Bailly Contemporain 38 rue de Seine 75006 Paris France
"Dans cette série d'animaux, j'avais décidé d'être "objectif" et de ne pas modifier le décor, juste apporter les animaux.
Je ne peux plus m'empêcher de modifier...Mais voici l'explication:
Qu'est ce qu'une photo objective? : la reproduction photographique non modifiée du sujet? Cela n'existe pas. Le choix du point de vue, du cadrage, de la focale de l'objectif, font que chaque photographe fera une image différente des autres. Laquelle est la vraie? aucune et toutes.
Je ne vois plus les sujets que par petits bouts juxtaposés et assemblés ensuite, pris de différents endroits, comme un visiteur qui se ballade dans le lieu et promène son regard un peu partout. Il mémorise toutes ces visions , puis élabore un souvenir de l'endroits, fait d'une mosaïque d'impressions et de points de vues différents. S'il regarde une photo de cet endroit,( et même une série de photo- on en prend toujours plusieurs de différents point de vue, car on sent bien qu'une photo unique ne pourra pas rendre compte) il a toujours une frustration, un sentiment d'incomplétude, la photo ne " rend" pas l'ambiance, la totalité du lieu. Elle le "rétrécit", le minimalise.
Pour moi mon travail d'assemblage est plus proche de la réalité de mon souvenir et de mes impressions, elle est plus complète. Je ne peux plus revenir en arrière et faire une photo "normale". Je la trouve trop décevante, incomplète et partiale...
Des études anatomiques ont montré que la vision optique de l'appareil photo, n'est pas celle de l'oeil. Le champ visuel de la vision précise est très étroit et l'on promène le regard constamment pour tout voir. Dans le champ large , nous ne voyons que des formes, surtout si elles se déplace et la vision est courbe ( comme une photo panoramique). C'est le cerveau qui reconstitue une image complète et aux lignes droites. Mais c'est très fugitif. Il faut le dessiner pour le mémoriser. Je pense que mon travail reconstitue le vrai travail de l'?il et du cerveau lors d'une visite. Tout regarder en balayant le regard, puis élaborer sa vision subjective, différente de celle des autres."
Jean-François Rauzier.