. Or, dans la série « Hiver », le temps et la mort sont directement inscrits dans les photographies, comme capturés ou figurés. Ici, des feuilles d'Automne prises dans la glace, là le givre vient recouvrir progressivement le bois mort, à côté, le vert tendre d'une feuille épargnée. Les photographies de Jérôme Combe sont donc moins une mise en scène de la Nature, « temple où de vivants piliers / Laissent parfois sortir de confuses paroles » (Baudelaire), qu'une mise en abîme de l'art Photographique dans son rapport avec le temps, dans son rapport avec la peinture aussi.
Complexes et subtiles, les photographies de Jérôme Combe sont aussi empreintes de pudeur, la lumière y est diffuse, les couleurs sont comme retenues, les sujets émergent lentement. L'artiste, travaillant la réalité, crée des images : le caractère iconique de ses photographies se double d'une approche littéraire, métaphorique. Photographies du dehors et cependant mystérieuses, « sans signification, mais appelant la profondeur de tout sens possible, irrévélée(s) et pourtant manifeste(s) », à la manière des Sirènes, les Photographies de Jérôme Combe fascinent.
Sarah Pellé