Galerie Blumann 4, Place des Vosges 75004 Paris France
Pierre Terrasson a toujours marché à l'instinct. Ses prises de vue ? Juste une question de feeling. Témoin important de la scène musicale française et internationale depuis le début des années 80, musiciens, acteurs, poussières d'étoiles, stars eternels, beaucoup ont été capturés sur le vif par son Nikon ou son Hasselblad. Au fil des années Pierre Terrasson a brossé des portraits uniques représentant la scène hard-rock (Motorhead, Deep Purple, Alice Cooper, Slayer) la chanson française (Gainsbourg, Vanessa Paradis, Daniel Darc, Rita Mitsouko, Bashung) ; le mouvement punk et new-wave (les Clash, Siouxsie, Cramps, Ramones, Cure, Nina Hagen, Stranglers) aux « grosses pointures » (Mick Jagger, Joe Cocker,U2, Depeche Mode, James Brown), se penchant même, à partir de la fin des années 90, sur l'émergence du raï et de la nouvelle scène hip-hop en France (Khaled, Cheb Mami, Stomy Bugsy, Doc Gyneco, Diam's). L'hétérogénéité de son travail est surtout motivée par une curiosité sans borne pour tout ce qui peut sembler atypique, ce qui ne rentre pas dans les cadres. Ses archives sont dès lors pleines de personnalités énigmatiques, excentriques, hors-norme. Dernièrement Pierre Terrasson a mis en scène des artistes de la scène rock underground parisienne ou des personnages saillants : Charlie Bauer, Chloé Mons ou Bartabas.
Après des études d'arts plastiques à l'Ecole Nationale Supérieure des Beaux-arts de Paris, il enseigne le dessin et la photographie entre Neuilly et Aubervilliers. C'est à partir de 1980 qu'il se tourne vers la photo rock : débutant chez Rockenstock il déposera ses clichés auprès de toute la presse rock et généraliste la plus influente du moment (Rock & Folk, The Sound, Best, Paroles et Musique, Rolling Stones, Libération, L'Evénement du Jeudi, Actuel…). Un âge d'or, celui des années 80, où être photographe ne s'improvisait pas. Ce n'est pas Pierre Terrasson qui vous dira le contraire, lui qui a passé cette décennie à prendre des photos « par curiosité », s'est embarqué par pure passion dans l'univers excentrique du hard-rock, du punk et de la new-wave, qui a connu stades, festivals en plein air, petites salles , revient de loin. Et peut se vanter d'avoir contribué aux archives de l'histoire du rock : « On allait voir des groupes jouer sans savoir qui ils étaient. J'ai vu comme ça The Cure à Londres en 1982 et U2 a l'Elysée Montmartre en 81. J'ai fait la une de Libé mais je ne savais pas ce que je faisais ». Assister à de grands évènements sans en avoir conscience : n'est-ce pas ainsi que se fait l'histoire ? Ces temps où faire le photographe était un travail indépendant, où l'on travaillait d'arrache-pied pour documenter une passion tout en étant rémunéré sont bel et bien révolus.
À ceux qui seraient atteints d'amnésie, Terrasson rappelle qu'avant que les maisons de disques et les magazines ne se mettent à exiger un formatage esthétique, donc un contrôle de l'image de « leurs » artistes (assimilés de ce fait à un produit marketing à 360°), il a été aussi une époque où l'image, c'était avant tout un deal entre le photographe et l'artiste ; un espace de liberté artistique que les diktats du marketing vont drastiquement réduire par la suite, notamment au début des années 90. « Le but n'était pas de faire une photo bonne ni forcément travaillée, mais plutôt d'être là, de mettre un coup de flash dans la gueule d'un mec. Il n'y avait aucun droit de regard. », explique Terrasson lorsqu'il parle de ces années «Warwick », hôtel de luxe parisien où transitaient toutes les rock stars de l'époque, mandatées par Sony ou Warner. C'est également durant cette période qu'il réalise une pléthore de pochettes vinyles, pour Vanessa Paradis, mais également pour les chanteurs français du top 50… « Il y avait énormément de boulot. Les labels faisaient appel à des photographes de rock plutôt que d'aller chercher des gens de la mode. Ça restait en famille ». Les meilleures anecdotes restent celles documentées par ses photos. Gainsbourg, justement, dont une ample série de photos prises par Terrasson a été récemment exposée en janvier-février 2010 à Paris, montrant la mutation progressive de l'homme à la tête de chou en Gainsbarre. Des anecdotes sur ce train de vie « à l'arrache » auprès de personnalités, Pierre Terrasson en a plein ses tiroirs, comme celle sur Gainsbourg allant pisser dans le jardin de son atelier d'Aubervilliers entre deux séances de shooting, ou bien Coluche écrasant son pétard juste avant que l'objectif ne vienne sublimer son regard embué...