Galerie Dix9 19 rue des Filles du Calvaire 75003 Paris France
Fort de sa double appartenance franco-marocaine, de père musulman et de mère catholique, Mehdi-Georges Lahlou traverse avec bonheur les frontières de nos sociétés multiculturelles. Dans ses performances comme dans ses installations, il questionne l’esthétique, notamment celle liée à l’Islam, et ouvre sur des problématiques plus générales telle que l’identité (religieuse, culturelle ou sexuelle).
S’affranchissant allégrement des stéréotypes, l’artiste joue les trublions et travestit son corps comme il travestit les traditions. Il sait, par juxtaposition, rester dans cet entre-deux qui perturbe les convictions établies. Il revêt les stigmas liés au féminin ( talons aiguille, rouge à lèvres, voile), mais garde les attributs de sa virilité (poils, sexe, muscles). Un travestissement qui n’est donc pas intégral, et qui chamboule ainsi la norme des genres, sociale et sexuelle. Il perturbe des clichés plus triviaux comme celui de l’artisan marocain, gardien du savoir-faire traditionnel, quand il applique de façon industrielle les motifs de papier peint « au rouleau ».
Il n’est pas question de « choc des cultures » mais plutôt d’un double enfermement : sortir d’une culture, c’est être confronté à une autre culture qui vous enferme à nouveau.
D’où cette prédilection pour les boîtes, symbole de l’enfermement. Celui de l’individu dans les restaurant-boîtes « Dar-Koom », ou de la Qa’abah dans « Home Sweet Home ».Celui d’une culture qui emprisonne avec ses clichés et ses discours dans ces boites que sont les cadres de l’image ou des vidéos.
Pour sa première exposition personnelle en France, Mehdi-Georges Lahlou poursuit sa démarche et présente à la Galerie Dix9 un ensemble cohérent de sculptures, vidéos, photographies , peintures/installations et performances qui traitent de l’ambiguïté liée à l’esthétique – et de l’esthétique stigmatisée - où le corps est omniprésent. Un corps, figure de l’artiste, qui se cache et se montre en même temps comme dans la sculpture « Hommage à nous-même ».
Le travail plastique de Mehdi-Georges Lahlou, comme toujours, tient de l’idiotie. Faire l’idiot, comme le bouffon du roi, c’est lutter avec pertinence et liberté contre la gravité de tout système sclérosant. Les vidéos ont d’ailleurs pour titre « Stupidités contrôlées », comme de manger une banane avec le Coran sur la tête.
Poussant les limites jusqu’à l’absurde, Mehdi-Georges Lahlou garde toujours un certain chic dans le ridicule et puise dans la légèreté de l’idiot un basculement vers le merveilleux.