Les Rencontres d'Arles 2010 34 rue du docteur Fanton 13200 Arles France
Les photographies de l’artiste Annette Kelm semblent perpétuer sans grandiloquence les formes classiques de la représentation photographique : ses natures mortes, portraits, images d’objets, paysages, architecture sont produits dans des formats standards, selon des techniques de studio souvent conventionnelles ou en extérieur. Ses photographies sont réalisées à l’ancienne, en grand ou moyen format, avec des appareils analogiques, et tirées à la main, une par une. Elle produit aussi bien des images individuelles que des séries à plusieurs motifs et elle présente toujours lors de ses expositions une collection qui déjoue toute tentative d’interprétation unique. En apparence, Annette Kelm suivrait une stratégie conceptuelle et critique, en ce sens qu’elle photographie des objets, des éléments d’architecture et de design qui se réfèrent à des corrélations historiques significatives.
En même temps, elle atténue cette objectivité promise en ajoutant à ses compositions des accessoires qui semblent irréels ou appartenant à une mythologie subjective. Ses sujets sont souvent présentés sur fond neutre à la manière de la photographie classique de studio. Pourtant, l’arrière-plan est d’une présence telle qu’il se mêle au premier plan, voire aux objets photographiés eux-mêmes. Si les sujets des photographies d’Annette Kelm sont présentés de face, les éléments et l’interprétation habituels de la photographie conceptuelle, mise en scène, documentaire ou analytique sont contrés grâce à un artifice tout simple : le réel et le fictif, l’objectif et l’émotionnel, le présenté et le suggéré sont associés à la manière d’un collage pour former un nouveau canevas de ce que pourraient être les images, voire de la réalité qu’elles dépeignent. Les oeuvres de Kelm trahissent un intérêt aussi bien pour les contextes historiques, l’histoire des industries, de l’artisanat et du design, que pour les questions qui abordent l’artificiel et l’ambigu, questions traditionnellement ressenties au travers de phénomènes culturels. Ses photographies, d’une portée réaliste, oscillent entre la précision et l’ambivalence, et projettent ses sujets dans un complexe réseau de relations d’une nature à la fois visuelle et substantive, dans lequel des conflits constructifs apparaissent entre ce qui est présenté et ce que l’on aurait l’intention de présenter ; ainsi voir devient plus important que savoir.